Dans le cadre de la célébration de la Journée Mondiale du Théâtre, le TNT a organisé la « Semaine de la Journée Mondiale du Théâtre ». Outre les représentations théâtrales qui ont eu lieu au cours de cette semaine, le TNT a invité Jean-Michel d-Hoop et Héloïse Meire, deux metteurs en scène belges, en vue de réaliser un atelier avec les élèves de l'Ecole de l'Acteur sur la technique de la manipulation des marionnettes géantes (de taille humaine). Cet atelier a débouché sur un travail intitulé « Une Tempête », texte de Shakespeare, déjà présenté en Belgique, basé sur la relation entre l'acteur et un double (la marionnette). Jean-Michel d'Hoop a suivi une formation d'acteur à l'IAD, à la Klein Akademie et qui finira à l'INSAS, il a joué d'abord comme acteur sous la direction de Michel Dezoteux, Philippe Sireuil, Henri Ronse, Alain Wathieu, etc... sur sa lancée il fonde très vite la compagnie POINT ZERO et ouvre un nouveau lieu pluridisciplinaire à Bruxelles : Les Vétés (ancienne école vétérinaire d'anderlecht). En 1993, sa première mise en scène Yvonne, Princesse de Bourgogne de Witold Gombrowicz crée l'événement et remporte aussitôt le Premier Prix Théâtre de la COCOF. Suivront ensuite Peer Gynt de Henrik Ibsen et Le Fou et la Nonne de S.I. Witkiewicz, Prix Théâtre du Meilleur Scénographe (Marcos Vinals) et Prix Théâtre du Meilleur Espoir Acteur Masculin (Karim Barras). Après avoir terminé son Master en langues germaniques, Héloïse Meire poursuit une formation au théâtre à l'IAD. Elle suit également plusieurs formations en manipulation de marionnettes. Elle joue pour diverses compagnies de théâtre jeune public et de théâtre pour adultes. Elle est également animatrice de théâtre pour adolescents. Passionnée par les langues, elle traduit des textes de l'allemand, du néerlandais et de l'anglais en français. Fondatrice de la compagnie What's Up ?, depuis 2010, Héloïse a mis en scène Babel Ere en 2011, coréalise « Amazone » avec Jean-Michel d'Hoop en 2013 et a mis en scène Dehors devant la porte au Théâtre National en novembre 2014. Nous avons rencontré les deux artistes belges qui nous ont parlé de cette technique, de leur parcours et des projets qu'ils ont montés séparément ou ensemble. Nous leur avons demandé de nous expliquer cette technique de marionnette qu'ils investissent sur la scène et son apport à l'acteur, à la pièce jouée et aux spectateurs. Jean-Michel d'Hoop dira : «qu'il s'agit d'une technique que nous avons développée au sein de la compagnie Point Zéro qui est basée sur la relation entre l'acteur et un double (la marionnette). La marionnette n'est pas traitée ici comme un corps à part mais comme une véritable excroissance de l'acteur, une sorte de siamois complice. Le manipulateur n'est ici jamais dissimulé, au contraire, il s'agit d'explorer la relation entre le manipulé et le manipulateur, l'animé et l'inanimé. Et toujours nous revenons au fameux « Qui manipule qui ? ». Le travail du metteur en scène s'oriente tout particulièrement sur « l'animé et l'inanimé ». Par le truchement de pantins, il explore la relation singulière qui peut se nouer entre un acteur et un double. Il revendique un théâtre pour un large public, tout en étant résolument moderne et innovateur. Il parie sur l'alliage possible entre une démarche scénique audacieuse et un divertissement intelligent basé sur le plaisir immédiat de la rencontre entre l'acteur et le spect-acteur. » Héloise Meire a ajouté que : « Dans cette technique, il y a l'importance accordée à la marionnette, mais aussi la façon dont l'acteur manipule sa marionnette. Le comédien, lui, doit s'abriter derrière la marionnette en articulant tout son jeu à la marionnette. Il faut observer attentivement la marionnette tout le temps quand on la manipule. Quand on est dans l'action on est tenté de regarder son partenaire mais on ne peut pas. On doit regarder les yeux de sa marionnette qui, elle, va regarder son partenaire. » Les deux artistes ont réalisé en commun un spectacle où ils ont intégré les marionnettes géantes. Il s'agit de la pièce « Amazone », inspirée de la mythologie grecque. « A travers l'histoire d'amour entre le héros grec Thésée et Antiope, reine des Amazones, ce spectacle explore avec humour les rapports complexes entre les hommes et les femmes. Un voyage original à travers la mythologie, à la rencontre de mystérieuses créatures... » Pour ce faire, les deux artistes ont imaginé et fabriqué de grandes marionnettes mythologiques qui reflètent l'univers qu'ils souhaitent explorer. De plus, chacun de ces deux artistes a réalisé au sein de leurs compagnies respectives des pièces théâtrales à base de marionnettes géantes. Jean-Michel d'Hoop nous a parlé de la plus récente, « Borgia », comédie contemporaine de Thomas Gunzig, créée en 2014. Une pièce contemporaine qui traite de la famille, ses petits et grands secrets, ses tensions, ses liens... « Il s'agit d'une fresque sur la famille, nous confia le metteur en scène, ce qui va bien, ce qui va mal, toutes les choses étranges qui se passent en famille, un spectacle qui englobe acteurs et marionnettes... » Quant à la dernière création d'Héloïse Meire, elle s'intitule « Dehors devant la porte », une pièce écrite en 1947 par Wolfgang Borchert qui raconte l'histoire d'un jeune soldat allemand, Beckmann, qui revient dans son pays après avoir été prisonnier pendant trois ans en Sibérie. Il retrouve une Allemagne vaincue, humiliée, qui veut oublier son passé, et dans laquelle il cherche en vain à se réintégrer. « La pièce est construite tel un conte allégorique, une quête dans laquelle Beckmann se confrontera à toutes sortes de personnages, tantôt touchants, tantôt lâches ou cruels. A travers ces rencontres, Beckmann se demande comment et pourquoi vivre dans un monde où il ne trouve pas sa place... », nous expliqua l'artiste. Concernant le projet « Une Tempête » qui est le fruit de l'atelier que les deux metteurs en scène ont réalisé avec les élèves de l'Ecole de l'Acteur, au sein du TNT, nous avons contacté deux élèves de cette école qui nous ont exprimé leurs impressions sur cette nouvelle technique qu'ils viennent d'apprendre. Nizar Shili : « c'est plutôt une expérience plus qu'une formation proprement dite. Savoir manipuler une marionnette de ce genre est une nouvelle chose pour nous. Nous avons des marionnettes, mais cette technique n'existe pas pratiquement chez nous. C'est aussi une occasion de consolider les échanges en matière de théâtre entre nous... » Wided Zoghlami nous a déclaré : « On a passé une semaine avec nos amis belges qui nous ont fait découvrir l'art de la marionnette ? C'était très intéressant pour nous, il faut de la pratique et de la technique : nous avons passé trois ou quatre jours pour apprendre à manipuler la marionnette géante et après, on s'est concentré sur la mise en scène de l'adaptation libre de « La Tempête » de Shakespeare. »