L'économiste Ridha Chkoundali a réagi, mercredi 9 juillet 2025, à l'annonce de l'instauration d'un nouveau droit de douane de 25 % imposé par Donald Trump sur les produits tunisiens. Dans une publication sur Facebook, M. Chkoundali a expliqué que cette décision s'inscrit, selon lui, dans la logique de l'administration Trump et son mot d'ordre « America First », qui vise à éliminer ce qu'elle considère comme des pratiques commerciales déloyales. Dans ce contexte, les Etats-Unis ont ciblé plusieurs pays, en particulier ceux jugés trop proches de la Chine ou du bloc économique des Brics. À ce titre, la Tunisie semble avoir été pénalisée pour sa proximité croissante avec l'Algérie, qui a officiellement déposé sa candidature pour intégrer les Brics, selon M. Chkoundali. Ridha Chkoundali a ensuite précisé que ce positionnement géopolitique n'a pas été sans conséquences sur la perception américaine. Il a rappelé qu'au cours des cinq premiers mois de 2025, la Tunisie a enregistré un déficit commercial de 8,5 milliards de dinars avec les pays des Brics, un chiffre supérieur au déficit commercial global du pays. Si l'on y ajoute les échanges avec les pays partenaires des Brics, comme la Turquie et l'Algérie, le déficit atteint 11,3 milliards de dinars. Ce déséquilibre structurel, selon l'économiste, a pu renforcer l'argument américain d'un avantage commercial indu en faveur du bloc concurrent. Mais au-delà des considérations économiques, M. Chkoundali a souligné que des éléments politiques ont également pu peser dans cette décision. Il a mis en avant le soutien explicite de la Tunisie à la cause palestinienne et l'élan symbolique qu'a représenté le départ de la « caravane Al-Soumoud » vers les territoires occupés. Pour lui, Washington a pu utiliser la taxation douanière comme un levier de pression politique dans le cadre de son projet du « Nouveau Moyen-Orient ». Sur le plan commercial, en 2024, la Tunisie a exporté pour 2 milliards de dinars vers les Etats-Unis, soit environ 3,2 % de ses exportations totales, contre 1,8 milliard d'importations, générant un excédent commercial de 216 millions de dinars. Ces exportations ont même dépassé celles vers l'Algérie (1,7 milliard). À titre de comparaison, les échanges avec l'Europe ont atteint 43 milliards à l'export et 35 milliards à l'import, avec un excédent de 8 milliards. Sur les cinq premiers mois de 2025, les exportations vers les Etats-Unis se sont élevées à 869 millions de dinars, un niveau toujours modeste mais comparable à celui vers l'Algérie (834 millions). Bien que les effets immédiats d'une hausse des taxes américaines semblent limités, cette décision pourrait néanmoins affecter les équilibres extérieurs de la Tunisie et les réserves en devises, dans un contexte économique déjà fragile. Ridha Chkoundali a mis en garde contre une potentielle fuite des investisseurs, notamment dans le secteur du textile, au profit de pays plus épargnés, comme le Maroc, frappé d'une taxe plus modérée de 10 %. Enfin, l'expert a appelé à profiter de cette conjoncture pour réévaluer la politique de commerce extérieur de la Tunisie. Il a plaidé pour une révision des accords internationaux existants, qu'ils concernent les Etats-Unis, l'Union européenne, la Turquie ou la Chine. Il a aussi insisté sur la nécessité d'améliorer le climat des affaires, d'accélérer la mise en œuvre des réformes annoncées et, dans l'immédiat, de soutenir les filières stratégiques comme les dattes et l'huile d'olive, soit par la recherche de nouveaux débouchés, soit par une prise en charge temporaire des droits de douane par l'Etat.