Le « Cheikh Rached Ghannouchi » a brassé tellement large à l'ouverture du 10ème congrès d'Ennahdha qu'on serait tenté de croire comme Michel Polnareff que désormais ... « Nous irons tous au paradis » ! Les grands Malraux et Sartre n'auraient trouvé nulle part les « mots » qu'il faut à la place qu'il faut, à une virgule près et même les « silences » qui avaient pour vocation de chauffer l'applaudimètre, pour éviter d'effaroucher quelque part, un « opposant »,un « syndicaliste » ou autre adversaire récalcitrant d'hier, à ces messages, de pardon, de réconciliation et d'Union nationale toujours, appréhendés comme le grand art tactiquo-stratégique des Islamistes politiques de par le monde ! Rached Ghannouchi avait une telle maîtrise de son sujet, que certains malins face-bookistes ont fini par le surnommer le Bourguiba des « intégristes » ou « Khouanjia ».. ! Pourtant les thèmes étaient des plus classiques et le cheikh, qui s'est promené à son aise d'Ennahdha historique des années de braises et qui menait un combat idéologique d'identité, n'oublia pas de tacler au passage les temps où l'Islam était « persécuté », comprenez le comme vous voulez de Bourguiba à Ben Ali et ce que les doctrinaires « frères musulmans » désignent par « l'ère de la désertification religieuse »... Pour arpenter les méandres de l'exil, et pour arriver enfin à la délivrance grâce à cette Révolution, pourtant non islamiste au départ, mais largement apprivoisée par la suite, le « Cheikh », en hôte magnanime, a joué les Augustes qui savent pardonner et oublier quand ils ont la possibilité (Al Aâfwou enda El Makdourah » et est allé même jusqu'à reconnaître les erreurs du passé lorsqu'il avait la haute main sur le pays du temps de la Troïka. Quelques persistances quand même dans le discours pour faire le bon clin d'œil au « peuple Nahdhaoui » fier à juste titre de son « leader » incontesté, la référence au « Makhlouû », l'ancien président déchu Ben Ali, manière de dire : « Ne vous en faites pas...je n'ai pas oublié même si je fais semblant de le faire », et bien sûr le référentiel « islamique » toujours présent et vivace dans ce mouvement en pleine mutation. Justement, en termes de « mutations historiques, la séparation du politique et du prédicationnel « daâwique », est annoncée comme la véritable pierre angulaire du renouveau d'Ennahdha qui passe toute la ligne droite vers le « parti civil » planétaire des démocraties les plus classiques, depuis la séparation de l'Eglise et de l'Etat en Occident au 16ème siècle ! Comme quoi le monde musulman n'a que quelque cinq siècles de retard sur le reste de l'humanité, mais il vaut mieux tard que jamais ! Cependant la « spécialisation » ne peut passer sous silence au vu de cette attitude plus que naturelle chez l'homme de chasser le naturel pour revenir au galop ! Alors « quid » des structures, du daâwique, prédicationnel, et surtout, qu'est ce qui peut en sortir, car malheureusement et à ce jour, il est prouvé que les « tentes daâwiques » n'ont pas créé que des anges d'Imams pacifistes et humanistes, mais aussi quelques grosses pointures du terrorisme national et international de Daech et consorts, qui font les beaux-tristes jours des Irakiens, des Syriens, des Libyens, des Egyptiens et même des familles tunisiennes nombreuses endeuillées par les actes criminels de l'obscurantisme médiéval armé. Un mot pour la fin. Ennahdha récolte ce qu'elle mérite en termes de patience, d'humilité et de génie tactique. A nous de le reconnaître sportivement, mais ceux et celles qui l'ont remise sur scelle après les élections de décembre 2014, doivent être en ce moment dans leurs petits souliers et comme le dit l'adage populaire : « Elli yaâti Slahou yemout bih » ( Celui qui donne son arme... finit par en mourir » ! C'est triste de passer à côté de l'Histoire, quand celle-ci vous met en position de force et de commandement ! Je vois déjà à l'horizon 2019-2020, quelques « voiliers » (comme les appelle si bien le Cheikh Rached) qui font des appels de détresse à un Ennahdha en pleine puissance pour les secourir, mais celui-ci pourra-t-il les regarder autrement qu'avec le mépris qu'on doit aux « déclassés » qui ont fait leur temps ! C'est la loi implacable de l'Histoire. Qui se rappelle encore parmi les puniques de... Hannibal après Zama... C'était en 202 avant Jésus Christ ! A moins d'une osmose, miraculeuse et toute aussi historique, qui rassemblerait les adversaires d'hier au nom de la raison d'Etat d'aujourd'hui, et de la nécessaire entente nationale, demain. La politique c'est aussi cela... seuls les crédules ne changent pas surtout, quand en face il y a le vide... K.G