Le Groupe de la Banque africaine de développement (BAD) a mis les bouchées doubles en organisant, du 12 au 13 novembre 2008, à l'Hôtel Ramada Plaza - Gammarth, dans la banlieue- nord de Tunis, une «Conférence ministérielle sur la crise financière», parsemée de tables rondes interministérielles à huis clos !, de sessions plénières centrées sur les tenants et les aboutissants du nouvel ordre financier international en gestation dans les chancelleries du nord et de débats autour d'une pléiade d'experts et des représentants des mass-média concernant les éventuels retombées de la récession probable des économies occidentales sur les projets de développement des pays africains, en butte, d'ores et déjà, affirme un banquier de l'Afrique subsaharienne, à un ralentissement des lignes du crédit commercial à l'échelle mondiale. Etat des lieux Monsieur Donald Kaberuka, président de la BAD, après avoir salué la présence des différents argentiers et gouverneurs centraux du continent, au conclave du bras financier de l'OUA, a insisté, dans son allocution d'ouverture, sur les effets néfastes du ralentissement de l'économie mondiale sur les secteurs industriels africains tributaires de la demande internationale, le recul prévisible d'un taux de croissance continental ramené à 5% à la suite de la tourmente spéculative actuelle après avoir avoisiné 6,5% pendant une décennie et le rôle primordial des pays riches, en cette période transitoire cruciale, dans la restauration de la confiance chez les Etats du Sud, fragilisés, menacés d'hyperinflation et d'instabilité politique chronique depuis l'annonce de la bourrasque monétaire dans les pays du Nord. «L'expérience nous a montré que le comportement du marché international à l'image d'un comportement de foule, se caractérise par des changements brusques de sentiment chez les investisseurs et les flux rapides de capitaux vers un pays ou sortant d'un pays, en particulier les financements à court terme», ajoute M. Kaberuka qui appelle les ministres des Finances du continent à adopter une stratégie budgétaire à même de renforcer la résilience des opérateurs économiques locaux, à commencer à se repositionner dans la perspective d'un changement radical du paysage financier international et à parler d'une même voix pour pouvoir peser dans les décisions visant le renouvellement du système capitalistique mondial. De son côté, M. Mohamed Ghannouchi, Premier ministre tunisien et invité d'honneur de la Conférence, a invité l'assistance, durant son intervention, à réfléchir, afin de faire face à la folie spéculative actuelle, sur un redéploiement des moyens du continent vers le secteur primaire, laissé en déshérence depuis des décennies, à développer encore davantage les infrastructures et les équipements collectifs et à renforcer les ressources humaines à travers l'investissement dans la formation, l'éducation et la santé, seules à même, dit-il, d'assurer la combinaison intelligente des facteurs complexes de l'acte productif. «Le monde a besoin de l'Afrique, levier de croissance important au niveau mondial et creuset des matières premières de premier ordre», conclut l Premier ministre, qui insiste sur la promotion du partenariat gagnant-gagnant avec l'Occident, l'importance, pour le continent, d'une croissance à 7% afin de résorber le chômage grandissant et l'ouverture, sans entrave, des marchés internationaux aux produits africains, conformément aux standards en cours. Comment donc s'en sortir ? Parallèlement aux séances plénières de la première journée où des experts africains et internationaux se sont évertués à décortiquer, à analyser l'architecture financière mondiale et ses déboires actuels, le vedettariat revenait aux délibérations ministérielles, réunions assimilées à de véritables conseils de guerre, clame l'un des confrères, visiblement irrité de la décision, à vrai dire erronée, de maintenir les journalistes à l'écart de ces conclaves, sensés homogénéiser, nous dit M. Rachid Kechiche, ministre tunisien des Finances, les décisions des argentiers africains face au verrouillage, déjà perceptible, des marchés du crédit international, plaider pour une réglementation transfrontière des systèmes financiers alternatifs et lancer des messages clairs en direction des participants du G20, prévu le 15 novembre 2008, à Washington, pour tenir compte des desideratas d'un continent qui aspire à l'émergence, à cette occasion, d'un Bretton Woods II, capable de s'adapter aux particularités des pays, de donner le signal d'un processus de participation inclusive et de promouvoir l'intégrité sur les marchés financiers en prévenant les bulles spéculatives grâce à l'installation des systèmes de pré-alerte, de supervision et de coopération internationale.