Le chef du gouvernement Hichem Mechichi a ordonné aux forces de sécurité d'intervenir « immédiatement » pour faire démarrer les sites de production et débloquer les routes. Et ce, après une série de mobilisations sociales à travers le pays. Il y avait urgence. Face au chienlit qui risque de faire tache d'huile dans l'ensemble du pays, le chef du gouvernement Hichem Mechichi, d'habitude calme et pondéré, a fini par hausser le ton et ordonner l'application immédiate de la loi afin de ré-ouvrir les routes bloquées et redémarrer les sites de production en arrêt. « Instaurer la primauté du droit » « La fermeture des sites de production a rendu difficile le ravitaillement des citoyens en produits de base et a affecté leurs intérêts vitaux ainsi que leur sécurité et la sécurité nationale du pays ». A-t-il fait observer. En conséquence : « Une action immédiate s'impose pour instaurer la primauté du droit et agir en coordination avec le ministère public pour rouvrir les routes bloquées et relancer les sites de production ». A martelé Hichem Mechichi hier mercredi lors d'une séance de travail à la Kasbah consacrée à l'examen de la situation sécuritaire dans le pays. Et ce, en présence des ministres de la Défense nationale, de la Justice et de l'Intérieur. Retour de l'autorité de l'Etat ? S'agit-il d'un certain retour tant attendu et espéré de l'Etat dans la chose publique ? Une fois n'est pas coutume, Mechichi a été cette fois soutenu par le président de la République, Kaïs Saïed. Lequel a souligné, lors de son entretien, hier mercredi, au Palais de Carthage, avec le chef du gouvernement, la nécessité de préserver l'unité et la pérennité de l'Etat et d'assurer la continuité des services vitaux. Brillant par son silence assourdissant en ces temps de gros nuages sur le pays, le Chef de l'Etat a tenu à rappeler qu'il reste maître à bord : « Que tout le monde sache que le siège du président n'est pas vacant », a-t-il rappelé. Revenant sur les violences ayant secoué plusieurs gouvernorats du pays, le Président a fustigé « Les tentatives d'intimidations visant l'Etat. Nous ne laisserons pas les Tunisiens en proie à des forces qui essayent de contrôler l'Etat. La Tunisie est un seul Etat qui affrontera ces criminels appartenant à des gangs. Des gangs que l'on trouve même à l'étranger », a-t-il encore déclaré. Tabboubi : non au régionalisme Pour rappel, le SG de l'UGTT, Noureddine Taboubi, s'est exprimé au sujet des contestations sociales samedi 28 novembre 2020 pour assurer que la centrale syndicale appuyait les revendications sociales « légitimes » mais « ne tolèrerait pas l'arrêt ou la perturbation de la production ». Le responsable syndical a appelé à cette occasion à éviter les incitations à la haine et le régionalisme. « Des comités régionaux avaient été planifiés et leurs discours laissaient entendre qu'ils sont appuyés par des partis politiques ». Avait-il argué dans un communiqué publié sur la page FB de l'UGTT. Faudra-t-il rappeler dans ce contexte que sous prétexte de revendications somme toute légitimes de développement et d'emploi, certains protestataires ont eu recours à la violence ayant conduit à la fermeture de plusieurs sites de production de gaz à Gabès et entrainé des pénuries de bouteilles de gaz notamment à Sfax, capitale économique du Sud tunisien. De même, lors des travaux de l'ARP consacrés à l'examen du projet de loi de Finances 2021, de plus en plus de voix se sont élevées pour déplorer « les mains tremblantes » de l'Etat devant les agissements des protestataires. Appelant à l'application stricte de la loi à l'encontre de ceux qui bloquent les sites vitaux de production d'énergie ou de ressources naturelles. Enormes enjeux Mais c'est l'information d'une éventuelle entame d'un sit-in dans la station de pompage de la société SERGAZ, située à la délégation de Mejel Bel Abes (gouvernorat de Kasserine) qui a été la goutte qui a fait déborder le vase. En effet, la société italienne Sergaz est responsable du transport du gaz algérien vers l'Italie et d'autres pays européens dont la France. Or, la Tunisie perçoit une importante redevance sur le gaz algérien qui s'achemine à Sicile par pipeline sur une longueur de 370 km sur notre territoire. D'où les craintes justifiées en Algérie, ainsi que dans les pays européens qui importent le gaz de ce pays, quant aux répercussions catastrophiques d'un éventuel blocage du passage du gaz dans cette station. Et c'est probablement face à ces énormes enjeux pour la Tunisie, que le gouvernement de Hichem Mechichi a décidé de pousser un coup de colère et de recourir à la force de loi, si c'est nécessaire, pour protéger les sites énergétiques. Il en va de nos intérêts vitaux sur le plan national et international. *