Le milieu des affaires ne cesse de se détériorer en Tunisie, affectant énormément la compétitivité de l'entreprise, et décourageant toute volonté d'investir. Plusieurs éléments interviennent dans cette situation : le climat politique, l'insécurité, les mouvements sociaux,...Une récente enquête réalisée récemment par l'Institut de Compétitivité et des Etudes Quantitatives auprès des chefs d'entreprises vient confirmer certaines idées, mais aussi affirmer d'autres plus graves comme celle de la corruption et des problèmes fiscaux et douaniers. Au niveau des rapports internationaux, spécialement ceux du Forum Economique de Davos, la Tunisie a concédé beaucoup de places et ne cesse de régresser. En effet, on est passé de la 32ème place en 2008 à la 83ème place selon le rapport publié en Septembre 2013. La Tunisie a été déjà évincée du classement en 2012 à cause d'absence de données. Le milieu des affaires n'est plus propice et la Tunisie a perdu ses anciens atouts, à savoir la sécurité, la stabilité et la clarté de la vision. L'Institut Tunisien de la Compétitivité et des Etudes Quantitatives réalise chaque année une enquête auprès des chefs d'entreprises sur leur perception du milieu des affaires. Pour 2013, l'ITCEQ a réalisé durant la période de Mai à Juin 2013 une enquête auprès de 1150 chefs d'entreprises, et les résultats viennent d'être publiés. Selon l'enquête l'indice synthétique sur la perception du climat des affaires s'est situé à 0.635 (plus on se rapproche de 1, plus le climat des affaires est favorable). L'indice réalise ainsi une légère amélioration par rapport à 2012 ou il était de 0.625. En 2013, l'insécurité, le financement bancaire et la fiscalité et charges sociales sont les facteurs les plus défavorablement perçus. Les éléments les plus jugés favorablement par les chefs d'entreprises sont l'infrastructure et les ressources humaines. Au niveau de l'insécurité L'insécurité demeure le problème le plus épineux cité par les hommes d'affaires comme entrave au climat des affaires. Cet élément est considérée comme une contrainte majeure par 44% des chefs d'entreprise, et il figure parmi les 3 contraintes les plus sévères selon 37% des enquêtés. Parmi les entreprises qui n'ont pas réalisé des investissements au cours des deux dernières années, 47% l'expliquent par l'insécurité. 7% des interrogés ont déclaré qu'ils ont suspendu leur activité au cours du 1er semestre 2013 à cause de l'insécurité. Le financement bancaire Plusieurs entreprises critiquent longuement l'accès au financement bancaire, ainsi que les procédures administratives longues et contraignantes qui gèrent cet élément. En effet, le financement bancaire figure parmi les 3 contraintes les plus sévères pour 24% des enquêtés. Continue à être considéré comme une contrainte majeure par 31% des chefs d'entreprise. Les éléments les plus cités par les chefs d'entreprises au niveau de ce paramètre sont principalement le taux d'intérêt (73%), les garanties exigés (58%), délais d'obtention des crédits (28%). Les critères qui donnent un satisfécit pour les chefs d'entreprises sont surtout le rééchelonnement des crédits et la proximité des services bancaires. Ceci est vrai à la lumière du réseau d'agences bancaires qui s'est développé depuis des années et a intégré même les zones les plus éloignées. Au niveau du rééchelonnement, certaines banques se trouvent obligées de le faire afin de garantir un paiement. Fiscalité et charges sociales Ce facteur renferme toutes les charges supportées par les entreprises en matière de taxes, impôts et cotisations patronales. 27% classent la fiscalité dans les 3 contraintes les plus sévères au développement de leur entreprise. La fiscalité est considérée non satisfaisante à plus d'un titre tel que le niveau de l'impôt sur les sociétés, au niveau de la TVA, la stabilité des textes règlementaires. Les chefs d'entreprises dénoncent une multiplicité des impôts et taxes, une complexité du système. Ils considèrent que le système fiscal actuel ne favorisant pas l'équité et encourageant l'évasion fiscale. Selon les chefs d'entreprise, la réforme fiscale devrait cibler la simplification des procédures, la baisse des taux, l'équité et la transparence. La majorité des enquêtés (80%) se partage l'idée qu'une baisse du taux de l'IS élargirait l'assiette d'imposition. La moyenne des taux d'imposition proposés par les chefs d'entreprise s'élève à 18% sachant que 20% est le taux le plus fréquemment mentionné La corruption 82% trouvent que le phénomène de la corruption s'est maintenu voire même s'est accentué après la révolution. 24% des entreprises dénoncent la corruption comme contrainte majeure à leur développement. Selon la perception des hommes d'affaires la douane tunisienne reste la structure la plus corrompue, suivie des services publics, les inspections et contrôle ainsi que les marchés publics. Les hommes d'affaires considèrent que le service auxquelles sont toujours à payer informellement (rachoua), sont surtout au niveau des autorisations de construction, les connexions au réseau d'assainissement, et au niveau du contrôle de la sécurité des bâtiments. Des domaines sensibles auxquels l'aléatoire joue énormément, et il suffit parfois de payer certains agents pour faciliter toutes les autorisations. Globalement la perception du cadre macro-économique et réglementaire par les hommes d'affaires a connu une dégradation dénotant une plus grande instabilité. Un milieu des affaires qui impacte l'activité économique : Selon la même enquête, qui est riche en enseignements, Près d'une entreprise sur quatre a suspendu son activité au cours du 1er semestre 2013 pour une durée moyenne de 29 jours et ce pour diverses raisons diverses tel que la grève, un problème d'approvisionnement, une demande insuffisante ou à cause de l'insécurité. Selon les hommes d'affaires, la stabilité politique économique et sociale est le principal handicap qui ralentit leur volonté d'investir. Ce climat défavorable a eu aussi un impact sur les projets futurs et les perspectives de développement des entreprises tunisiennes. En effet, dans un environnement caractérisé par une instabilité politique, économique et sécuritaire, les entreprises n'arrivent pas à faire des prévisions pour l'année 2014. C'est pour cette raison que plusieurs entreprises sont réticentes en matière de projets de recrutements et aussi d'investissement. Les hommes d'affaires sont les personnes les plus adaptées à notre sens, à donner des solutions pour l'amélioration du milieu des affaires. Pour eux il faut : Le développement des services administratifs et structure d'appui L'Instauration / l'amélioration de l'infrastructure de base La révision et suivi du dispositif d'incitations accordées par les pouvoirs publics, et à ce niveau le projet du nouveau code d'investissement répond à cette aspiration. La mise en valeur des richesses de chaque région, une option qui reste inscrite seulement dans les discours des différents ministres sans vraiment trouver de projets concrets. Cette enquête témoigne de l'état du milieu des affaires en Tunisie, et sonne un cri d'alarme pour les pouvoirs publics, qui sont jusqu'à présent muets et incapables de faire bouger les choses.