Faut-il avoir peur d'Ennahdha et redouter au plus haut point son retour au pouvoir et au contrôle social identitaire intégral comme au bon vieux temps de la Troïka... ou faut-il prendre sa mainmise « illégitime » sur le Parlement du fait des bourdes de ses adversaires et « nouveaux alliés » de Nida Tounès, avec une certaine philosophie et y voir au moins, un rôle actif dans la stabilisation du système qu'elle a, d'ailleurs, créé de toute pièce et où elle a investi toute la subtilité et le savoir-faire de Rached Ghannouchi, qui est en train de faire des semi-échecs du parti islamiste, des victoires en puissance. Qui aurait pu croire qu'Ennahdha contrôlerait les principales commissions parlementaires stratégiques (je dis bien stratégiques), à l'exception de la sécurité et de la défense au lendemain de sa défaite électorale fin 2014 ? Nos islamistes « modérés » auront, désormais, la haute main sur tout ce qui peut toucher à l'éducation, l'enfance, la femme, sans oublier la mise en application du dédommagement et de la « réintégration » des milliers de leurs cadres bénéficiaires de l'amnistie générale, en grande majorité des « enseignants » écartés par l'ancien régime pour velléités d'appartenance aux mouvements « frères musulmans » de Tunisie. La centrale islamiste a été intelligente de patience (une des vertus cardinales de l'Islam politique) et s'est contentée de laisser faire les adversaires d'hier, et de bâtir sur leurs fautes grossières. Ça me rappelle un peu le football italien, presque jamais en attaque, mais avec une défense digne de César, et puis il suffit d'une erreur de l'adversaire, un contre bien mené et hop... le but (arrêté en italien) et voilà l'Italie en finale de la Coupe du monde, pour la remporter trois fois ! Un des anciens ministres de Bourguiba, puis de Ben Ali qui a été le plus longiligne à différents départements, quand on lui demandait la recette, il répondait avec humour : « Faites-vous oublier, faites-vous voir le moins possible, et surtout ne prétendez pas à l'efficacité ou au génie créateur, ça crée des jaloux et ça conduit au limogeage ! C'est cela la bonne tactique de laisser l'adversaire faire la faute ! Par conséquent, pour nos amis nahdhaouis tout baigne, du fait des erreurs grossières de leurs adversaires. La gauche plurielle, y compris, les syndicats a installé le pays dans la peur de l'instabilité, des conflits sociaux à répétition et à encourager « l'institutionnalisation » de la « Rue » comme premier pouvoir contre l'Etat. Du coup, toute la classe moyenne et la petite bourgeoisie nationale leur a refusé les suffrages pour les donner à Nida Tounès espérant avoir le contrepoids quantitatif et qualitatif aux islamistes, qui voulaient s'approprier l'Etat et en changer le modèle et la culture modernisante. Mais, les « Nidaïstes » ont tout fait pour remettre Ennahdha en scelle et lui donner des moyens de force insoupçonnés au vu de ce que les urnes ont décidé fin 2014. Aujourd'hui, et là, il faut leur en reconnaître le mérite, les islamistes remis à flots, manœuvrent de façon magistrale. Il faut les suivre dans les plateaux TVet sur antennes radios. Ils en ont pour toutes les « clientèles ». Ils assurent et rassurent, tout le monde, y compris leurs « faucons » les plus orthodoxes, qui ne seront pas écartés et éliminés au prochain congrès d'avril 2016, mais auront pour mission : Le sacré, avec tout ce pan entier de l'activité secrète de l'Islam politique : La prédication ou la « Daâwa ». Pour les libéraux éclairés, on prendra toutes les précautions pour crier sur tous les toits que Ennahdha a décidé de « séparer » le politique (civil) du daâwique (religieux) « ! Que veut le peuple ! Y a-t-il démocratie aussi large et aussi généreuse qui en donne à chacun, selon ses besoins et n'exclut personne ! El Hamdou Lellah ! Mon frère et ami M. Samir Dilou, ancien ministre et polémiste hors pair, nous a même annoncé la bonne nouvelle : « Ceux qui espèrent des conflits internes au sein d'Ennahdha comme dans d'autres formations et partis (entendez Nida-Tounès)... se trompent et doivent déchanter » ! Par conséquent, nous sommes rassurés, que «le « réformiste » et « libéral » Cheikh Rached Ghannouchi, sera reconduit (et c'est tant mieux... au moins celui là a de la jugeote pour lire ce qui se passe dans le monde) à la tête de la « Néo-Ennahdha », plus civile et au goût des élites nationales, modernisantes et nos partenaires occidentaux. Pour le reste tout sera sauvegardé les carrés de tête de la « nomenclature », Laârayedh, El Mekki, Bhiri, Jelassi, Dilou, Zitoune, et les Hammami, Ourimi et quelques jeunes loups pour la relève mais pas tout de suite, s'il vous plaît ! Après tout et toujours comme au football : On ne change pas une équipe qui gagne et celle-là, sous la houlette du « Cheikh », est au sommet de ses œuvres et de son savoir-faire ! Tout ce qu'il a planifié passe comme une lettre à la poste ! Tiens, les Nidaïstes qu'on désigne par « leaders devraient se recycler au workshop d'Ennahdha et envoyer quelques stagiaires au futur congrès d'Avril ! Mon Dieu, on aura tout vu avec cette Révolution, qui rit au nez de tous les opportunistes de la nouvelle classe politique, car le tout c'est de savoir attendre. Et Ennahdha, dirigée de main de maître par un Cheikh lucide, patient, amusé et jovial, à la limite de l'humour anglais, est entrain de gagner son pari initial: Prendre le contrôle total du pays mais cette fois, sans contrainte apparente et sans se mettre à dos ses citoyens et ses élites les plus critiques de l'Islam politique. Chapeau ! Quel coaching! Quant à Nida Tounès il n'a que ce qu'il mérite... La chance ne sourit pas aux défaitistes. Tout est à revoir! K.G