M.Mansour Moalla, ancien ministre du Plan et des Finances de Bourguiba, grand argentier, fondateur de la BIAT, refait surface avec une initiative pour résorber le chômage à hauteur de la création de 600.000 emplois en 3 ans, puis d'en générer 70.000 par an, pour les demandes additionnelles. Il a rencontré pour cela, une bonne vieille connaissance en la personne du chef de l'Etat, Béji Caïd Essebsi, qui ne peut qu'apprécier, encore faut-il le trouver à l'ancien patron des finances logis à sa mesure et demeure à son volume. Faisons confiance à BCE le « magicien » et fin artisan de la « Berka » politicienne, pour trouver la solution utile et honorable. Tiens, un « ministre d'Etat, conseiller personnel » du Président pour le développement global, la finance et l'emploi, ne serait pas si mal ! Tous les présidents et tous les rois de la planète en usent pour bénéficier des anciennes et grandes compétences qui n'ont rien à se reprocher du temps où ils étaient aux affaires. De « Si Mansour », je garde le souvenir de notre professeur à l'ENA (Ecole nationale d'Administration) où il nous enseignait déjà le système bancaire et sa belle phrase qu'il utilisera d'ailleurs, plus tard, comme support publicitaire pour « sa » banque (la BIAT) : « l'argent et la banque, c'est les idées » ! Et M. Moalla en a bien quelques unes. D'ailleurs, après la dépression nationale vécue fin des années soixante du siècle dernier et le crash du système collectiviste de M. Ben Salah, feu Hédi Nouira, lui-même Premier ministre, ont demandé aux entreprises et aux hommes d'affaires de recruter et d'encadrer au niveau de la formation beaucoup de jeunes chômeurs et l'effet boule de neige n'a pas tardé à débloquer toute la machine grippée de la production et de l'économie dans son ensemble. Je dis cela parce que non seulement les « idées » font défaut, aujourd'hui, mais aussi, l'étoffe des hommes et des « locomotives » qui peuvent les mettre en œuvre. Il y a trop de « timidité » et de mollesse chez certains de nos ministres du Développement. Je regrette de le dire, mais ils manquent un peu de mordant et d'audace qui sont essentiels dans l'art du commandement politique. Or, nous vivons une telle accumulation des exigences qu'il va falloir se préparer (mentalement) à déplacer de véritables montagnes. La Révolution a mis la barre du « stress social » ou ce que la doctrine politique avec David Easton désigne par « volume-stress » à un niveau jamais atteint et pratiqué, même du temps des premières années de l'indépendance nationale. En 1956 et suivants, le Néo-Destour et l'UGTT faisaient front commun avec la synthèse « Bourguiba-Hached », puis Tlili et Achour, l'Etat était fort et transcendant, et les forces politiques et sociales agissaient solidairement pour relever les défis énormes de l'époque, parce que tout était à faire et cela on a tendance à l'oublier. Aujourd'hui, avec la démocratie naissante, chacun rame pour soi et même le bon Dieu laisse faire ! Les partis « socles » de la stabilité nationale ont des projets différents et même opposés idéologiquement. L'Islam politique, nouvelle sensibilité ascendante est venu s'ajouter aux partis qui cherchent leur vocation et leur âme. Ce qui a encore approfondi la fracture identitaire et politique, puisque le pays a perdu en grande partie, son homogénéité identitaire. Quant à l'UGTT, elle y va en dents de scie. Un jour elle revendique et un jour elle apaise (et je ne dis pas elle soutient), en attendant son futur congrès. Par conséquent, nous sommes confrontés à un nouveau type de société et de nouveaux rapports de forces qui n'arrivent pas à maturité au niveau de la construction idéologique et structurelle. L'UGTT craint quelque part d'enjamber le champ politique partisan (type parti travailliste) et s'en tient pour le moment à ses fondamentaux de canalisation des aspirations des travailleurs et des classes moyennes tout en ayant un œil attentif sur la politique générale du pays et les choix des gouvernements. Mais, la tentation « gauchiste » n'est pas écartée par les jeunes loups très « politisés » qui ont reçu formation idéologique à l'extrême gauche. Le congrès tranchera et à mon humble avis on y verra plus clair d'ici là... Donc, à suivre ! Entretemps, le système politique a perdu le socle partisan de la modernité avec l'effritement de « Nida Tounès », héritier naturel du Néo-Destour et du Bourguibisme social-démocrate et progressiste. Une crise comme la dernière de Kasserine, aurait pu être canalisée et rapidement circonscrite, si le gouvernement avait des soutiens partisans crédibles et engangés. Or, ça n'a pas été le cas, et après le Bardo et Sousse, le secteur touristique a reçu encore une fois une tuile sur la gueule et Mme Elloumi, ministre en charge, n'a fait que confirmer les annulations de réservations par milliers et constater les dégâts. Pauvre tourisme, tel Sisyphe de Corinthe de crise en crise, avec cette pierre maudite qui l'assomme ! Aujourd'hui, nous sommes à la croisée des chemins. Les seuls qui jouent « gagnant-gagnant » sont ceux qui revendiquent et mobilisent la « Rue » à tous vents car ils n'ont rien à perdre. D'ailleurs, leurs « leaders » respirent la bonne santé et « saha lihom », alors que les acteurs du pouvoir vivent le stress permanent sous la pression quotidienne de la rue et des sit-in ! Souhaitons prompt rétablissement au Premier ministre, M. Habib Essid qui a quitté l'hôpital... Lui, au moins, paye de sa santé pour maintenir le cap dans toutes ces tempêtes du populisme irresponsable et acharné. Encore et encore Boileau : « La critique est aisée... mais l'art est difficile » ! Aux Tunisiens de s'en souvenir ! K.G