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Le scandale de l'argent détourné d'Al Karama Holding
Publié dans Business News le 08 - 12 - 2023

Dans la ligne de mire du président de la République, Al Karama Holding était censée enrichir l'Etat en lui versant les revenus provenant de la cession des entreprises confisquées au lendemain de la révolution de 2011. Onze ans après sa création, il s'avère que les dirigeants de la holding ont préféré se servir d'abord.

Des sociétés en faillite, des salariés non payés, d'autres licenciés sans aucune indemnité, le bilan d'Al Karama Holding n'est pas en demi-teinte, il est désastreux.
L'Etat a chargé cette holding en 2012 de céder toutes les sociétés confisquées pour son propre compte ou le compte de l'Etat. 22 sociétés ou groupes de sociétés confisquées se sont retrouvées du jour au lendemain dans son portefeuille.
Théoriquement, ces sociétés confisquées appartenaient aux symboles de la corruption de l'ancien régime de Ben Ali. Partant, Al Karama Holding se devait d'être un modèle de la bonne gouvernance afin de montrer aux Tunisiens que le pays a vraiment tourné la page de la corruption et de la mauvaise gestion.
Onze ans après, Al Karama Holding présente toutes les preuves que rien n'a changé dans le pays, que la mauvaise gouvernance est la règle. Pire, depuis le jeudi 7 décembre 2023, les Tunisiens découvrent que les gestionnaires de la holding se sont octroyés des salaires mirobolants, appliquant à la lettre le dicton tunisien : « ما تصح الصدقة إلا ما يتززاو مالّي الدّار » (L'aumône n'est viable que si les habitants de la maison se servent d'abord).
En recevant sa ministre de la Justice, Leïla Jaffel, le président de la République a étalé publiquement les largesses auto-octroyées par les dirigeants de la Holding qui détournaient, bien entendu, les revenus des ventes pour se servir.
D'après Kaïs Saïed, l'un des dirigeants d'Al Karama Holding bénéficiait de cinq voitures de fonction, outre les 1500 litres de carburant mensuels (valeur 45450 dinars par an). L'un des magistrats contractuels, recruté, recevait 462 mille dinars par an. D'autres dirigeants recevaient, eux aussi, des sommes énormes par an, notamment, 155,910 mille dinars, 97,669 mille dinars, 113 mille dinars, 138 mille dinars, 105 mille dinars, 146 mille dinars, 164 mille dinars…
Toujours d'après le président de la République, la holding a affecté dans la rubrique « charges diverses » quelque 387 mille dinars. Rien qu'avec cette rubrique, il y a de quoi alerter le Pôle judiciaire financier. Jamais au grand jamais, un juge tunisien, ni le fisc, n'aurait accepté de laisser un tel montant passer dans cette rubrique fourre-tout où l'on ne peut pas savoir comment l'argent a-t-il été dépensé.

Ces chiffres sont-ils exacts ? La holding n'a pas encore réagi aux propos présidentiels et on doute fort qu'elle réagisse. Ce n'est pas dans les habitudes de ses dirigeants de communiquer et ils sont loin, très loin, d'être des chantres de la transparence.
Pour comprendre ces chiffres, il faut les contextualiser. Si les salaires de certains (et assez rares) dirigeants du secteur privé sont bien de cet ordre de grandeur, il n'en est rien dans le secteur public où le salaire d'un ministre dépasse à peine les quatre mille dinars, alors que celui d'un haut fonctionnaire à la fin de sa carrière peine à atteindre les trois mille dinars. Des exceptions existent, notamment pour les banques publiques ou les sociétés publiques cotées en bourse, mais elles demeurent des exceptions. Le salaire médian dans le secteur public tourne autour de 1500 dinars et le salaire moyen tourne autour de mille dinars.
Kaïs Saïed évoque le salaire d'un magistrat recruté par la holding qui recevait 462 mille dinars par an, soit 38.500 dinars par mois. On ignore s'il parle en brut ou en net, mais il est bon de rappeler que les salaires des magistrats en Tunisie tournent autour de trois mille dinars et il faut attendre la fin de carrière pour atteindre les quatre mille dinars.
Pour ce qui est des bons de carburant, les dirigeants d'entreprises publiques et privées en reçoivent mensuellement, mais généralement les bons sont de l'ordre de deux cents litres par an. Soit 7,5 fois moins que ce que recevait ce dirigeant d'Al Karama dont parle le chef de l'Etat. En supposant que sa voiture consomme dix litres aux cent kilomètres, ce dirigeant devait parcourir quinze mille kilomètres par mois (500 kilomètres par jour) pour épuiser ses bons. Sachant que l'essentiel des activités se fait à Tunis, il est impossible de consommer chaque mois tous ces bons d'essence.
Pour ce qui est des cinq voitures à disposition, dont parle le chef de l'Etat, il est bon de noter que les dirigeants des entreprises privées et des entreprises publiques n'ont droit qu'à une voiture de fonction. Seuls les ministres ont droit à deux véhicules.
En clair, et si l'on prend les propos présidentiels pour de l'argent comptant, les dirigeants d'Al Karama Holding géraient la société publique comme si elle était leur propriété privée. Aussi discutable que peut être ce choix, il n'y aurait rien eu à dire si ces dirigeants brillaient par leur efficacité. Or, il n'en est rien. Mohamed Ali Chekir, Mohamed Bichiou, Abdelkader Zgolli, Adel Grar et Sami Ben Jemaa, les directeurs généraux qui se sont succédés à la tête de la holding, n'ont brillé ni par leur efficacité, ni par leur transparence. Ils brillaient même parfois, par la violation des lois en vigueur, comme on l'a vu dans la cession (non conclue) de Shems FM sans le passage obligatoire par l'autorité de régulation la Haica.
En matière de transparence, Al Karama Holding n'a jamais publié ses résultats annuels, les fruits de ses ventes ou la situation des entreprises qui sont à charge. Son site web est pauvre, très pauvre.
En matière de gestion, les scandales ne s'arrêtent pas. Alors que les dirigeants d'Al Karama touchaient des salaires par dizaines de milliers de dinars, les employés des entreprises dont ils sont en charge cumulent les retards de salaire. C'est le cas de ceux de Shems FM. Pire, il y a ceux qui sont carrément restés sans salaire pendant des mois et ont dû aller chercher un travail ailleurs, voire émigrer à l'étranger, sans pour autant récupérer leurs milliers de dinars de dus. C'est le cas des salariés de Cactus Prod.
Quant aux ventes des entreprises confisquées, Al Karama Holding explique à peine le processus suivi et communique rarement les prix de vente. À plusieurs reprises, les montants sont fuités par les médias. Al Karama fait systématiquement signer des clauses de confidentialité aux acquéreurs pour empêcher le dévoilement au public du prix de la vente.
Parfois, quand par hasard on apprend le prix de la vente, on découvre que la cession s'est faite à un prix dérisoire, bien inférieur à la valeur réelle du bien, comme c'est le cas de Mosaïque FM.
Pour ce cas particulier de Mosaïque FM, il est bon de rappeler que le prix de cession dépasse à peine son chiffre d'affaires annuel et que la vente a eu lieu alors que le gérant-fondateur et actionnaire principal était en prison.
Cette absence totale de transparence des dirigeants d'Al Karama jette clairement le doute sur la gestion et la gouvernance de la holding. Avec ses révélations du jeudi 7 décembre, Kaïs Saïed est venu donner une preuve à ce que l'on craignait déjà.
Après la sortie présidentielle, verra-t-on ces dirigeants passer devant un juge pour mauvaise gestion ? C'est très probable puisque le chef de l'Etat a mis dans sa ligne de mire, depuis quelques mois, tous les chefs d'entreprises suspects de corruption ou de malversation.
Kaïs Saïed est déjà impitoyable avec ceux du privé, il est plus que probable qu'il le sera davantage avec ceux qui dirigent les entreprises publiques, car il s'agit de l'argent du peuple, comme il dit. Une instruction judiciaire est déjà ouverte, d'après les informations de Business News.
En outre, et avant même qu'un juge instruise le dossier d'Al Karama, on sait que Adel Grar est cité dans une autre affaire de blanchiment d'argent dans laquelle est détenu le publiciste Riad Ben Fadhel.


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