Pendant la deuxième quinzaine du Mois Saint, la prestigieuse galerie Saladin, sise à Sidi-Bou Saïd, s'est transformée du 18 juin et jusqu'au 30 juin en un véritable patio culturel où un vivier de talents (peintres, photographes, poètes, cinéastes, musiciens...) se relayeront chaque soir pour animer les veillées ramadanesques par leurs productions culturelles et favoriser ainsi un échange de vues et d'expériences d'une part entre les artistes eux-mêmes et les artistes et le public, d'autre part. Ces soirées ont été inaugurées par le vernissage de l'exposition intitulée « Les Chemins d'Eveil » de Martine Géronimi, alias Tyna, femme talentueuse aux multiples vocations, de nationalité française et canadienne et d'origine tunisienne, étant née à Mégrine. L'exposition comporte une quarantaine de toiles de différents formats et aux couleurs et lumières tunisiennes, peintes avec beaucoup d'inspiration et d'émotion qui racontent la Tunisie retrouvée. Cette exposition est certes la pierre angulaire de cette manifestation culturelle, la première en genre dans une galerie de peinture, mais plusieurs autres activités égayeront les soirées d'un public assoiffé de découvrir des horizons multiculturels, sachant que le programme prévoit la présence, outre des Tunisiens, d'étrangers venus de France, Pologne, Canada, qui viendront parler de leurs pays respectifs. M. Ridha Souabni, maître de céans, nous a chaleureusement accueilli dans sa galerie et nous a expliqué les objectifs de cette initiative : « Pour ces soirées ramadanesques, nous avons comme invitée d'honneur Tyna qui expose ses œuvres artistiques et qui nous présentera son atelier de dessin et le concours destiné aux enfants de Tunisie. Et puis, nous avons invité beaucoup d'artistes de qualité qui vont meubler ces soirées éditées à Sidi Bou Saïd et ses habitants à l'occasion du Mois Saint. Si on passe de la peinture et des arts plastiques vers la culture en général, c'est parce que la Galerie Saladin œuvre depuis sa création à la promotion culturelle en Tunisie, à l'élaboration d'un dialogue culturel entre les créateurs de différentes nationalités ; nous avons donc concocté un programme varié et alléchant qui s'étend jusqu'à la fin du mois et le public aura l'occasion de rencontrer des artistes de tous bords et de discuter avec eux... » Le programme Le programme a démarré le 18 juin à 22h30 par l'inauguration de l'exposition personnelle de Martine Géronimi et se poursuivra avec d'autres activités artistiques et festives groupant une pléiade d'artistes qui, chacun dans son domaine, animera ces soirées. Le dimanche 19 a été destiné à la poésie : c'est l'artiste Abdelmagid El Bekri qui présentera son nouveau recueil en présence de Sadok Gaidy et Mohamed Mehdi Hassen. Le lundi 20 juin, Martine Géronimi, également géographe, a présenté son carnet de route en racontant les voyages qu'elle a réalisés à travers les continents et les expériences qu'elle a vécues en se déplaçant d'une culture à une autre. Aujourd'hui, mardi 21 juin, ce sera une soirée musicale avec « Acoustic Session » d'Abir Khmissi. « Enfants de Tunisie », tel est le titre de la soirée du mercredi 22 juin où se déroulera un concours de dessin sous la direction de Tyna, avec l'invitée de la soirée Dorra Bouzid. Le jeudi 23 juin verra l'intervention de Nejla Ben Messouada autour d'une séance de « sophrologie, voie vers l'éveil », cette méthode thérapeutique utilisée contre la douleur et les troubles psychiques qui repose en particulier sur la relaxation et l'hypnose. Vendredi 24 juin sera la soirée de la photographie, une séance animée par Rahma Megarech qui nous initiera sur les jeux de lumière. Une deuxième causerie littéraire aura lieu le samedi 25 juin avec la femme de Lettres Amina Arfaoui. Le dimanche 26 juin, ce sera la soirée spéciale pour le cinéma avec la projection d'un nombre de courts-métrages et de documentaires, animation de Marwen Trabelsi. « Spécial Pologne » est la séance du lundi 27 juin en présence de son Excellence l'ambassadeur de ce pays en Tunisie. Le mardi 28 juin, la soirée sera dédiée à Sidi Bou Saïd « Royaume des peintres, des poètes et de la mystique ». L e mercredi 29 juin sera consacré spécialement à la ville de Lyon et le dernier jour (30 juin) sera organisée une cérémonie spéciale pour la Fête Nationale du Canada. Hechmi Khalladi Interview : Martine Géromini artiste peintre au «Temps» « Je suis fière de mes origines tunisiennes » Nous avons abordé Martine Géromini le jour du vernissage de sa première exposition à Sidi Bou Saïd qui nous a entretenus sur sa carrière en général et sa vocation artistique en particulier. Le Temps : Quel est le message que vous souhaitez transmettre à travers « Les Chemins d'Eveil » que vous organisez pour la première fois en Tunisie ? Martine Géromini : Il s'agit de montrer un univers culturel typiquement de Sidi Bou Saïd avec à la fois faire connaissance de mes voyages, du fait que je suis géographe et ethnologue. Je suis également rédactrice en chef de la revue Maison de Tunisie depuis cinq ans, et je voudrais montrer que la culture est un tout qui s'adresse à tous dans tous les domaines de la création (peinture, poésie, cinéma, musique...). Mon objectif consiste aussi à faire découvrir les jeunes talents parmi les enfants avec qui je partage des ateliers de dessin en Tunisie. Artiste-peintre, géographe, ethnologue et poétesse, vous touchez à la fois à plusieurs disciplines. Quels rapports y trouvez-vous ? Oui, je suis géographe de formation, mais je suis également peintre et j'écris aussi de la poésie. J'aimerais partager mes passions avec le public. Ces rencontres que nous effectuons ici est un mélange de tout cela. Il y aura de la peinture, de la poésie, de la musique... Tout cela constitue un parcours culturel qu'on va partager au cours de ces soirées avec les gens de Sidi Bou Saïd Vous êtes donc franco-canadienne de naissance tunisienne. Cependant, vous éprouvez un certain attachement pour la Tunisie, même après une longue absence? En fait, je suis née en Tunisie, exactement à Mégrine, ce que la plupart des Tunisiens ne savent pas, et je suis fière de mes origines tunisiennes. Je suis revenue après quarante ans en Tunisie après avoir sillonné le monde, ce pays que je retrouve toujours plein de couleurs et de lumières. Je le sens comme ma terre, je ne sais pas au juste, mais cela exerce sur moi un attrait particulier pour ce pays merveilleux. Et puis il ya la part des souvenirs, de la mémoire et de l'identité. Vous remarquerez cela à travers les titres de mes toiles. Parlons un peu de votre exposition. Je vois que vous adoptez un mélange entre le figuratif et l'abstrait. Pourquoi ce choix ? Oui, c'est vrai. Au Canada, je travaillais beaucoup sur l'huile et les pigments, donc c'était de l'abstraction. Quand je suis venue ici, les visages, m'ont interpellée, donc je les ai peints, mais toujours avec cette touche abstraite. Et puis, je ne travaillais pas avec les mêmes couleurs quand j'étais à l'extérieur de Tunisie. Ici, je n'ai pas pu échapper à l'attraction des lumières et des couleurs : les bougainvilliers de Sidi Bou Saïd sont formidables !