En ce 25 juillet 2025, la Tunisie célèbre le 68e anniversaire de la proclamation de la République. Mais pour la Ligue tunisienne des droits de l'Homme (LTDH), cette date ne peut être l'occasion de festivités. La LTDH appelle, en effet, à une introspection nationale sur les promesses non tenues de liberté, de dignité et d'égalité. Dans un communiqué publié ce vendredi, la LTDH affirme que la République, née le 25 juillet 1957 pour mettre fin au régime monarchique, s'est rapidement construite sur un système autoritaire, centralisé, réduisant les citoyennes et citoyens à un rôle passif et marginalisant les régions intérieures ainsi que les couches populaires. Derrière les discours sur la justice sociale, les droits économiques et sociaux n'ont cessé d'être différés, étouffés par des politiques injustes, aggravant pauvreté, chômage et disparités régionales.
La Ligue s'inquiète particulièrement des évolutions postérieures au 25 juillet 2021, date marquant le tournant pris par le président Kaïs Saïed. Depuis, note-t-elle, la crise politique s'est intensifiée, la Constitution de 2014 – garantissant droits fondamentaux et participation des femmes – a été écartée, et les pouvoirs ont été concentrés entre les mains d'un seul homme. « Des signes alarmants d'un retour au pouvoir personnel que la première République prétendait abolir », avertit-elle. La LTDH dénonce une dérive autoritaire : criminalisation de l'opinion, poursuites contre syndicalistes et journalistes, répression des mouvements sociaux. « Ce verrouillage de l'espace public trahit l'essence même de la République : un cadre d'expression plurielle, de liberté et de citoyenneté active. » Elle alerte également sur une dégradation sans précédent des droits sociaux : perte de pouvoir d'achat, explosion de l'inflation, effondrement des systèmes de santé et d'éducation publics, attaques contre le droit syndical, fiscalité régressive. La Ligue rappelle que la République n'est pas un simple slogan, mais un projet politique fondé sur la citoyenneté libre, les libertés publiques et la justice sociale. Elle revendique un retour au processus démocratique, indissociable de la lutte pour les droits économiques, sociaux et culturels.
À l'occasion de cette date symbolique, elle renouvelle son engagement en faveur des libertés, appelle à la libération des prisonniers politiques et d'opinion, à l'amendement des lois répressives, et à la levée des restrictions pesant sur la société civile et les corps intermédiaires. Enfin, la LTDH exhorte toutes les forces civiles à œuvrer sincèrement pour un dialogue national refondateur, capable de porter un nouveau projet républicain. Un projet véritablement démocratique et social, rompant avec le pouvoir autoritaire, les inégalités et l'exclusion, et garantissant un espace public ouvert à la critique, à l'organisation et à la parole libre.