« cinéma en Tunisie » : la renaissance de la critique cinématographique
Il est le plus jeune critique du cinéma en Tunisie. Il vient d'éditer son livre « Cinéma en Tunisie » et nous livre en exclusivité les secrets du succès de son œuvre. Connu dans le domaine cinématographique, « Ismaël » (tout court), 28 ans, est fortement actif sur la scène culturelle tunisienne. Les réactions à propos ce livre sont diverses mais tout le monde se félicite finalement de cet évènement qui ne peut être que bénéfique à la critique cinématographique. Interview.
Pourquoi avez-vous pensé à écrire « cinéma en Tunisie » ?
Au début, c'était une proposition qui m'été présentée par Mr. Habib Bel Hédi, Directeur de CinémAfricArt, en vue de marquer la saison cinématographique 2007-2008. J'ai très vite adopté cette idée surtout que cette saison a connu visiblement des évènements marquants et importants en cinéma. Ensuite, nous avons (moi et Habib Bel Hedj) lancé le projet en mars 2008 pour éditer le livre en fin de saison, c'est-à-dire en septembre 2008. J'ai passé en tout 6 mois de rédaction en suivant de près les activités, les productions et les tendances cinématographiques émergentes ou déjà existantes.
Vous ne pensez pas que 6 mois est peu pour faire sortir une critique assez globale à propos du cinéma tunisien ?
Tout d'abord, je ne considère pas que le terme « cinéma tunisien » existe encore. J'ai bien précisé depuis le titre qu'il s'agit du cinéma en Tunisie. Ce qui est différent. En plus, ma méthode justifie la durée de l'écriture. Car, bien que j'aie finalisé toute recherche bibliographique nécessaire concernant le sujet, je me suis basé sur une expérience vécue. Le cinéma est une vie, ma vie. C'est une expérience fortement intime de vivre le cinéma, de le voir et de l'analyser en même temps.
Outre les éloges dénombrables que votre livre a eus lors de sa sortie, il y a eu aussi des critiques ou plutôt des reproches. Qu'est ce que vous en pensez ?
J'ai essayé de rester le plus sincère possible. J'accepte les critiques tant qu'elles ne sont pas basées sur des intentions personnelles. Au court des débats que j'ai mené à propos de mon livre, j'ai malheureusement remarqué que la majorité a analysé le livre d'un point de vue restreint. Il nous manque la culture du dialogue. Nous pensons que la critique ne peut que détruire et c'est seulement la haine ou le mépris qui la motivent. Alors que ma critique n'est qu'une preuve d'amour, la plus audacieuse, pour un cinéma qui nous est cher.
Justement. Plusieurs sont ceux qui pensent que vous avez montré à travers « cinéma en Tunisie » une agressivité assez choquante. Vous en êtes conscient ?
Je ne pense pas que c'est vraiment de l'agressivité. C'est plutôt de la virulence ou encore de la colère qui n'est pas dénudée d'intérêt. Je suis persuadé que face à l'attitude de laisser aller les choses et qui devient la règle, nous devons nous arrêter et nous poser des questions légitimes, mais surtout sincères. « cinéma en Tunisie » ne dit que ça et je ne l'ai pas écrit pour choquer mais plutôt dans l'intention d'attirer l'attention quant à certaines questions.
Vous avez analysé dans le livre plusieurs facettes du paysage cinématographique. Parmi lesquelles, le piratage. Pourquoi l'appelez-vous la piraterie positive ? Est-elle vraiment positive ?
Je ne suis pas pour le piratage en général. Mais ce n'est pas correct de dire que le piratage est la raison fatale et unique de la régression de la culture cinématographique en Tunisie. Je pense qu'on doit trouver une solution pragmatique et progressive pour utiliser cette énorme masse de piratage dans la construction d'un bon Cinéma.
Quelles sont les méthodes que vous proposez ?
Le piratage positif nous donne un choix large de films qu'on ne peut acheter à son prix réel. Toutefois, nous devons contrôler la duplication massive des films et même faire une structure pour organiser la distribution. Plusieurs solutions peuvent être constructives pour rendre le piratage favorable au cinéma et à la culture cinématographique. Dans ce sens, nous ne pouvons pas nier que nos jeunes ont besoin de voir le plus grand nombre possible de film. Ce qui n'est pas vraiment possible sans le piratage.
Et si vous serez amené à réécrire « cinéma en Tunisie », sera-t-il différent ?
Oui certainement. Je ne changerais pas de sincérité ni de ton mais je prendrais en considération des suggestions et des remarques que je trouve pertinentes. Je pense que chaque idée ou œuvre ne doit en aucun cas rester fixe ou figée. Tout doit évoluer et surtout la pensée. Donc il est certain que mes pensées et perceptions changerons en réécrivant « cinéma en Tunisie ».
Titre : Cinéma en Tunisie Sous-titre : Kaléidoscope de la saison 2007 – 2008 Auteur : Ismaël Format : 15,5cm x 21cm Pages : 180 Editeur : Arts Distribution Prix : 10 dinars En vente dans les librairies Al Kitab, Clairefontaine, Mille Feuilles, Ars Libris, Fahrenheit 451, etc., et dans la salle du CinémAfricArt.
Résumé : En ce début de 21ème siècle, qu'est-ce que le cinéma en Tunisie ? Qu'est-il dans ce pays, en tant qu'activité socioculturelle, que secteur économique et industriel, qu'expression artistique, qu'enjeu politique… ? Ce livre est une esquisse de réponse à ces questions à travers le prisme de la saison 2007 – 2008. Saison qui sera le centre d'intérêt et le sujet d'étude principal, mais qui ne sera pas détachée d'une histoire passée à laquelle elle appartient inexorablement d'une part ; et à partir de laquelle on pourrait éventuellement mettre la première pierre d'une régénérescence d'autre part. Ce livre se rêve en « documentaire écrit », d'une subjectivité objectivée, à la fois personnel et ouvert, passionné et distancé, esthétique et polémique.
Biographie d'Ismaël : Ancien étudiant en Cinéma et en Lettres Françaises et ancien membre du Comité de Rédaction de la revue Dixit de poésie contemporaine (Toulouse) ainsi que de la Fédération Tunisienne des Cinéastes Amateurs. Il a cofondé et anime actuellement le club de cinéma Cinéfils El Hamra. Il est par ailleurs membre de l'Association Tunisienne pour la Promotion de la Critique Cinématographique et rédacteur de la revue Cinécrits.