Peut-on parler de racisme en Tunisie? Théoriquement le racisme ne devrait pas exister en Tunisie, ne serait-ce que parce que l'Islam, religion pratiquée dans ce pays depuis l'année 695 date à laquelle le général musulman vainquit la Kahéna. La discrimination entre tous les humains est expressément dénoncée par le Coran, le Livre Saint révélé par l'intermédiaire de Mohamed. Ce Prophète, élu de Dieu essentiellement grâce à son esprit de Justice et d'équité, avait commencé dès qu'il fit asseoir les bases de la religion à la Mecque après son retour de la Hijra, par délivrer Bilal, de l'esclavage, en offrant à son maître Omaya, un richissime mecquois la contrepartie de son affranchissement. Bilal a été chargé par Mohamed de l'appel à la prière à la première mosquée érigée à la Mecque. Cependant la xénophobie à l'égard des noirs persista, sa première cause étant l'esclavage, qui n'a été aboli qu'en 1841 sous Ahmed Bey. Mais la mentalité discriminatoire s'est perpétuée de génération en génération, à travers les us et coutumes, qui restent jusqu'à nos jours perceptibles à travers le langage et le comportement d'une manière générale. En effet il y a encore de nos jours ceux qui spontanément et sans même éprouver de haine à l'égard des noirs, restent réticents au mariage entre une noire et un blanc ou réciproquement. Dans le langage courant, le terme désignant encore le noir par « Oucif » mot d'origine arabe « Wassif » signifie celui qui est au service de quelqu'un d'autre. A part, cela il n'existe pas, à vrai dire d'animosité particulière à l'égard des noirs, mais il y a quand même une certaine discrimination occultée par des discours ou des comportements plus ou moins hypocrites. Regardez dans les médias ; il n'y a presque pas de noirs parmi les présentateurs de chaînes télévisées. Il en va de même en matière de publicité où on fait intervenir peu de noirs. Dans certains domaines, tels que les professions libérales on commence à voir des noirs, parmi les avocats ou les médecins. Mais dans les recrutements, les chefs d'entreprises sont plutôt réticents à engager des employés noirs de peau. Ces comportements hypocrites doivent être combattus, car ils constituent en eux-mêmes une atteinte aux droits et aux libertés. Nouveau projet de loi C'est la raison pour laquelle les élus de l'ARP ont cru indispensable de réagir d'une manière légale. Le 12 juillets ils ont officiellement déposé le projet de loi contre les discriminations raciales qui leur a été proposé par le FTDES et EuroMed Droits, et le CRLDHT. Ce projet de loi, qui est composé de 36 articles, vise à installer, conformément à la Constitution tunisienne et aux conventions internationales, d'une part un cadre juridique protégeant toutes les victimes de discrimination raciale, mais également à criminaliser toute pratique discriminatoire afin de mettre un terme à l'impunité dont jouit toute personne ayant perpétré des actes ou propos discriminatoires. Conformément à l'article 62 de la Constitution tunisienne « « L'initiative législative est exercée par des propositions de loi émanant de dix députés au moins». Quatorze élus, des différentes tendances politiques à l'ARP, ont soutenu l'initiative émanant des efforts de la société civile et ont signé le projet de loi. C'est une loi conforme à la voie suivie par la Tunisie dans le domaine de la protection des citoyens, abstraction faite de leur race , leur ethnie ou leur couleur, et ce depuis l'abolition de l'esclavage dont elle a été la pionnière en 1841.