L'avocat Abdorahman Hassen Chouchane a rendu visite, mercredi 16 juillet 2025, à l'ancien ministre et prisonnier politique Ghazi Chaouachi, incarcéré à la prison d'Ennadhour. Cette visite intervient au lendemain des révélations de son fils, Elyes Chaouachi, faisant état d'une opération chirurgicale subie par son père à l'hôpital Bougatfa de Bizerte, dans des conditions particulièrement préoccupantes. Dans un post publié mardi sur Facebook, Elyes Chaouachi affirmait que son père avait été opéré à l'estomac, passé la nuit menotté à l'hôpital, sans qu'aucun membre de sa famille ni de ses avocats n'en ait été informé au préalable. Il dénonçait une situation « sans humanité », où la procédure médicale s'est déroulée « sous surveillance sécuritaire ». Des propos confirmés et étoffés par Me Chouchane. Ce dernier assure que l'intervention médicale a été réalisée à la demande du détenu, dans le cadre d'un suivi de santé, mais avec une gravité telle qu'elle a nécessité une anesthésie générale. Plus encore, il affirme que Ghazi Chaouachi a été contraint de signer un document dégageant l'établissement médical de toute responsabilité en cas de complications ou de décès. « Ce type d'intervention, compte tenu de ses risques, ne peut, dans aucun Etat respectueux des droits humains, avoir lieu sans informer au préalable les proches du détenu », insiste l'avocat.
Pour Me Chouchane, ces pratiques s'apparentent à de nouvelles formes de maltraitance. « Ce qui se passe aujourd'hui dans notre pays – transferts de prisonniers politiques ou de droit commun sans avertir leurs familles ni avocats, incarcération dans des prisons aux côtés de détenus dangereux, interventions médicales sans consentement éclairé de l'entourage – relève de l'intimidation et du traitement cruel, voire de la torture », dénonce-t-il. L'avocat va plus loin en pointant une volonté délibérée d'humilier Ghazi Chaouachi, figure politique de premier plan, ancien ministre des Domaines de l'Etat et ancien secrétaire général du parti Attayar, condamné à 18 ans de prison dans le cadre de l'affaire dite de « complot contre la sûreté de l'Etat ». Il rappelle que Ghazi Chaouachi a été ministre sous la présidence de Kaïs Saïed dans le gouvernement Elyes Fakhfakh, soulignant l'ironie de sa situation actuelle. Il s'interroge : « Que se serait-il passé si Ghazi Chaouachi ne s'était pas réveillé après l'anesthésie ? Ou si son état de santé s'était détérioré durant la nuit, seul, inconscient, dans un hôpital délabré ? ». Selon ses dires, le prisonnier politique a lui-même qualifié les conditions de l'hôpital Bougatfa de « catastrophiques ». Il y voit un symbole de l'effondrement du système de santé public, au-delà de sa propre situation.
L'avocat a par ailleurs adressé ses remerciements à Laroussi Zguir, président de la section régionale de l'Ordre des avocats à Tunis, pour avoir insisté sur l'importance de cette visite malgré son éloignement géographique. Il en a profité pour lancer une attaque frontale contre le bâtonnier Hatem Mziou – dont le mandat arrive à terme – l'accusant d'avoir trahi les valeurs de la profession en se mettant au service du pouvoir exécutif. Enfin, Me Chouchane met en garde contre les dérives actuelles du régime. « Ce système invente des formes inédites de répression contre les opposants et leurs familles. Ce ne sont pas des actes isolés, ce sont des méthodes », affirme-t-il, avant de conclure : « L'histoire nous enseigne que l'injustice ne dure jamais. Ceux qui abusent du pouvoir finissent toujours par en payer le prix ».