Décidément, il avait tout à fait raison, Ali Larayedh, quand au tout début de son mandat en tant que président du gouvernement, il avait intimé le silence radio à ses ministres. C'est que Larayedh avait tiré les leçons du passage de son prédécesseur Jebali, quand, forts de leur longue expérience en politique, tous les membres du gouvernement d'alors, pouvaient dire tout et n'importe quoi, aux médias, qui se faisaient un plaisir et un devoir de répercuter les maladresses de communication des membres du gouvernement. Et c'est de cette façon, que Larayedh eut quelques mois de répit, et a pu avancer tant bien que mal, et plus bien que mal, en laissant le citoyen dans l'ignorance totale de ce qui se tramait. Mais ces derniers jours ont connu une réapparition des membres du cabinet et du parti au pouvoir, sur les médias, ce qui a eu comme conséquence inéluctable, un florilège de « déclarations plus intelligentes et plus sensées les unes que les autres ». Mais la palme, en la matière, revient, certainement, au ministre de la santé, qui le jeun aidant, et l'information poussant, n'a pas pu s'empêcher de faire le grand étalage de son savoir scientifique. Ainsi, et juste après avoir pris les tunisiens pour des ignorants en leur parlant de cas de malaria importés, mais qui se transmettent quand même entre amis, au hasard d'une soirée autour d'une table de terrasse d'un café, après avoir déclaré que le malaria est une maladie parasitaire et qui n'est pas due aux moustiques, en niant que ce parasite ne se transmettait qu'à travers la piqûre d'un certain insecte, qui, d'ailleurs, n'est pas sensé exister en Tunisie, dans une tentative de cacher que la réapparition de ce mal moyenâgeux est due à la négligence du meilleur gouvernement qu'ait jamais connu la Tunisie, en matière d'hygiène et de salubrité de l'environnement... Après tout cela, il a lancé une bombe sans avoir, certainement, compris la portée des termes qu'il utilisait, en parlant de décréter l'état « d'urgence sanitaire ». Car notre ministre de la santé ne doit certainement pas ignorer que ce terme est utilisé dans les normes de santé mondiale, pour annoncer une flambée épidémique ou un foyer incontrôlable de maladie transmissible. Mais lui, il voulait juste parler d'une recrudescence des chiffres de certaines maladies non-transmissibles, comme le diabète, l'hypertension, l'obésité ainsi que le cancer des poumons. Chiffres qui l'ont interpellé et qui ont motivé l'utilisation de ce terme, et son appel à la rescousse de ses amis les autres ministres, pour l'aider (on se demande comment) à affronter ces maladies. Or ce qui n'a, apparemment, nullement interpellé le ministre, c'est de savoir le pourquoi de la chose. C'est de se poser les questions qu'il fallait pour chercher la cause de la prolifération de ce type de maladies. Et il ne s'est même pas rendu compte qu'il énumérait des maladies psychosomatiques par excellence. Et lui, le ministre en charge de la santé aussi bien physique que morale des tunisiens ne s'est pas posé la question pour savoir pour quelle raison les tunisiens développent de plus en plus des maladies en rapport avec le stress, en rapport avec la dépression, et pourquoi, pendant qu'il y est, les jeunes tunisiens se suicident-ils de plus en plus sous le règne d'Ennahdha.