«C'est une situation plutôt catastrophique qui nécessite, sans aucun doute, des solutions rapides et concrètes pour stopper cette hémorragie», s'est alarmé M. Walid, propriétaire d'un centre d'appel à Métlaoui. Dans la région de Gafsa, une quinzaine de propriétaires de centres d'appels se sont réunis afin de trouver des solutions à leurs difficultés conjoncturelles et structurelles qui les menacent. Par ces actions, ces entrepreneurs montrent leur détermination et leur volonté de contribuer au développement de la région. «L'activité normale de nos centres est capable de créer 1.300 postes d'emploi», souligne l'un des responsables. Aujourd'hui, la situation est la même pour tous : menace de fermeture d'entreprises, des clients qui refusent de payer, ainsi que l'impossibilité de prospecter de nouveaux marchés. L'activité est tout simplement mise en veille. De ce fait, la conjoncture défavorable oblige les dirigeants à avoir recours au licenciement du personnel.«Il faut savoir que ces investissements étaient porteurs, de grande valeur ajoutée, pourvoyeurs de devises et d'une bonne capacité d'employabilité, notamment des diplômés de l'enseignement supérieur», rappelle-t-il. En réalité, le secteur souffre de plusieurs disfonctionnements. Orientés vers les marchés extérieurs, ces opérateurs manquent d'un pouvoir de négociation favorisant la bonne marche des contrats et de leurs paiements. De plus, une forme de concurrence déloyale est en train de se développer, causant un bradage des prix des services de ces centres. Ne disposant ni de solutions techniques fiables, ni de statut légal, ni encore de personnels qualifiés, des centres clandestins offrent des prix défiant toute concurrence. «En 2008, les ventes des rendez-vous avoisinent les 400 euros. Maintenant, on les négocie à seulement 40 euros», explique Walid. Un contrôle strict s'impose pour protéger le secteur. Sur le marché local, les opérateurs ont déploré le manque flagrant de transparence des appels d'offres et de l'externalisation des services de clientèle et de renseignements. A cet égard, ils se sont plaints de la monopolisation de ces marchés par des centres bien déterminés. Au niveau technique, les centres de contact utilisent une plateforme technologique moderne et coûteuse. A cela vient s'ajouter les coûts exorbitants des Lignes Louées Internationales (LLI) et des divers frais de communication. De même, les formules de calcul des loyers, dans les cyber-parcs, ne sont avantageuses que pour les petits locaux. «Pour un centre d'appel de 250m2, le loyer peut atteindre 7 500 dinars, la troisième année. C'est loin d'être un avantage», avance le propriétaire d'un centre de contact. Tout cela est de nature à sanctionner négativement la compétitivité de ces opérateurs. Sur le plan financier, ces entreprises souffrent d'un net déséquilibre, surtout les premières années. Face à des échéances de paiement des crédits bancaires, avant même l'entrée en exploitation, les nouveaux projets risquent de ne pas voir le jour. Des solutions réalistes et réalisables A circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles. Après des réunions et des travaux d'identification des problèmes du secteur, les opérateurs de la région de Gafsa ont présenté une ébauche de solutions pour sauver leur activité. En premier lieu, les promoteurs ont insisté sur la révision des conditions de leurs crédits bancaires. Les opérateurs demandent un report d'une année de l'échéancier de paiement pour pouvoir dépasser la période difficile. Ainsi, le report de paiement doit porter aussi bien sur le principal que sur l'intérêt. De même, une révision des taux d'intérêt, estimés exorbitants, s'impose, selon certains. En tant que nouveau promoteur, M. Ramzi, précise que «le délai de grâce d'une année est insuffisant, pour atteindre un niveau critique d'activité». En fait, l'accumulation de la dette bancaire est de nature à freiner le démarrage de son centre d'appel. Par ailleurs, les responsables des centres d'appels de la région de Gafsa ont déploré la lenteur des procédures des administrations et des instances régionales et centrales. Dans l'un des fax adressé à la Banque de Financement des Petites et Moyennes Entreprises (BFPME), l'un des promoteurs déplore le «manque de réactivité des différentes instances bancaires et administratives, surtout après les décisions ministérielles de soutien aux sociétés totalement exportatrices». Sur un autre plan, une meilleure accessibilité aux marchés nationaux pourrait stimuler la relance de l'activité de ces centres et garantir un niveau de revenu critique, pour conserver les emplois et honorer les engagements. «Les ministères, les entreprises publiques, les banques, les unités touristiques... sont des gisements de croissance pour tout centre de contact», affirme un propriétaire d'un centre d'appels. Armés de courage et de persévérance, motivés par des mesures d'incitations fiscales et financières, ces jeunes promoteurs se sont engagés dans ces projets pourvoyeurs de devises et à forte employabilité pour contribuer au développement de leur région. Mais à l'instar de la majorité des jeunes promoteurs de toutes les régions, ils se sentent, tout simplement, délaissés face au fait établi. Dans ces circonstances spéciales, il est plus qu'indispensable d'assister cette nouvelle génération de promoteurs à dépasser le cap des premières années afin qu'ils puissent voler de leurs propres ailes.