Meriem Bettaieb est cette jeune artiste issue de la famille Bettaieb, famille qui a compté parmi elle deux artistes. Le premier Brahim Bettaieb est un artiste objectif autodidacte de la galerie Nahoum qui a accompagné son frère aîné, Ridha Bettaieb dans l'aventure artistique, Ridha Bettaieb fréquentant surtout pendant les années 80, les galeries Attaswir et Irtissem, ensuite il fut adopté pendant ses expositions par la galerie des arts. Ridha est resté fidèle jusqu'à sa mort en 1994 à la peinture abstraite et à l'expression plastique pure. Il a connu beaucoup de succès au début des années 90. La collection de l'état à Ksar Said détient beaucoup de travaux intéressants du peintre. Meriem Bettaieb troisième peintre de la famille ne pense pas seulement à perpétuer cet héritage mais à développer elle-même, en toute autonomie, sa propre voie en tentant de promouvoir sa propre démarche qui semble s'annoncer dense et d'envergure. La démarche picturale de Meriem Bettaieb est réellement établie et pourrait se révéler comme significative si elle devait se confirmer et pourrait lui valoir une place importante dans le mouvement pictural. Meriem Bettaieb, n'a pas fréquenté l'Isbat mais plutôt l'école d'art et de décoration de Tunis où elle a reçu les éléments préliminaires de l'apprentissage pictural. Mais le véritable éveil de Meriem Bettaieb prit ses racines à l'école des Beaux Arts de Nîmes en France. Meriem Bettaieb et la lumière Meriem Bettaieb est revenue à Tunis et a développé une ligne picturale très significative rarement empruntée en Tunisie et se situe entre une suite de ligne figurative très proche de l'essentialisme et de la non figuration. Ce paradoxe est assumé pleinement par l'artiste qui n'accepte pas la domination de l'un sans l'autre et assume la dichotomie de son approche en sachant que cette position est inconfortable, hypothétique mais s'avère pertinente et originale. L'originalité de Meriem Bettaieb concernant sa démarche est réellement établie et lui vaut une place à part dans les différentes approches picturales qui se sont développées depuis quelque temps en Tunisie. La peinture de Meriem Bettaieb est de nature coloriste avec une grande brillance, elle ne relève pas les objets peints mais les émotions autour d'eux, mais il reste néanmoins qu'elle s'exprime moins par la couleur elle-même que par ses clartés relatives... ses valeurs. On songe à ceux qui ont utilisé les couleurs, beaucoup de grands noms de la peinture comme Corot et Bonnard, la subtilité de valorisme n'est pas uniquement occidentale, elle l'a été également par les chinois dans le paysage Song. Les coloristes s'opposent aux linéaires par leur clarté relative (valeur) et s'opposent à eux et à leur art de la lucidité et de l'analyse. Ce que les valoristes veulent par leur peinture c'est la perception de la chaleur, de la prégnance, c'est le prix ou la valeur de leur couleur. La peinture de Meriem Bettaieb ne cherche pas à structurer le tableau mais à lui donner du prix et de la valeur aux choses par son organisation et sa construction architecturale. Chez Meriem Bettaieb, la couleur appartient en propre à la peinture tandis que la ligne est partagée par la sculpture et l'architecture. Meriem Bettaieb est en fin de compte luministe et ce n'est pas peu, tout le monde connaît l'adage « la lumière mange la couleur comme la couleur mange la ligne » car pour atteindre la luminosité, les couleurs doivent se faire transparentes, ce mélange de blanc et dans une certaine mesure se perd. Les coloris se perdent, la lumière les a déjà mangés, la lumière déploie des sens très différents que les coloris, les lumières doivent être transcendantales et ne manifestent plus l'objet mais les sens des choses. Meriem Bettaieb réussit la gageure de réconcilier la lumière avec l'éclat de la couleur et la consistance de la ligne et rejoint par là la logique de l'univers et de son harmonie. La lumière telle qu'elle est présente dans la peinture de Meriem Bettaieb est vraiment dévoilement et révélation d'un mystère de la présence, sa lumière est ce par quoi toute chose apparaît. Elle est parfois cette silhouette féminine qui se dévoile dans toute son élégance, son mystère et sa volupté. La lumière est certainement plus qu'apparence plus qu'une opposition, plus qu'un dévoilement. Elle ne peut que mieux nous étonner lorsqu'un dialogue avec la nuit et avec l'obscurité est possible. Cette constatation a paru dans toute sa vigueur dans la peinture de Meriem Bettaieb une peinture du clair-obscur très fine mais combien pertinente. Le clair-obscur et Meriem Bettaieb ! Le clair- obscur est ce procédé pictural qui désigne la manière de détacher les figures par le traitement des ombres et du jour : le clair-obscur est alors le propre du peintre assez monochromatique préoccupé de couleurs qu'ils obtiennent par des dégradés subtiles de teinte allant du blanc, du gris et du noir. Dans l'histoire de l'art, le maître du clair-obscur est Giotto, le Littré signale que le clair-obscur est l'art de peintre les ombres pénétrées de la lumière. Meriem Bettaieb accepte ces approches mais jusqu'à pratiquement préposer sa propre démarche en renforçant les ombres et les lumières pour les faire valoir l'une par l'autre et obtenir leur effet expressif. Chez Meriem Bettaieb, le clair-obscur n'est pas seulement un procédé technique mais réellement un style, un foyer expressif en noircissant les ombres et en blanchissant les jours, cette opposition est restée très douce et non violente. Il n'y a pas de saillie exagérée de l'un sur l'autre, de l'ombre sur la lumière, Meriem Bettaieb joue à l'équilibre sans pousser à l'éruption en visant l'obtention d'un effet voluptueux pouvant atteindre le lyrisme. Cette volupté du clair-obscur, Meriem Bettaieb la doit à la lumière. La monochromie sombre de Meriem Bettaieb n'est atteinte par aucun rayon tombant d'en haut, elle se suffit à son peu de jour, faut-il espérer encore que la nuit absolue soit habitée du jour, que Meriem Bettaieb puisse susciter l'espoir que sa peinture soit habitée par le jour comme elle nous le fait vivre !