Les enchères organisées en fin de semaine dernière par le gouvernement irakien pour l'attribution de plusieurs champs et gisements ont nettement dépassé le cadre national irakien pour constituer un événement international tant l'opération est d'envergure, les enjeux de taille et les intérêts de dimension planétaire. Le pétrole irakien s'est avéré capable de servir toutes les grandes compagnies pétrolières du monde et les satisfaire, même à des degrés différents. En effet, si certains ténors se sont taillé la part de lion en devenant chacun un opérateur d'un énorme champ pétrolifère, comme c'est le cas pour Exxon Mobil, British Petroleum, Shell ou l'italien ENI, d'autres, comme Total ou Chevron, n'ont pas été oubliés même à un degré moindre. Russes, Chinois, Malaisiens, Norvégiens d'un côté et Américains, Français, Italiens et Anglais d'un autre côté se sont donnés à fond pour ne pas rater l'occasion, pour certains, ou pour ne pas sortir bredouilles, pour d'autres. Les enjeux sont astronomiques et de tailles gigantesques pour ce pétrole irakien qui coulera à flots dans les quelques années à venir et qui procurera à l'Etat irakien des revenus se chiffrant à des milliards de dollars et qui ferait du pays, à l'horizon de 2020, le premier producteur au monde avec une production estimée à 12 millions de barils par jour. Ceci serait d'autant plus vrai qu'il en reste encore 50 champs pétrolifères à concéder dans l'avenir. Le potentiel est vraisemblablement immense et quasiment sans limites. Mais comme il s'agit d'une source d'énergie non renouvelable, la prudence et l'exploitation rationnelle seront de mise.
Le futur n° 1 mondial Actuellement, l'Irak extrait de son sous-sol quelque 2,5 millions de barils/jour (mbj). C'est déjà beaucoup eu égard aux difficultés monstres que vit le pays sur tous les plans notamment sur le terrain de l'ordre et de la sécurité. C'est vrai que cela est nettement au-dessous des potentialités réelles ou supposées que détient le pays. C'est vrai aussi que l'Irak n'est, en 2009, que le 11ème producteur de pétrole, mais la prochaine décennie sera déterminante. Grâce aux récents accords et les derniers appels d'offres du dernier week-end, l'Irak va tout simplement produire plus de 4,5 millions de barils/jour en plus des 2,5 actuels. Cela permettra à l'Irak d'entrer de plain-pied dans la cour des grands du pétrole. Des projections fiables et objectives situeraient la production totale de l'Irak en pétrole à 12 millions de barils/jour à partir de 2016, ce qui propulsera le pays au rang de premier producteur mondial devant des géants comme l'Arabie Saoudite et la Russie.
La cagnotte à plein dollars! En quelques mois, l'Irak vient de réaliser la plus grande et la plus importante opération économique et financière en matière d'exploitation et d'extraction du pétrole depuis la nationalisation du secteur, il y a 37 ans. Cette même opération, par son ampleur et son impact, aura des conséquences positives sur les revenus pétroliers de l'Irak qui seront quadruplés ou presque dans l'immédiat pour atteindre près de 500 millions de dollars par jour! Cette manne du sous-sol ne sera que bienvenue et bien applaudie par une population avide d'infrastructures et d'emplois, en panne d'eau et d'électricité, en manque de conditions de vie décente. Cette manne vient à point nommé pour améliorer nettement les recettes de l'Etat qui demeurent quasi totalement tributaires du pétrole, et augmenter ainsi le revenu moyen par habitant qui est actuellement limité à 4.000 dollars. Le potentiel pétrolier irakien est certes immense. Le pays regorge de la 3ème réserve de pétrole de la planète et possède même des zones inexplorées notamment à l'Ouest. Par ailleurs, une montée aussi vertigineuse de la production irakienne en pétrole dans les proportions précitées, aura ses conséquences sur les prix, ce qui sera de nature à «chambouler» les cours des marchés mondiaux qui, faut-il le souligner, continuent à dépendre, dans une grande mesure, de la capacité d'un autre géant de la production pétrolière qu'est l'Arabie Saoudite qui a toujours su agir et adapter sa production à la demande mondiale.
L'optimisme modéré Nombreux spécialistes et analystes du pétrole, de l'économie et de la finance considèrent que ce fameux «Appel d'offres» irakien n'a pas d'équivalent dans toute l'histoire du secteur pétrolier d'une part, et constituera un début de changement radical pour le futur de l'Irak d'autre part. L'analyste consultant Alex Munton le confirme. Mais la partie « est loin d'être gagnée et les obstacles sont encore nombreux avant que l'Irak puisse tirer profit de l'irruption des investisseurs étrangers. Il faudra investir près de 50 milliards de dollars dans l'infrastructure endommagée par des guerres successives, dans la modernisation des installations pétrolières, notamment du réseau de pipelines, résoudre la pénurie de travailleurs irakiens qualifiés, acheminer des milliers de tonnes de ciment et d'acier, rétablir la sécurité et empêcher le pétrole de… s'évaporer dans le commerce de la contrebande…». L'Irak a peut-être toutes les chances de gagner son pari malgré la multitude de difficultés objectives. Faut-il le laisser souverain et ne pas lui en créer d'autres, préméditées et arrangées cette fois?