« Depuis quelque temps, l'Asie défraie la chronique, par son importance croissante au sein de l'économie mondiale. L'évolution des économies asiatiques n'est pas sans implication pour les politiques des pays industrialisés et des économies émergentes comme celles où nous nous situons (le Maghreb) et aussi celle à marché émergent d'Asie », c'est en ces propos que M. Moez Belkhiria, PDG de BSB Toyota a entamé sa présentation des journées de l'entreprise (30 novembre-1er décembre 2007 au Port El Kantaoui). M. Belkhiria a souligné qu'il faut préciser que ce phénomène d'émergence que nous observons aujourd'hui n'est pas nouveau. En effet, « depuis le début du 19ème siècle, de nombreux pays sont devenus des acteurs importants sur la scène économique internationale. Durant les années 1830, les gains de productivité associés à la révolution industrielle ont propulsé le Royaume-Uni au rang des grandes puissances économiques. L'Allemagne et les Etats-Unis ont suivi dans la seconde moitié du 19ème siècle, en adoptant les nouvelles technologies de l'époque. Pendant les années 1950 et 1960, le Japon s'est relevé de la Seconde Guerre mondiale pour devenir un géant économique. Puis ce fut l'ascension de la Corée dans les années 1970, suivie au cours des années 1980 et 1990, de celle d'autres pays asiatiques que l'on appelle communément les « tigres d'Asie ». Maintenant, c'est au tour de la Chine. Et l'Inde n'est pas loin derrière ».
M. Belkhiria précise que naturellement, beaucoup de gens perçoivent cette concurrence grandissante de la Chine et de l'Inde comme une grave menace, certains se demandent comment rivaliser avec des pays qui disposent d'une main-d'uvre aussi importante et bon marché et ayant accès aux technologies de pointe, agissant sur des marchés domestiques aussi large que les leurs.
« La hausse de la production de biens manufacturés en Chine et l'essor du secteur tertiaire en Inde représentent manifestement un défi de taille pour les autres économies du monde », souligne M. Belkhiria. « De plus, dans un contexte où les entreprises subissent des pressions constantes pour réduire leurs coûts, plusieurs entreprises d'entre elles estiment que ces deux pays sont des endroits propices pour l'établissement des usines et des centres de services. De fait un fort pourcentage d'exportateurs chinois est constitué de filiales ou de sociétés affiliées de multinationales ayant leur siège dans des pays industrialisés. Il en va de même pour de nombreuses entreprises dans les autres pays asiatiques », continue-t-il.
M. Belkhiria note après qu'il est vrai que l'émergence de ces pays présente une menace pour les emplois et l'économie de plusieurs pays. Mais pour bien apprécier toutes les dimensions du problème, il précise qu'il faut aussi comprendre qu'une intensification de la concurrence est bénéfique, même si elle s'avère parfois douloureuse.
La concurrence stimule l'innovation, et les efforts déployés pour augmenter la productivité profitent aux consommateurs partout dans le monde. Ce qui permettra de remplacer des activités désuètes et peu productives par d'autres plus innovatrices et dynamiques. N'oublions pas que l'amélioration de la productivité conduit à des hausses durables des revenus réels. Et bien que des emplois puissent disparaître dans les secteurs aux prises avec une plus vive concurrence, d'autres sont créés ailleurs.
C'était donc un bref aperçu, que nous a présenté M. Belkhiria, de l'impact de cette émergence sur les pays industrialisés à savoir l'Europe et les Etats-Unis.
L'intervenant a ensuite continué en posant deux questions aussi pertinentes l'une que l'autre à savoir: « Quel est l'impact de l'émergence des pays asiatiques sur les pays maghrébins ? » et « Doit-on se maintenir et faire face à cette concurrence ou se repositionner sur des niches et des marchés nouveaux, ou encore changer de stratégies et de secteurs prioritaires ? »
« C'est dans ce contexte que s'inscrivent les différentes interventions pendant ces journées », note M. Belkhiria.
L'intervenant a ensuite précisé qu'au programme de cette nouvelle édition des Journées de l'entreprise, trois grands axes seront débattus et analysés à savoir: le développement des entreprises asiatiques, les similitudes et les différences dans l'environnement économique des pays asiatiques et maghrébins et enfin les flux commerciaux et d'investissement entre les pays du Maghreb et l'Asie.
Le choix du premier thème se justifie par le fait que les pays asiatiques représentent une disparité en terme d'environnement des affaires, d'économies, de compétitivité et de politiques, ce qui limite le point commun entre les différentes expériences et la réussite de leurs entreprises.
M. Belkhiria souligne ensuite que le développement des entreprises asiatiques bien qu'il soit fascinant d'un côté, il est « effrayant » de l'autre côté. Par exemple : la Chine classée seconde économie mondiale et l'Inde, la 3ème en terme d'exportation, d'entrée d'IDE mais aussi en terme de PIB. L'intervenant note que « l'Asie est devenue la zone vers laquelle les exportations de l'Union Européenne sont les plus dynamiques en 2005 au détriment de pays maghrébins. Ces derniers commencent à perdre une part du marché européen mais aussi maghrébin ».
A titre d'exemple M. Belkhiria cite le secteur du textile ou les achats du marché européen provenant de la Chine ont augmenté de 40%. La chine est, alors, devenue premier fournisseur dans ce secteur pourtant les facteurs de compétitivité sont fort présents dans la région du Maghreb.
Pour ce qui est des perspectives de coopération entre l'Asie et le Maghreb, M. Belkhiria souligne que « les dix accords de coopérations signés par la Tunisie avec certains pays asiatiques, sont forts prometteurs, touchant les ressources humaines, les échanges d'expertises, d'informations, les recherches scientifiques, l'industrie chimique, et les technologies de l'information et de la communication ».
M. Belkhiria précise enfin que « ces relations ne peuvent que nous encourager et justifier l'établissement d'une perspective de coopération avec l'Asie, malgré la concurrence intense dans plusieurs secteurs justifiée par plusieurs points de partenariat potentiels ou encore la possibilité d'exporter plusieurs de nos produits vers ces pays ». Ghada KAMMOUN