L'expert tunisien et international en commerce transfrontalier et ancien responsable à la douane tunisienne, Lotfi Ayadi, a estimé que la recrudescence de la contrebande et du commerce parallèle, en Tunisie, illustrée, entre autres, par l'accroissement continu du nombre des personnes cherchant à exercer dans l'économie informelle, est très liée à la fiscalité et au système fiscal, s'agissant de la forte pression tarifaire représentée par l'application de taux élevés de taxes douanières, ou encore du caractère trop compliqué et sévère des procédures et du contrôle. Intervenant, hier, lors d'une table ronde sur la fiscalité, au siège de l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat, il a indiqué que les pertes de l'Etat tunisien occasionnées par la contrebande et le commerce parallèle atteignent, selon les études de la Banque mondiale, 2000 millions de dinars par an, alors que la valeur des biens et marchandises distribués et vendus par le biais du commerce parallèle s'élèvent à six milliards de dinars. Il a signalé que 73% des pneus distribués et vendus en Tunisie proviennent de la contrebande et du commerce parallèle, tandis que ce chiffre atteint 80% pour les climatiseurs. Il a ajouté que les pertes de l'Etat à cause de la contrebande des cigarettes atteignent 500 millions dinars par an, tandis que les quantités distribuées illégalement se montent à 380 millions paquets de cigarettes par an, sur un total d'un milliard de paquets consommés. Il existe, aussi, selon cet expert, d'autres raisons derrière la recrudescence de la contrebande et du commerce parallèle en Tunisie, ayant trait aux obstacles techniques non justifiés à l'importation et les formalités compliquées suivies dans ce domaine, ce qui pousse les gens à contourner ces obstacles en pratiquant la contrebande et le commerce parallèle qui ne demandent rien de tout cela et c'est ce qui explique ce qu'il appelé la migration de l'économie organisée à l'économie informelle, c'est-à-dire le fait de quitter l'exercice dans l'économie organisée, avec tout ce qu'il exige comme paiement d'impôts et procédures compliquées, pour pratiquer la contrebande et le commerce parallèle qui ne demandent rien. Au même moment, tout en soutenant les projets tendant au développement des régions frontières en vue de lutter contre la contrebande et le commerce parallèle, il a mis en doute l'efficacité des projets de zones franches basées sur les services, exprimant la crainte de voir ces projets contribuer plutôt à accroitre la contrebande et l'importation anarchique. Il a préconisé la poursuite des réformes tendant à réduire la pression tarifaire et la simplification des procédures à travers l'élimination des obstacles techniques non justifiés, outre le déploiement d'efforts notamment de la part des structures de la société civile en vue d'encadrer progressivement les contrebandiers pour les intégrer dans les circuits organisés et les orienter vers des activités qui servent l'économie comme la limitation des exportations aux produits enregistrant des excédents de production, à l'instar du lait et des œufs, ainsi que pour aider dans la surveillance des frontières.