L'idiot du village n'est pas celui qu'on croit ou celui qui s'en autoproclame, croupissant derrière les barreaux suite à une cabale judiciaire des plus abjectes. Victime, jusqu'à l'écœurement, de l'acharnement de l'appareil de justice, Sami Fehri ne peut se parer de cette tare pour avoir cru à la neutralité et l'impartialité d'un système dont l'instrumentalisation et la mise au pas ne sont plus à démontrer. L'idiot est certainement de l'autre côté, esprit chagrin coincé dans ses engrenages partisans et ses calculs d'épicier. A se demander qui est le véritable prisonnier ? Celui qui est indument écroué et qui nourrit un idéal de justice ou celui qui végète dans son bagne idéologique et politique et qui manipule l'appareil de justice sur commande et à la tête du client. Qui est vraiment le prisonnier ? Il n'est pas question ici de défendre, vaille que vaille, Sami Fehri ou de l'innocenter, il appartient à la justice de se prononcer. Sami Fehri se doit de répondre de ses actes et d'en assumer les conséquences. Il s'agit avant tout de défendre une idée de la justice, de s'élever contre l'iniquité dans un douloureux contexte où la justice tunisienne bat de l'aile, perd pied, prête le flanc et défraie la chronique. Si on parle de « grande muette » pour désigner l'institution militaire, on est en droit d'utiliser le sobriquet de « grande sourde » pour affubler l'appareil de justice tunisien. La « grande aveugle » n'est autre que le pouvoir exécutif, cette taupe bicéphale dont la myopie n'a d'égale que la médiocrité. Dans la foulée, il n'est pas interdit de qualifier l'ANC de « grande absente », cette classe de cancres, de mauvais élèves plus prompts à faire l'école buissonnière qu'à se pencher sur les cas d'école. L'histoire enseigne que l'inféodation politique des fonctions régaliennes de l'Etat, notamment la justice, entre autres piliers, est le principal sac de pierres pour paver la route de la dictature. La soumission de l'appareil de sécurité en étant le ciment. La Tunisie est-elle dans cette configuration ? On le craint certes, mais le paysage national, à ce titre, en suinte grandement les hideux relents. Le premier pas sur le chemin du despotisme est malheureusement franchi. Peut-on parler d'Etat de droit quand la justice est à géométrie variable et à multiples et non moins inégales vitesses ? Peut-on parler de justice neutre et indépendante quand son appareil protège des groupes connus pour leur violence en y allant de main en cas de procès morte alors que, pour d'autres affaires dont la gravité est sans commune mesure, la main de fer prévaut jusqu'à l'excès ?! Deux poids, deux mesures ! L'idiot n'est donc pas Sami Fehri. Un homme broyé injustement par le système ne peut l'être. Par contre, on est en présence d'une armée d'idiots utiles, à savoir, les juges qui vendent leur âme pour les mêmes raisons qu'ils l'ont vendue sous la dictature mauve de sinistre mémoire. Quel paradoxe ! Le contexte historique n'est plus le même mais les idiots utiles restent là, fidèles au poste, égaux à eux-mêmes, se prostituant au pouvoir en place. Il ne s'agit point de faire l'apologie du « gouvernement des juges » mais de pointer les idiots utiles, ces brebis galeuses, ces hommes ripoux, qui sous prétexte d'être sous pression gangrènent l'appareil de justice et mettent en otage le processus de construction de 'Etat de droit. La révolution était déclenchée pour rompre avec le système et non pour le reproduire à l'identique avec d'autres hommes et une autre idéologie. Tout le soutien à Sami Fehri dans son combat ainsi qu'à tous les réfugiés judiciaires, victimes de l'appareil de justice tunisien.