Le nouveau Pacte européen sur la migration, qui instaure un partage automatique et équitable du fardeau des migrants illégaux, n'entrera en vigueur qu'en 2026. Mais c'est déjà la panique dans les pays de l'Union européenne (UE) qui jusqu'ici regardaient ça de loin, en laissant seules l'Italie, la France, l'Espagne, la Grèce, etc., se dépatouiller avec ce dossier. 15 Etats-membres de l'UE, conduits par le Danemark et la République Tchèque, défendent l'idée «de nouvelles solutions» pour acheminer les clandestins vers des pays tiers hors UE. Même les opérations de sauvetage en mer ils veulent les déléguer à ces pays. Manifestement la trouvaille du Royaume-Uni, qui veut transférer tous les demandeurs d'asile déboutés vers le Rwanda, fait des émules, et même pire. Pourtant le projet du Premier ministre britannique Rishi Sunak, qui est sorti de la tête de Boris Johnson, est fortement décrié par la Cour suprême, par les ONG et par les juridictions internationales. Mais ces 15 pays européens n'en ont cure. Le pacte migratoire voté dernièrement ne leur convient pas, même s'il serre encore plus dans le contrôle de l'immigration dès les frontières maritimes européennes. Ils veulent encore plus. Le groupe des 15 – qui très certainement grossira prochainement – demande à la Commission européenne «d'identifier, d'élaborer et de proposer de nouveaux moyens et de nouvelles solutions pour prévenir l'immigration irrégulière vers l'Europe», dit la lettre envoyée aux services d'Ursula von der Leyen. A noter que les pays signataires sont : la Bulgarie, la République Tchèque, le Danemark, la Finlande, l'Estonie, la Grèce, l'Italie, Chypre, la Lettonie, la Lituanie, Malte, les Pays-Bas, l'Autriche, la Pologne et la Roumanie. Ils exigent des systèmes permettant «de détecter, d'intercepter et, en cas de détresse, de secourir des migrants en haute mer et de les emmener dans un lieu sûr d'un pays partenaire hors de l'UE où des solutions durables pourraient être trouvées pour ces migrants». L'exemple type : l'accord que l'Italie a scellé récemment avec l'Albanie. Le document acte que les migrants secourus dans les eaux italiennes sont directement envoyés dans ce pays pour que leurs demandes d'asile soient étudiées sur place. La législation européenne prévoit qu'un immigrant peut être conduit vers un pays hors UE offrant la possibilité de demander l'asile, mais à la condition que le migrant ait une relation avec cet Etat tiers. Donc en l'état pas question de suivre le sillage du Royaume-Uni et du Rwanda. C'est justement ce verrou que ces 15 pays veulent faire sauter. «L'application du concept de "pays tiers sûr" dans la loi européenne sur l'asile doit être réévaluée», arguent-ils. Le groupe ambitionne de démultiplier les accords avec les pays tiers nichés sur les routes migratoires, en prenant le modèle de "marchés" – c'est ce dont il s'agit – déjà conclus, avec plus ou moins de succès, comme le partenariat établi avec la Turquie en 2016 pour fixer sur place les réfugiés syriens. «Nous encourageons l'établissement de partenariats globaux, mutuellement bénéfiques et durables avec les principaux pays partenaires situés le long des routes migratoires», disent les signataires. Rappelons que les citoyens européens sont convoqués le 9 juin prochain pour élire un nouveau Parlement. D'après les sondages les partis anti-immigration (l'extrême droite) auront des scores historiquement hauts. Alors il faut imaginer ce que les futures Assemblée et Commission européennes feront de ces propositions sans précédent… Que se passe-t-il en Tunisie? Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!