Au Népal, une décision de bloquer 26 plateformes de réseaux sociaux a déclenché, début septembre, un vaste mouvement de contestation porté par la jeunesse. En l'espace de 48 heures, le pays a connu des affrontements meurtriers, l'incendie de bâtiments officiels, la levée précipitée du blocage... puis la démission du Premier ministre K.P. Sharma Oli. Retour sur une séquence éclair qui a bouleversé Katmandou. Ce qui a mis le feu aux poudres Le gouvernement a exigé l'enregistrement local des grandes plateformes et a ordonné leur blocage faute de conformité. La mesure a touché notamment Facebook, Instagram, YouTube, X, WhatsApp, LinkedIn et d'autres services, totalisant 26 applications. Dans un contexte de ras-le-bol contre la corruption et le népotisme, des vidéos virales dénonçant le train de vie de "fils et filles de" ont servi de catalyseur. Le mot d'ordre d'une génération connectée — la "Gen Z" — est vite devenu : liberté d'expression, transparence, justice. Le 8 septembre, les manifestations ont dégénéré. Les forces de l'ordre ont tiré pour disperser la foule ; le bilan provisoire a fait état d'au moins 19 morts et de centaines de blessés. Des édifices publics ont été pris pour cibles. Le complexe gouvernemental de Singha Durbar, qui abrite le bureau du Premier ministre, a été incendié. Un couvre-feu a été décrété et l'armée déployée dans la capitale, tandis que l'aéroport international poursuivait ses opérations sous restrictions. Marge arrière sur les réseaux... trop tard Face à l'onde de choc, l'exécutif a levé le blocage des plateformes dès le 9 septembre. La décision n'a toutefois pas apaisé la colère : pour les manifestants, l'interdiction avait symbolisé une tentative de muselement des critiques en ligne alors que les scandales de corruption et la crise économique minent le pays. Choc politique : la démission d'Oli et une transition à définir Sous la pression de la rue, le Premier ministre K.P. Sharma Oli a démissionné le 9 septembre. Les discussions se sont ouvertes pour une transition politique et la nomination d'une cheffe ou d'un chef de gouvernement intérimaire. Parmi les noms cités figure l'ancienne cheffe de la Cour suprême Sushila Karki, proposée par des représentants du mouvement. Au 11 septembre, le bilan humain s'alourdissait — jusqu'à 30 morts selon des sources concordantes — et plus de 1 000 blessés étaient recensés, tandis que des ordres prohibitifs (restrictions de déplacement) restaient en vigueur à Katmandou. Et maintenant ? La séquence a mis en lumière le pouvoir de mobilisation d'une jeunesse connectée et la fragilité des contre-pouvoirs lorsque la régulation du numérique vire à la censure. La transition politique jouera une partie décisive : apaiser les tensions, enquêter sur l'usage de la force, garantir les libertés publiques, et engager des réformes anticorruption crédibles. À défaut, la défiance pourrait perdurer — en ligne comme dans la rue. Commentaires Que se passe-t-il en Tunisie? Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!