Coup dur pour la scène culturelle indépendante tunisienne. Les organisateurs de Jazz à Carthage – Extended Sessions 2025 annoncent, mercredi 23 juillet 2025, la suspension de leurs événements internationaux prévus cet été. Ce programme, pensé comme une prolongation estivale du prestigieux festival Jazz à Carthage, devait accueillir une sélection exigeante d'artistes de renommée internationale, dans une série de concerts ouverts sur le monde. Mais après plusieurs mois de préparation, d'engagements artistiques et de collaborations solides, le projet est contraint de s'arrêter, victime d'un environnement administratif jugé invivable. En cause, selon les initiateurs du projet : une accumulation de contraintes administratives, fiscales et réglementaires devenues insurmontables. Ils dénoncent notamment « des délais intenables, une administration imprévisible, des exigences fiscales contraires aux textes en vigueur et une absence criante de coordination entre les institutions concernées ». Autant d'entraves qui paralysent l'organisation rigoureuse et responsable d'un projet culturel indépendant, tout en décourageant les échanges internationaux. Un des éléments déclencheurs pointés du doigt est le retrait du statut d'événement culturel, un cadre jugé essentiel pour assurer une stabilité juridique et fiscale. Décision prise sans justification ni préavis, affirment-ils, et en rupture avec des pratiques établies depuis plus de vingt ans. Cette révocation a entraîné une fiscalité dissuasive, mettant en péril le modèle économique du projet et fragilisant durablement sa viabilité.
Les obstacles ne s'arrêtent pas là. Les organisateurs évoquent également des démarches « opaques et contradictoires » pour rémunérer légalement les artistes étrangers. Même avec des dossiers complets, les procédures sont décrites comme un « parcours d'obstacles kafkaïen » qui finit par décourager les collaborations artistiques internationales. Face à ce climat jugé incohérent, hostile et peu lisible, le festival suspend donc sa programmation estivale internationale, en espérant des jours meilleurs. « Nous prenons cette décision dans l'attente d'un cadre plus clair, plus équitable et conforme aux engagements publics de l'Etat tunisien », expliquent-ils, non sans ironie face aux discours officiels qui promettent de « moderniser la culture », de « soutenir l'excellence » ou encore de « faire rayonner la Tunisie ». Mais les conséquences, elles, sont bien réelles : retrait de l'initiative privée, pertes fiscales pour l'Etat, absence de collecte de droits d'auteur et affaiblissement de la scène culturelle tunisienne à l'international. « En voulant trop taxer, trop contrôler, trop entraver, c'est l'Etat lui-même qui sort perdant — sur tous les plans : culturel, économique et diplomatique », avertissent les organisateurs.
Malgré tout, les équipes de Jazz à Carthage ont choisi de publier en ligne la programmation annulée, en hommage aux artistes sélectionnés. Elles remercient chaleureusement tous les partenaires, artistes, techniciens, lieux, institutions et spectateurs qui ont soutenu le projet. Et elles l'assurent : le travail accompli ne sera pas perdu. L'engagement en faveur d'une culture libre, indépendante et équitable reste intact.