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Le « Massar » : itinéraire d'un naufrage
Publié dans Business News le 01 - 05 - 2025

Imaginez un peuple accablé par la misère, privé d'un accès décent aux transports en commun, dépourvu d'infrastructures hospitalières dignes de ce nom, et exclu d'un système éducatif juste et équitable. Un peuple contraint de survivre sous le joug d'une médiocratie âpre, dans un climat politique étouffant, sous une gouvernance autoritaire qui l'a dépouillé de sa dignité la plus élémentaire. Et pourtant, malgré plus de quatre années d'oppression, ce peuple continue de vénérer son bourreau. En dépit de la détérioration manifeste de toutes les dimensions de sa vie quotidienne, non seulement il s'abstient de toute rébellion contre son tyran, mais il va jusqu'à persécuter férocement celles et ceux qui osent s'opposer à lui.
Les enfants ont été engloutis par les ravins, les jeunes ensevelis sous les décombres, les parents ont péri dans les ascenseurs défaillants des hôpitaux, et les aïeux peinent à survivre avec des pensions dérisoires. Et pourtant, bien peu semblent disposés à questionner la responsabilité d'un chef d'Etat dont l'exercice solitaire du pouvoir évoque les travers d'un autoritarisme rampant. Ses opposants, caricaturés par l'Etat en traîtres et complotistes prétendument complices de la misère populaire, sont les premiers à être vilipendés par une population façonnée par les artisans de la propagande du « Massar ».

Une opposition diabolisée, un peuple anesthésié
Puis viennent les antagonistes fantasmés, ennemis fictifs tant nationaux qu'étrangers, que le quasi-prophète tunisien désigne comme obstacles à son grand dessein de « rédemption » planétaire. Ce délire de sacralisation pousse jusqu'à la diabolisation des ministres qu'il a lui-même choisis, ainsi que de tous les membres de son entourage soupçonnés de conspirer contre sa personne. Une telle fable, dépeignant une Tunisie réduite à un héros solitaire luttant vaillamment contre une cohorte de « méchants », ternit le prestige de la Révolution du jasmin et insulte l'intelligence du peuple tunisien.
Qu'un homme au pouvoir qualifie ses opposants de « cellules cancéreuses » à éradiquer par la chimiothérapie ne scandalise personne. Pourtant, lorsqu'un avocat dénonce les pressions exercées sur les juges dans les affaires politiques, ses propos sont déformés, sortis de leur contexte, puis instrumentalisés comme menaces pour justifier son arrestation. Sous prétexte de protéger l'ordre judiciaire, l'avocat Ahmed Souab a été accusé de terrorisme et incarcéré, pour avoir défendu l'indépendance de la justice, pour avoir osé lever sa voix contre l'iniquité. Il convient de rappeler que si proférer des menaces contre un juge relève du terrorisme, alors la véritable terreur réside dans les déclarations affirmant : « Quiconque les innocente est leur complice. »

Une justice répressive et un silence complice
Voir les menottes aux poignets de maître Ahmed Souab, accompagnées des acclamations dans les commentaires, voir les centaines de personnes ignorant tout de l'homme, se réjouissant de sa détention — un malheur qui semble venir les réconforter dans leur misère quotidienne — fut un spectacle glaçant mais familier. Ce sont ces réactions malsaines devenues habituelles dont nous sommes témoins qui doivent nous alarmer. Quand est-ce que le Tunisien a perdu sa raison, sa lucidité, son bon jugement, sa compassion, son empathie, sa sensibilité, tout ce qui fait son humanité ?
Certains diront que ce sont des cas isolés, que les commentaires sur les réseaux sont le fruit de comptes fictifs de personnes inexistantes. Peut-être ! Les Tunisiens peuvent être désintéressés des politiciens, des journalistes, des avocats et ne sont même pas à jour quant aux massacres judiciaires quotidiens. Mais cette même inhumanité et agressivité, peintes dans les commentaires, se retrouvent dans les discours haineux et racistes à l'encontre des réfugiés et personnes en situation irrégulière issus de différents pays de l'Afrique subsaharienne. Entre chasse à l'Homme, mépris, agressions, torture, tout est permis par un Etat complice et une société où des formes de racisme se sont banalisées. Cette hostilité à l'égard de ceux qui sont différents est la seule constante que nous pouvons observer chez un bon nombre de Tunisiens. Le sujet de l'aversion diffère, mais le phénomène est le même.

L'ultime défaite : perdre notre humanité
Ce peuple n'a pas toujours été ainsi. Un discours politique répétitif et anxiogène a peu à peu émoussé l'esprit de tolérance chez un peuple qui ne sait plus distinguer entre justice et vengeance, entre opinion et calomnie, entre patriotisme et xénophobie. Et comment pourrait-il évoluer autrement, lorsque les médias se plient docilement aux injonctions d'un pouvoir dont les mots divisent plus qu'ils ne rassemblent ?
Ce peuple qui chantait « Dégage ! » brandit aujourd'hui les chaînes qu'il avait brisées. Ce rêve de dignité s'est transformé en cauchemar de soumission. La Tunisie a-t-elle perdu sa boussole politique ainsi que son âme ? Ou bien au contraire : pouvons-nous espérer qu'il soit encore temps de redevenir humains ? Est-il encore temps d'apprendre à s'indigner de l'injustice, même quand elle ne nous frappe pas directement ? Est-il encore temps de reconnaître en l'autre, qu'il soit réfugié, avocat, opposant ou simple citoyen, un frère, un semblable ? Car si nous perdons cela, alors nous sommes déjà morts, collectivement.


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