L'harissa, cette purée de piments utilisée comme assaisonnement dans la cuisine tunisienne, a tendance à forcer le goût de fins gourmets d'autres cieux. Les exportations de ce «condiment national» ne cessent d'augmenter de manière significative au fil des années. Si on croit des statistiques fournies par le Centre de promotion des exportations (CEPEX), les producteurs d'harissa ont exporté 5.148 tonnes en 2006 contre 2.800 tonnes en 2002 pour une valeur de 13,7 millions de dinars contre 12,7 millions de dinars en 2005. Les principaux débouchés de l'harissa tunisienne sont principalement la France qui a importé, au cours du même exercice, pour 8 millions de dinars, et la Libye pour 3 millions de dinars. La communauté tunisienne en France et en Libye tout autant que la communauté des Juifs tunisiens qui a émigré, durant les années soixante, sont toujours fidèles à cette tradition culinaire. De manière générale, l'harissa, ingrédient piquant, est utilisée pour relever le goût de nombreux mets. Il en existe des variétés régionales selon le type des piments, le goût et la préparation. Globalement, il s'agit d'une préparation à base de piments rouges très forts, séchés au soleil puis broyés en présence d'épices, comme du cumin. Sa consommation varie selon les régions. Certains habitants en consomment quotidiennement alors que d'autres en consomment occasionnellement. Les habitants du Sahel et du Cap Bon sont les champions. L'harissa est pour eux une composante incontournable de leur cuisine. La population des zones rurales, qui confectionne artisanalement sa propre harissa, est connue aussi pour son utilisation de cette sauce piquante. Mais elle peut être trouvée dans d'autres cuisines du Maghreb. Produit phare de la filière agroalimentaire aux côtés du concentré de tomate, l'harissa est habituellement vendue en boîtes de conserve mais on en trouve aussi dans des tubes et en vrac. Elle est souvent utilisée pour préparer des casse-croûtes ou pour assortir des plats comme le couscous ou le kefteji. Il existe également plusieurs variétés de ce condiment. L'harissa berbère est très prisée en France. Cuisinée avec du piment de Cayenne séché de qualité, beaucoup d'ail, de l'huile, du sel et quelques autres épices sélectionnées, l'harissa berbère est un produit typiquement tunisien vendu chez les bouchers nord-africains. Très parfumée, on la trouve rarement en grande surface. Cependant, par delà ses qualités gastronomiques, ce condiment, de plus en plus prisé et dont la rentabilité est de plus en plus confirmée, risque d'échapper aux Tunisiens et de tomber dans les mains d'imitateurs sans scrupules, pour peu que les autorités de la filière agroalimentaires (le Groupement interprofessionnel des conserves alimentaires, entre autres) n'accélèrent pas le processus de sa labellisation. Plus simplement, il s'agit d'apposer à l'emballage un signe distinctif de qualité pour l'harissa tunisienne. Il s'agit également d'aider les producteurs d'harissa qui sont pour la plupart implantés au Cap Bon et au Sahel à mettre en place des systèmes de traçabilité. On se rappelle qu'au début de l'année 2006, des contingents d'harissa tunisienne avaient été refoulés au port de Marseille en raison, entre autres, de non conformité aux normes de sécurité alimentaire françaises... Il faut reconnaître que les structures d'appui ont une conscience aiguë et très développée de l'ensemble de ses problèmes et s'emploient à les résoudre dans les meilleurs délais. Car, forte de la labellisation et de systèmes de traçabilité, la trentaine d'usines qui fabriquent l'harissa en transformant 20 mille tonnes de piment, ne peuvent que renforcer leur positionnement sur le marché international, inscrire leur activité dans la durée et contribuer à faire de l'harissa un produit demandé à l'export, tout autant que les agrumes, les dattes, les fruits de mer Loin de nous toute leçon de morale !