La convocation d'une rencontre les 5 et 6 juin courant à Alger entre les ministres des Affaires étrangères de Tunisie, d'Egypte et d'Algérie sur le dossier libyen, intervient à point nommé alors que le pays est secoué par une vague de violences de nature à embraser toute la Libye et la faire basculer dans la guerre civile. La rencontre d'Alger est le fruit de l'imitative du président Béji Caïd Essebsi visant à faire asseoir sur la table de négociation les protagonistes libyens afin de les aider à trouver une solution libyo-libyenne loin des ingérences étrangères. Toutefois, les pays du voisinage de la Libye et certaines puissances régionales, de plus en plus impliquées dans le dossier libyens s'ingèrent dans affaires internes libyennes en prenant partie pour un camp au détriment d'un autre. Une réalité qui complique davantage la crise et conduit à un cercle de violence en Libye. Profonde crise politique En effet, la situation est toujours marquée par une profonde crise politique et sécuritaire entraînant une impasse dans le processus politique destinée à trouver une solution négociée. La logique de guerre domine toujours bien que la plupart des protagonistes libyens et la communauté internationale, sont convaincus que les armes ne peuvent pas apporter la paix car jusqu'à présent aucun camps n'est arrivé à prendre le dessus sur l'autre. Les groupes et milices rivales continuent à s'affronter dans la capitale libyenne et les derniers heurts armés remontent à jeudi dernier lors du lancement d'une nouvelle opération militaire baptisée «Fakhr Libya» (Fierté de la Libye) sur la modèle de Fajr Libya (Aube de Libye) visant à déloger de Tripoli, le Conseil présidentiel dirigé Fayez Al-Sarraj, soutenu par les Nations unies. Ces affrontements compromettent sérieusement le processus politique qui a été relancé grâce à une rencontre entre le président du Conseil présidentiel Fayez al-Sarraj et le maréchal Khalifa Haftar chef des forces armés nationale libyennes basées dans l'Est du pays. La rencontre de ces deux personnages clé de l'équation libyenne, avait suscité un grand espoir de trouver un compris d'autant plus qu'ils ont convenu au cours de leur rencontre à Abou Dhabi d'amender l'Accord politique de Skhirat de 2015 pour sortir de l'impasse et parvenir à une solution pacifique. La réunion d'Abou Dhabi s'est déroulée sous les auspices de l'Emir de ce royaume du Golfe connu pour son soutien aux autorités dans l'Est de la Libye, alliés au maréchal Khalifa Haftar. Des analystes expliquent le regain de tension dans la ville de Tripoli, par les craintes nourries par certains groupes armés et milices qui voient dans les arrangements entre Al-Sarraj et Haftar, une menace à leur existence car cela implique leur exclusion de l'échiquier politique et sécuritaire de la Libye. Ces groupes armés n'ont pas été associés à ces pourparlers et de ce fait se sentent laissé à la marge de la solution envisagée. Outre, les affrontements de Tripoli, l'attaque contre une base aérienne à Barak al-Chatti dans le Sud de la Libye aux mains de forces fidèles à Haftar par des troupes relevant du Conseil présidentiel du gouvernement, a constitué un coup dure assené aux avancées réalisées par la rencontre d'Abou Dhabi. Ainsi lors de cette attaque plus de 140 combattants relevant de Haftar ont été tués, entraînant de nouvelles tensions entre les deux camps. Les canaux de communication ouverts à la faveur de la rencontre entre Haftar et al-Sarraj ont été interrompus et le processus politique est revenu à la case départ avec l'impasse politique. Frappes aériennes égyptiennes Autre facteur qui a compris le processus de paix en Libye, la série de frappes aériennes que mène actuellement l'Egypte depuis vendredi dernier contre des supposées positions de djihadistes dans la Libye. En fait, de nombreux analystes, affirment qu'il s'agit d'une expédition punitive de l'Egypte qui veut une démonstration de force en représailles contre l'attaque terroriste qui a ciblé un convoi de coptes égyptiens dans la ville de Minya tuant 29 et en blessant 24 autres. Certains sont allés jusqu'à affirmer que l'Egypte veut clamer son opinion public en détournant l'attention de l'échec des organes sécuritaires à éradiquer le phénomène terroriste qui gangrène le pays. En Libye, une grand partie du pays notamment le camp représentant l'Ouest du pays, voient dans les frappes aériennes égyptiennes une violation flagrantes de la souveraineté de la Libye. Le Conseil présidentiel en Libye a condamné, pour sa part, ces frappes, dénonçant une intervention sans l'autorisation des autorités légales du pays bien que le camp de Haftar a affirmé avoir participé à l'exécution de ces frappes. A la lumière de ces tensions, la réunion d'Alger, constitue un important espoir pour relancer le processus politique en Libye en panne depuis plusieurs mois. C'est aussi l'opportunité de lancer l'initiative de médiation de la Tunisie en Libye pour réunir les protagonistes libyens et les inciter au compromis afin de sortir leur pays du cercle de la violence et favoriser la stabilité de la région.