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Kaïs Saïed : deux ans qu'il lutte contre les spéculateurs et toujours sans résultat
Publié dans Business News le 16 - 08 - 2023

Si le président de la République a un dada, c'est bel et bien celui des spéculateurs. Depuis son putsch en juillet 2021, et régulièrement, il convoque des ministres ou effectue des visites inopinées pour parler de sa guerre contre les spéculateurs qu'il entend « traquer où qu'ils soient, même en dessous de la terre et qu'il va croiser le fer avec le fer ». Deux ans de lutte sans résultat tangible.

Cinq, dix, quinze, cent, deux cents ? On ne compte plus les communiqués présidentiels parlant de spéculation et de saisie de marchandises à l'origine non identifiée.
Les derniers en date sont ceux du mardi 15 août 2023 à 20h25 et mercredi 16 août à 0h36. Dans le premier communiqué, on lit que le président de la République a réuni le chef du gouvernement, le ministre de l'Intérieur, la ministre du Commerce, le DG de la Sécurité nationale et le commandant de la Garde nationale pour leur parler de « la campagne de contrôle menée, hier, dans plusieurs minoteries, ayant conduit à la découverte de plusieurs spéculateurs qui seraient derrière la crise provoquée des céréales ». Dans le second communiqué, la présidence parle de saisie de 6528 tonnes de 6528 tonnes de marchandises compensées, notamment de la farine, du blé et du sel.
Ces communiqués viennent à la suite de la pénurie de pain observée ces trois dernières semaines partout dans le pays. Pour le président de la République, les coupables sont identifiés et ils sont toujours les mêmes depuis deux ans : les spéculateurs.
C'est une idée arrêtée chez lui et elle date d'août 2021. Que cette accusation soit récurrente et qu'il publie des dizaines de communiqués pour parler de sa guerre contre la spéculation, ne semble pas le déranger et ne remet aucunement en doute son idée arrêtée. Pourtant, force est de constater qu'après deux ans de lutte acharnée, il n'y a toujours pas de résultat. Il y a toujours des pénuries, il y a toujours de l'inflation et les forces de l'Etat n'ont toujours pas eu gain de cause de ces « méchants spéculateurs qui affament le peuple ».

Mercredi 11 août 2021, Kaïs Saïed se rend aux centres de réfrigération des produits agricoles situés à Tebourba et Jedaïda, au gouvernorat de la Manouba.
« Je suis venu inspecter les circuits d'affamement… C'en est fini de ces circuits qui ont été créés pour affamer le peuple tunisien », a-t-il martelé critiquant ainsi les politiques de distribution des produits agricoles. La présidence de la République a fièrement exhibé une vidéo montrant le chef de l'Etat accompagné d'un ouvrier tenant un pied-de-biche et prenant d'assaut les centres de réfrigération.
Vendredi 20 août 2021, il se rend à une société de vente de matériaux de construction à Fouchana, (Gouvernorat de Ben Arous), pour inspecter les canaux de distribution.
Très en colère, il a assuré qu'il n'y aurait aucune tolérance envers ceux qui monopolisent les marchandises et les produits pour maitriser l'approvisionnement du marché et augmenter les prix.
Il limoge dans la foulée de cette visite le gouverneur de Ben Arous. Le communiqué présidentiel est accompagné d'une vidéo où l'on voit un long cortège de voitures, des milliers de flashs de caméra et un bon discours bien préparé. L'opération de com' est réussie.
Samedi 28 août 2021, il se rend à la région de Bir Mecherga au gouvernorat de Zaghaoun, après la saisie de près de trente mille tonnes de fer. Il a indiqué qu'il n'y aura aucune tolérance envers ceux qui voudraient prendre le contrôle du marché et augmenter les prix, assurant qu'« il va traquer les spéculateurs où qu'ils soient, même en dessous de la terre et qu'il va croiser le fer avec le fer ».
Ici aussi, l'opération de com' est bien menée avec une vidéo montrant un plan aérien filmé par drone, survolant le cortège présidentiel, une ambiance sombre et discours populiste motivant !
Ce que ne dira pas, par la suite, la présidence de la République c'est que les trente mille tonnes de fer saisies étaient, en plus d'être légalement enregistrées et déclarées auprès des autorités nationales, en partie propriété de l'Etat tunisien et en partie destinées à l'export vers la Libye. Et il ne peut pas y avoir d'augmentations de prix puisque ceux-ci étaient fixés par le ministère du Commerce et non soumis à la loi de l'offre et de la demande.
Mardi 8 mars 2022 à 23 heures, depuis le ministère de l'Intérieur, le président de la République prononce un long monologue dans lequel il ordonne aux forces de l'ordre de lancer la guerre contre les spéculateurs. S'ensuite une bonne campagne de descentes policières musclées sur des entrepôts légaux et informels accompagnées de saisies fièrement brandies par les ministères de l'Intérieur et du Commerce.
Lundi 21 mars 2022, un décret présidentiel est publié relatif à la lutte contre la spéculation. Un décret plagié sur une loi algérienne, soit dit en passant. Ce décret prévoit des peines jusqu'à la perpétuité les spéculateurs.
Outre les visites inopinées, les déclarations colériques et les décisions iniques, le président de la République a convoqué des dizaines de fois sa cheffe du gouvernement Najla Bouden et sa ministre du Commerce Fadhila Rabhi pour leur parler de spéculation. Les deux femmes ont été limogées depuis par le biais de simples communiqués expéditifs. Leurs successeurs Ahmed Hachani et Kalthoum Ben Rejeb ont, à leur tour, été convoqués à plusieurs reprises pour leur parler du même sujet, encore et toujours, la spéculation et la guerre contre les spéculateurs.
Cette spéculation touche l'ensemble des produits, cela va des médicaments à la semoule et la farine en passant par l'eau minérale, le lait, les fruits, les légumes et les matériaux de construction. Tout est spéculation. L'inflation c'est à cause de la spéculation, les pénuries c'est à cause de la spéculation, l'enrichissement illicite est grâce à la spéculation.

Deux ans après des dizaines de réunions, de nombreuses visites et un décret des plus répressifs dans l'Histoire de la Tunisie, le constat est toujours là, les Tunisiens subissent encore les pénuries et l'inflation. En face, le président de la République n'a qu'un seul et unique mot en bouche, les spéculateurs.
À force d'en parler, cela devient barbant et, surtout, incrédible.
Si l'accusation du président de la République est justifiée, cela mène à la conclusion qu'il a totalement échoué contre ce fléau de la spéculation et ces mafias et cartels de spéculateurs, comme il les définit. On ne peut pas mener de guerre pendant deux ans, en usant de tous les moyens de l'Etat sans parvenir à un résultat tangible. On ne peut pas mobiliser tous ces moyens sans arrêter ces « méchants spéculateurs », bien identifiés et connus, selon les propres termes du président de la République.
Pire, il y a carrément un effet boomerang à cette véritable fausse guerre contre les hypothétiques spéculateurs. Industriels, grossistes et intermédiaires ont désormais peur des descentes policières ou celles du ministère du Commerce évitent désormais le stockage des produits. Ceci a fortement perturbé les circuits de distribution et d'approvisionnement classiques, ce qui a engendré des pénuries et de l'inflation. Ceci a aussi engendré des injustices avec des saisies abusives réalisées juste pour faire du chiffre.

S'il y a un point commun entre toutes les pénuries observées depuis deux ans, ce ne sont pas les spéculateurs, mais l'Etat. Kaïs Saïed a beau les accuser de tous les maux du pays, c'est lui et uniquement lui le premier responsable.
Ce que Kaïs Saïed n'a jamais dit dans ses dizaines d'interventions sur le sujet, c'est que l'Etat n'a pas rempli ses engagements envers les fournisseurs, tunisiens et étrangers et a du mal à les payer. C'est le cas pour les médicaments, pour le blé et la farine et c'était le cas pour le lait. On ne peut pas spéculer sur un produit dont l'importation et la distribution sont le monopole de l'Etat.
Il ne peut pas, non plus, y avoir d'enrichissement illicite dans le commerce de ces produits, vu que les prix sont fixés par l'Etat qui ne laisse que très peu de marge aux intervenants.
Kaïs Saïed est parfaitement conscient que le problème est au niveau de l'Etat et c'est pour cela qu'il a limogé la ministre du Commerce, le ministre de l'Agriculture et, la semaine dernière, le PDG de l'Office des céréales. Sauf qu'il n'a jamais admis cela publiquement.
Devant son public, à qui on fait croire tout et n'importe quoi, Kaïs Saïed préfère « mâcher le chewing-gum » de la spéculation et des « méchants spéculateurs ».
Cette théorie du complot lui est très chère et elle est confortable pour l'esprit de ses partisans et le sien. Dire aux Tunisiens que le véritable problème est cet Etat défaillant et déficitaire est discréditant à ses yeux. Imposer une politique d'austérité, pour un certain nombre d'années, afin de résoudre définitivement les problèmes est impopulaire.
Plutôt que d'attaquer le taureau par les cornes, Kaïs Saïed louvoie et évoque la théorie du complot avec les méchants riches d'un côté et les citoyens appauvris de l'autre.
Peu importe qu'il répète la même chose depuis deux ans, peu importe qu'il n'obtienne pas de résultats tangibles depuis deux ans, l'essentiel est que ses histoires endormissent les gogos. À ses yeux, c'est là le vrai résultat.


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