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C'est quoi «séparer» le politique de la prédication ?
Publié dans Le Temps le 14 - 02 - 2016

Les Tunisiennes et les Tunisiens de plus en plus avertis et lucides commencent à maîtriser l'art de l'analyse du contenu des discours et autres déclarations «pompeuses» et d'orientation politique stratégique et tactique des partis et des associations dites à « but non lucratif » ou d'intérêt général.
De fait, ce qui est désigné par « la langue de bois » ou la « démagogie » est propre aux techniques de la désinformation, qui existent depuis l'Antiquité.
D'où cette tolérance populaire sur l'art du gouvernement et de la mobilisation politique et même une certaine acceptation de l'hypocrisie sociale à pouvoir dire ce qu'on ne fait pas, ou permettre l'inaccessible et l'irréalisable, pour gagner du temps et contourner les difficultés souvent bien réelles des pays en crise à des époques déterminées.
Quand Ennahdha, à titre d'exemple, parle de « séparer » (je dis bien, séparer) le politique de la prédication, c'est tout simplement une métaphore de grand calibre. Car, ce parti qui fait certainement très attention aux critiques et aux attentes du peuple tunisien et à son attachement à « l'Islam » et non pas à « l'islamisation politique », ne dit pas qu'il renonce à la prédication ! Voilà qui est clair comme l'eau de roche et les différentes déclarations des leaders d'Ennahdha le confirment sans équivoque de manière absolue. Je m'explique. Commençons par M. Mohamed Ben Salem, ancien ministre de l'Agriculture, du temps de la Troïka, où il s'occupait plus de « politique » (ou boulitique) que des périmètres irrigués.
Il ne cesse de défendre les « écoles dites coraniques », alors que les écoles de la République et ses lycées disposent suffisamment d'éducation civique et religieuse islamique, de l'aveu même de cet ancien ministre ! Alors, encore une fois, M. Ben Salem est pris au piège de sa propre démarche qui s'entête à ne pas séparer le politique du religieux au sein d'Ennahdha, malgré les apparences toutes trompeuses d'un éventuel rapprochement avec le modèle de la « démocratie chrétienne en Allemagne et ailleurs ». Je passe, outre la campagne acharnée de dénigrement violent de l'ancien ministre des Affaires religieuses, le Cheikh très courageux, Othmane Battikh, qui a osé (je dis bien, osé, et c'est peu), écarter, justement, les « imams » politisés à l'extrême et la limite du Takfirisme et de la légitimation du Jihad, tout en ramant pour Ennahdha, comme M. Ridha Jaouadi, ainsi que la fermeture des mosquées hors-la-loi, abritant terroristes notoires et même quelques armements, comme du temps où un certain Kamel Zarrouk faisait la loi à Ibn Khaldoun... ! Mais, à l'époque, beaucoup ont juré qu'il n'avait rien avec les jihadistes avant de le retrouver en Syrie, puis en Libye !
M. El Ajmi El Ourimi, plus calme, plus subtil, apaisé et courtois, nous enchante (pour ne pas dire, nous dorlote), avec un discours velouté de main de maître : « Ennahdha s'oriente irréversiblement vers la séparation entre la prédication et la politique ». Admirez en passant le mot magique de « séparation » qui veut dire, tout simplement, qu'on ne fera pas la prédication au sein du parti, mais, dans d'autres structures, type tentes daâwiques, associations caritatives, écoles « coraniques » déguisées et jardins d'enfants, où on doit porter le voile à quatre ans.
Comme au bon vieux temps des prédicateurs « grandes gueules », hors normes, venus d'Orient, comme les Wajdi Ghoneïm et compagnie, reçus par la Tunisie « officieuse » avec les honneurs et les égards dus à des chefs d'Etats, dans cette « Ifriquiya » reconquise, qualifié de « nouveau Fath », par le grandissime cheikh Karadhaoui, lui-même, après la Révolution du Printemps arabe) !
Par conséquent, il faut faire très attention aux « mots » ces mots, comme ceux de la difficulté d'être existentielle de Jean Paul Sartre ou de Raymond Aron, qui peuvent dire la chose et signifier son contraire.
Ce que fait le cheikh Rachid Ghannouchi et quelques uns de ses lieutenants, comme MM. Lotfi Zitoune, Ajmi Lourimi, Samir Dilou, Hammami et même M. Abdellatif El Mekki, souvent perçu comme plus radical est, certainement, très louable et très intéressant, dans la mesure où ils veulent dégager Ennahdha de la tentation hégémonique au nom d'une certaine lecture de la Chariaâ et de l'islamisation politique et en faire un « parti civil national au référentiel islamique », qui ferait de l'Islam la culture du peuple et non l'instrument qui soumet ce même peuple et non l'instrument qui soumet ce même peuple et ses élites au système totalitariste du Wahabisme, ou des milices jihadistes et extrémistes de Daëch et d'El Qaïda. Nous pouvons aussi comprendre le Cheikh Rached Ghannouchi converti au « Bourguibisme », malgré lui, et c'est tant mieux, à travers « la politique des étapes », au vu de la difficulté de changer toute la mouture de ce qui a été fait par le M.T.I (Mouvement Islamique Tunisien), devenu Ennahdha, sur une période qui approche les quarante ans. Mais, il va falloir dire clairement aux Tunisiens que Ennahdha, une fois la reconquête du pouvoir assurée, par cette stratégie de haute voltige, qu'elle ne reviendra en arrière avec tout ce carnaval houleux de la prédication d'Orient et ses conséquences désastreuses et incontrôlables.
Or, la bonne solution est ailleurs. Car, faire ou ne pas faire confiance aux Nahdhaouis éclairés et réformistes, comme ceux précités ou dire qu'ils sont sincères et peut-être, pas sincères, n'arrange rien et n'avance rien.
A mon humble avis, et comme j'ai appris de mes professeurs émérites de science politique, que la politique et le pouvoir sont la résultante du rapport des forces, il faut qu'Ennahdha soit maintenue au moment des élections (toutes les élections) à une distance respectable de la tentation hégémonique. Nous l'avons vu, chaque fois, que le rapport de forces est trop favorable à Ennahdha, elle reprend son bâton de pèlerin et pousse vers l'ascendance et le commandement. Alors, que lorsqu'elle est en minorité ou en difficulté, elle compose mieux et positive sur une participation discrète et utile à faire le consensus comme c'est le cas avec Nida Tounès. Alors, que du temps de la Troïka, c'est elle qui était dominante parce que victorieuse aux élections, à une majorité plus qu'insolente.
J'en arrive à cette conclusion, qu'il faut absolument que les Tunisiens soient conscients de l'enjeu. D'ailleurs, l'exemple de la Turquie « erdoganienne » qui semble être la voie qui inspire le plus nos Nahdhaouis, le prouve. A telle enseigne que M. Erdogan veut mettre la Turquie sur orbite « présidentialiste » plus musclée, car le régime parlementaire a montré ses limites dans la réalisation des ambitions de l'homme fort du Bosphore.
Pour éviter toute dérive nouvelle, prévisible et assurée, Ennahdha doit être maintenue dans sa position actuelle sans plus ni moins. Elle peut aider sûrement à stabiliser la société et le système politique. Elle peut même poser au niveau des choix économiques qui sont appréciés par les classes moyennes et les milieux d'affaires parce que libéraux. Mais, elle sera aussi préservée de ses tentations naturelles à contrôler totalement la société et le pays au nom de l'Islam.
Encore une fois, notre cher Montesquieu : « Seul le pouvoir arrête le pouvoir »... !
Aux Tunisiennes et aux Tunisiens de s'assumer librement et d'assurer l'équilibre des forces et du système le jour « J » , c'est-à-dire, au moment du vote, faute de quoi, nous aurons les gouvernants que nous méritons.
Mais, d'ici là, beaucoup d'eau coulera sur la Medjerda. Car, les forces du contre-pouvoir sont tiraillées entre l'opportunisme, les ambitions personnelles des acteurs et la nécessité de sauver l'arche de Noé de la modernisation d'un naufrage presque entamé.
Les uns s'attachent à des modèles désuets de l'Etat despotique qui remontent au bolchévisme.
Les autres n'arrivent pas à fédérer autour des valeurs immuables et solides du Bourguibisme « Néo-destourien ».
Attendons pour voir si à l'horizon 2019-2020, une formation crédible pourrait à nouveau émerger dans ce paysage politique ouvert à toutes les aventures. Jusque-là, nous l'avons échappé belle avec un équilibre institutionnel mais peu dynamique. L'inscription de la revendication sociale et populaire excessive et hors contrôle, dans la durée, n'annonce rien de bon ! Le pays est dépressif chronique... Vite, un sédatif bien calmant et une grosse cure de responsabilité !
K.G


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