La conjoncture internationale actuelle ne permet pas de naviguer à vue. Les différents bouleversements de l'économie internationale, ainsi que l'imprévisibilité des changements, imposent des révisions continues des objectifs de développement et des politiques économiques. En Tunisie, on vient de finaliser un nouveau plan de développement, appelé « plan glissant », et qui est venu faire la liaison entre le 11ème et le 12ème plan de développement et apporter des révisions dans certains objectifs et orientations. Ce plan vient d'être présenté devant le conseil supérieur au développement. La Tunisie poursuit toujours des objectifs de croissance, de plein emploi, de maîtrise de l'inflation, et un solde positif de la balance des transactions courantes. Ces quatre objectifs représentent le carré magique de l'économiste hongrois Nicholas Kaldor. Ce carré est qualifié de magique car l'expérience prouve qu'il est très difficile d'atteindre simultanément les quatre objectifs. Le carré magique : Dans le domaine des politiques économiques on retrouve deux stratégies, celle de la politique économique structurelle et qui se base sur des orientations de long terme, et qui touche les fondamentaux de l'économie, et une politique économique conjoncturelle, qui cherche à remédier à une conjoncture à travers la politique monétaire et la politique budgétaire.
Le carré magique intervient surtout au niveau de la politique économique conjoncturelle. Il est une représentation graphique imaginée par l'économiste hongrois Kaldor, né au début du siècle dernier et disciple de Hayek, résumant la situation conjoncturelle d'un pays à partir de quatre indicateurs : le taux de croissance du PIB, le taux d'inflation (ou taux de croissance des prix à la consommation), le solde de la balance des transactions courantes (en % du PIB). Ces quatre indicateurs, dont la représentation graphique constitue les quatre côtés d'un carré, correspondent à quatre objectifs fondamentaux de la politique économique conjoncturelle : la croissance, le plein emploi de la main d'œuvre, la stabilité des prix et l'équilibre des échanges extérieurs
Le carré magique de la Tunisie : Les objectifs du carré magique de Kaldor sont les objectifs poursuivis par la Tunisie, et qu'elle réussit depuis des années à les atteindre mais à des niveaux différents. Le carré complet n'est pas tout à fait atteint, mais on fait de notre mieux. Au niveau du premier axe du carré à savoir la croissance du PIB, la Tunisie a réussi à enregistrer des performances saluées par les institutions financières internationales. En effet, malgré la crise financière de Septembre 2008, et la crise économique, on a réussi à enregistrer un taux de croissance positif de 3.1% contre 4.5% en 2008. Durant les trois dernières années on a enregistré un taux moyen de croissance du PIB de 4.5%.
Croissance du PIB (%)
2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 PIB au prix constant 1.7 5.6 6 4,2 5 ,7 6 ,3 4,5 3,1 4 ,6 PIB au prix courant 4 ,1 7 ,6 8,8 6,2 8,3 8,7 10,9 6,3 8,1
Concernant le taux d'inflation, la Tunisie a réussi à le maîtriser à des niveaux acceptables, et comparables à ceux enregistrés chez nos principaux partenaires commerciaux (3%), et surtout à des niveaux qui nous permettent une meilleure compétitivité. La réussite au niveau de cet axe est venue même avec la pression de la volatilité des prix des principales matières premières et alimentaires et spécialement le blé et l'hydrocarbure. On se rappelle qu'en 2008, l'économie tunisienne a souffert de l'inflation importée causée par un baril de pétrole qui a dépassé les 140 dollars au mois de Juillet, et des cours du blé et de l'huile qui ont atteint des paliers historiques. Evolution de l'inflation (%) Année 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 Inflation (%) 2 2.7 2.7 3.6 1.7 4.5 3.1 5 3.7
La Tunisie poursuit toujours l'objectif du plein emploi. C'est même une priorité absolue du programme présidentiel, et l'objectif de toutes les interventions publiques. Le problème le plus épineux reste toujours le chômage des diplômés du supérieur qui a atteint des niveaux importants. L'objectif pour le prochain quinquennat est de ramener le taux de chômage des diplômés au niveau de 13,6% en 2014 contre 21,7% en 2009. Concernant le taux de chômage global qui est de 13.3% actuellement, on tend à le faire baisser jusqu'à 11.6% en 2014.
Concernant le quatrième objectif du carré magique, à savoir le solde des transactions courantes en pourcentage du PIB ; il est toujours déficitaire. Le déficit de la balance des paiements était de 4.3% du PIB en 2008 et il est descendu à 3% en 2009. En 2008, et malgré une conjoncture internationale défavorable, la balance générale des paiements a dégagé un excédent appréciable de 2.053 Millions de dinars contre 883 Millions de dinars en 2007, attribuable à l'augmentation considérable des entrées nettes de capitaux, notamment, sous forme d'investissements directs étrangers.
Déterminer les paramètres et les outils de la politique économique, dans chaque pays aujourd'hui, revient à naviguer dans une eau trouble. Il faut s'armer de patience, des outils de navigation solide, bien motiver l'équipage, et ne pas se trouver dans la situation de « colmater les brèches ». Tout ça est à prendre au sens figuré. En tout cas, on Tunisie, on a appris à ramer contre vents et marées, et nous comptons sur la solidité de notre bateau, et la clairvoyance de notre « capitaine ».