Recevant la cheffe du Gouvernement : Le Chef de l'Etat insiste sur un projet de loi de finances à vocation sociale    Recevant la directrice générale de l'OIM : Saïed plaide pour le retour volontaire et la dignité des migrants    Le Front de salut national dénonce un nouveau procès politique sans preuves    Volley-Coupe de Tunisie: L'Espérance ST rejoint l'Etoile du Sahel en finale    Nouvelle composition du Conseil de la presse    Marchés financiers arabes : Performance élevée pour la Bourse de Tunis    Divorcer sans passer par le tribunal : une réforme en débat à l'ARP    Tunisie – Importante visite de travail de la DG de l'OIM    Risque d'incendies en Tunisie: la Protection civile appelle à la vigilance en été    Tunisie – METEO : Pluies parfois abondantes et chutes de grêle    Tunisie – Arrestations et saisie de drogue et de bière dans une campagne sécuritaires à Sidi Hassine    La MSB Tunis devient la première école de commerce triplement accréditée AACSB, EFMD et AMBA    L'EST remporte le classico : Ces petits détails....    L'USBG valide contre l'ESZ : Mission presque accomplie    Education numérique : 3540 établissements scolaires déjà connectés à la fibre en Tunisie    Le Kef : Samir Abdelhafidh dévoile une stratégie pour relancer l'investissement local (Vidéo+Photos)    Ambassade israélienne en Tunisie et exportation de pétrole : intox sur X    Soupçons de torture sur un détenu : Précisions du barreau après un communiqué du ministère de la Justice    Manouba : le fils de l'avocate tuée et brûlée visé par un mandat de recherche    Homo Deus au pays d'Homo Sapiens    Affluence record à la Foire du livre 2025, mais le pouvoir d'achat freine les ventes [vidéo]    Chute historique : le baril dégringole sous les 60 dollars    Pas d'eau pendant deux jours dans le sud de Tunis : tous les détails    Japon-Tunisie : Renforcement des hôpitaux avec 6,2 mDt d'équipements médicaux    Puissance et conditionnalité: La nouvelle grammaire allemande des relations extérieures    Quelle est l'ampleur des déséquilibres extérieurs liés aux Etats-Unis ?    La Tunisie en Force: 19 Médailles, Dont 7 Ors, aux Championnats Arabes d'Athlétisme    La Ligue arabe réclame une protection internationale pour les journalistes palestiniens    Classement WTA : Ons Jabeur chute à la 36e place après son élimination à Madrid    Tunisie : les réserves en devises couvrent 99 jours d'importation au 2 mai 2025    La Directrice générale de l'OIM en visite officielle en Tunisie    Syrie : Après L'Exclusion De Soulef Fawakherji, Mazen Al Natour Ecarté Du Syndicat    GAT VIE : Une belle année 2024 marquée par de bonnes performances.    La DG de l'Organisation Internationale pour les Migrations en visite en Tunisie    Houcine Rhili : amélioration des réserves en eau, mais la vigilance reste de mise    Un séisme de magnitude 4,9 secoue le nord du Chili    USA – Trump veut taxer à 100 % les films étrangers : une nouvelle offensive commerciale en marche    Kaïs Saïed réaffirme son soutien à la cause palestinienne lors d'un échange avec le Premier ministre irakien    Foire du livre de Tunis : affluence record, mais ventes en baisse    Stand de La Presse à la FILT: Capter l'émotion en direct    Un nouveau séisme frappe la Turquie    Un missile tiré depuis le Yémen s'écrase près du principal aéroport d'Israël    «Mon Pays, la braise et la brûlure», de Tahar Bekri    France : un Prince qatari se baladait à Cannes avec une montre à 600 000 €, ça a failli mal tourner    Tunisie : Découverte archéologique majeure à Sbiba (Photos)    Gymnastique rythmique : la Tunisie en lice au Championnat d'Afrique au Caire    La Liga: Le Rwanda désormais un sponsor de l'Atlético de Madrid    Nouveau communiqué du comité de l'ESS    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Nabil Karoui dénude la justice
Publié dans Business News le 31 - 05 - 2021

Notre chef du gouvernement a été bien actif ces derniers jours. Après la Libye, il est allé au Qatar. Accompagné de son ministre des Finances Ali Kooli, il a présenté la situation économique très tendue de la Tunisie post-covid quémandant, ici et là, des investissements, des dépôts d'argent voire des aides. L'attitude de notre gouvernement rappelle étrangement les mendiants des feux-rouges. Parce que le travail est épuisant, ils préfèrent faire la manche aux automobilistes et perdre leur dignité. Parce que les réformes sont douloureuses et les négociations avec les partenaires sont houleuses, le gouvernement préfère endetter les générations futures et mendier les nations prospères. Peu importe que notre dignité soit bafouée, l'essentiel est de trouver de quoi alimenter le budget onéreux de l'Etat.
La solution à notre crise économique est pourtant claire. Difficile à appliquer, certes, mais elle est claire. Le sujet a déjà été traité dans ces colonnes. Notre salut ne viendra que de notre labeur. L'Etat n'a d'autre choix viable que de céder les entreprises publiques évoluant dans les secteurs concurrentiels, de réduire son train de vie dispendieux, d'encourager les entreprises à produire mieux et à recruter plus et de pousser le Tunisien à fournir davantage d'efforts.
Sauf que Hichem Mechichi n'est pas prêt à demander des sacrifices aux Tunisiens et aux partenaires sociaux, parce qu'il croit que la partie est perdue d'avance. Exemple parmi des dizaines d'autres : que se passera-t-il si Hichem Mechichi supprime la séance unique des mois de juillet et d'août pour favoriser la productivité ? Faute de courage politique pour demander des choses impopulaires au peuple, le gouvernement (et pas que celui-là) préfère sacrifier les générations futures et faire perdre sa dignité à ce même peuple. Vive la Libye, vive le Qatar, vive la France, vivent les Etats-Unis, vive le FMI et vive tout Etat qui nous donne quelques miettes pour qu'on puisse manger et continuer notre farniente. Mais soyons cohérents svp, pressons-nous de supprimer le mot dignité de notre Constitution (art 4) et de nos dictionnaires.

Les élus de Qalb Tounes ont organisé jeudi dernier une conférence de presse pour alerter l'opinion publique sur l'injustice que subit leur président Nabil Karoui. La veille, le bureau politique du parti a tenu une réunion extraordinaire pour examiner son dossier judiciaire et conclure que la détention de M. Karoui est illégale. Comment cela ? Le bureau politique l'explique bien. Selon l'article 85 du code pénal, la période de détention préventive est limitée à six mois soit 180 jours. Elle ne peut être prolongée que si elle est renouvelée dans les délais légaux ce qui n'a pas été le cas dans l'affaire de Nabil Karoui.
Le Bureau politique considère que Nabil Karoui est détenu injustement depuis le 4 mai 2021, en dehors des délais prescrits par la loi et demande sa mise en liberté automatique sans attendre, dénonçant la poursuite du maintien illégal en détention préventive de Nabil Karoui et estimant qu'il s'agit là d'une violation flagrante de la loi. « Le président de Qalb Tounes est victime d'une machination politique par excellence derrière laquelle des parties connues œuvrent à le maintenir en prison pour l'empêcher d'exercer ses droits légitimes et de s'adonner librement à ses activités politiques», réaffirme-t-il. Le bureau entend carrément saisir la justice internationale pour dénoncer cette détention qu'ils jugent arbitraire.
A lire également
Qalb Tounes plaide la cause de Nabil Karoui devant la justice internationale

Traiter de l'affaire de Nabil Karoui est délicat pour différentes raisons. La première d'entre elles est qu'un large pan du public estime (à tort ou à raison) qu'il est coupable. Peut-être bien qu'il n'est pas détenu pour les bonnes raisons, mais il est quand même coupable. De quoi ? On n'oublie pas ses caravanes humanitaires qui lui ont servi à catapulter Qalb Tounes au-devant de la scène et obtenir quelque 416 mille voix aux législatives et 38 sièges au parlement. Lui-même, Nabil Karoui, a obtenu 525.000 voix au premier tour de la présidentielle et plus d'un million de voix au second tour. Il a également bien utilisé sa chaîne Nessma (très souvent première à l'audimat) pour ses campagnes législatives et présidentielle. Sans son association humanitaire « Khalil Tounes » et sans Nessma, Qalb Tounes et Nabil Karoui n'auraient jamais pu percer politiquement. Ceci est un fait indéniable et sa culpabilité ne fait pas l'ombre d'un doute.
Sauf que Nabil Karoui n'est pas détenu dans ces deux affaires. Il n'est même pas poursuivi d'ailleurs. Nabil Karoui est suspecté de blanchiment d'argent et de fraude fiscale et c'est pour cela qu'il a été emprisonné, une première fois, en 2019 en pleine campagne électorale et c'est pour cela qu'il a été emprisonné, une deuxième fois, depuis le 24 décembre 2020. Si sa première arrestation était des plus suspicieuses, et sentait à plein nez le règlement de comptes politique, il n'en est pas de même pour sa seconde arrestation faite sur la base d'un rapport d'expertise commandé par le juge d'instruction. Un rapport dont l'intégrité est remise en doute par son comité de défense, ainsi que par ses amis (et anciens ennemis) d'Ennahdha et d'Al Karama qui croient dur comme fer en l'innocence de M. Karoui estimant que c'est un détenu politique.

A Business News, nous avons élevé le principe de justice au-dessus de tous les autres. Nous croyons sincèrement, à tort ou à raison, que la justice est la base de tout. Nous croyons dur comme fer que sans justice, il ne saurait y avoir de prospérité, ni même de société. Sans justice, c'est la jungle.
C'est pour cela que nous étions à contre-courant des tendances de beaucoup de « révolutionnaires » qui appelaient, en 2011, à mettre les caciques de l'ancien régime en prison, quel que soit le degré de leur culpabilité. C'est pour cela que nous étions totalement contre l'esprit revanchard et transactionnel de Sihem Ben Sedrine, présidente partisane de l'Instance Vérité et Dignité.
Ce principe de justice est appliqué dans un grand nombre de démocraties et c'est ce qui a permis à ces démocraties de devenir de grands pays prospères.
Ce principe de justice est clairement établi dans notre constitution à travers plusieurs articles.

Quand on voit le dossier de Nabil Karoui, et quelle que soit notre conviction quant à sa culpabilité ou pas, on constate qu'il y a un viol manifeste de six articles de cette constitution.
« Les citoyens sont égaux devant la loi sans discrimination » (art 21). « L'Etat interdit la torture morale » (art 23). « Tout inculpé est présumé innocent jusqu'à l'établissement de sa culpabilité, au cours d'un procès équitable qui lui assure toutes les garanties nécessaires à sa défense en cours de poursuite et lors du procès » (art 27). « La durée de l'arrestation ou de la détention est fixée par la loi » (art 29). « L'Etat veille à la diffusion de la culture des Droits de l'Homme » (art 39). « Les instances juridictionnelles assurent la protection des droits et libertés contre toute atteinte » (art 49).
Il y a un autre principe de justice, non inscrit dans notre constitution, auquel nous croyons qui dit que la détention doit rester l'exception et que la liberté doit être la règle.
Supposons que Nabil Karoui soit réellement acteur des crimes financiers qui lui sont reprochés, il n'en demeure pas moins innocent jusqu'à son procès (art 27 de la constitution).
Supposons que Nabil Karoui ne soit pas un acteur politique, aurait-il été maintenu en prison ? Jusqu'à nouvel ordre, on n'a pas entendu parler de personnes condamnées à de la prison ferme pour fraude fiscale, ce qui laisse suggérer que le patron de Qalb Tounes est en prison juste parce qu'il est un homme politique. Or l'article 21 de la constitution exige que les citoyens soient égaux devant la loi.
Et notre loi est claire, en son article 85 du code pénal, la détention provisoire ne saurait dépasser les six mois sauf prolongation par le juge d'instruction (deux fois quatre mois). Or le juge chargé du dossier de Nabil Karoui n'a pas prolongé la détention du prévenu. Il y a là une violation de l'article 29 de la constitution.

Quand autant d'articles de la constitution sont violés dans un seul dossier et, je le répète, quel que soit notre degré de conviction quant à la culpabilité ou pas de Nabil Karoui, il faut appuyer sur le frein. Ce n'est pas possible de continuer comme ça.
L'arrestation de Nabil Karoui en 2019 était motivée par des raisons politiques et on a présenté suffisamment de preuves, à l'époque, pour attester ce fait. Il y avait la main indéniable de son adversaire politique de l'époque, Youssef Chahed, alors chef du gouvernement.
Son arrestation de 2020 pouvait être acceptée moralement, car le juge possède, peut-être, des éléments l'autorisant à mettre au trou Nabil Karoui. Les dénégations de son comité de défense devaient rester inaudibles et ne doivent pas remettre en doute l'intégrité du juge. Les rumeurs attestant que c'est le président de la République qui est derrière sa deuxième arrestation devaient également rester inaudibles et ne pas remettre en doute notre confiance en la justice.
Il se trouve maintenant que l'on a dépassé ce stade, puisque les délais légaux de détention sont dépassés. Ce dépassement de délai et cette arrestation devenue arbitraire et illégale, remettent en question tout le dossier, voire toute l'instruction.
Si la justice s'autorise à garder une personnalité publique, chef de parti politique, au-delà de sa durée de détention illégale, qu'est-ce qu'elle ferait avec les citoyens lambda sans défense ?

Depuis 2011 on ne cesse de parler de l'expérience démocratique tunisienne, or il ne saurait y avoir de démocratie sans justice indépendante qui applique strictement les textes de loi. Un abus de pouvoir, une violation de la loi, mettent à mal cette démocratie et rendrait le pays similaire à un Etat bananier. Techniquement, et à cause de l'affaire de Nabil Karoui, on en est là maintenant ! Nous avons une justice qui viole la loi et viole des textes de la constitution ce qui est indigne d'une démocratie qui se respecte.
Quelle différence y a-t-il entre l'ancien régime et l'actuel si on s'amuse à frauder impunément dans les élections et à utiliser la justice à des fins politiques ? On a beau parler de démocratie et de révolution, les faits sont là et ils sont têtus. Les partis trichent, les hommes politiques fraudent, la justice est aux ordres. Quand on voit le traitement judiciaire du dossier Nabil Karoui, on se dit que finalement il n'y a rien de réformé dans ce pays, les pratiques sont les mêmes, juste les acteurs ont changé.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.