C'est au nom des jeunes de ce pays que je me permets de m'exprimer aujourd'hui. C'est au nom des rêves qui s'évanouissent, des visions porteuses d'espoir qui meurent et de l'intelligence personnelle et collective qui anime ces jeunes et qui se dissipe au quotidien. Que sommes-nous en train de leur donner comme messages, comme images ? Quelle exemplarité sommes-nous en train de leur transmettre ? Le travail, l'investissement de soi, le labeur et le sérieux sont -ils véhiculés par quelque partie que ce soit ? N'avons-nous pas entendu et répété depuis notre plus jeune âge, que l'éducation est la base de la réussite ? Que c'est une chance que d'avoir accès aux études et au savoir ? Que celui qui a une tête pleine pourrai changer le monde ? Or, qu'en est-il de notre réalité aujourd'hui ?
L'éducation et l'enseignement qui constituaient le principal moteur de l'ascenseur social, qui a élevé des générations et permis de bâtir ce pays, se meurent depuis des décennies. Les diplômes se dévalorisent et nos élites, devenues minimes en nombre, partent pour ne plus revenir faute d'écosystème favorable à la construction et à l'épanouissement. Pire encore, car depuis la rage qui a pris le syndicat de l'enseignement secondaire, nos enfants n'étudient plus, ne reçoivent plus leurs évaluations et maintenant, ne passent plus des examens ! Comment voudriez-vous que ça avance, qu'ils continuent à y croire, qu'ils s'investissent et persévèrent ?
Vous enfoncez chaque jour un nouveau clou dans leurs chairs si jeunes encore, vous leur faites avorter leurs ambitions et vous achevez leurs carrières à peine échafaudées. Dans le pays où la liberté et la démocratie riment avec désordre et gabegie, ne vous étonnez pas que les êtres vulnérables que vous pensez maitriser, vous fassent volteface. Le droit à la grève est certes constitutionnel, mais le droit à l'éducation est un devoir et un droit humain suprême.
Continuez à détruire tout ce qui est beau dans ce pays, faites que le quotidien de ces jeunes ressemble à un enfer, diffusez le manque de valeurs, l'égoïsme, les combines et le népotisme et nous cueillerons tous le désarroi et les lamentations. Je lance ce cri et j'espère que nous agirons de suite, pour que ce trésor de jeunesse que nous avons, reste ou revienne pour reconstruire une Tunisie meilleure, prospère et porteuse de valeurs. Une Tunisie que nous avons tous rêvée un 14 Janvier 2011. Réveillez-vous, redressez-vous nobles gens de l'éducation et de tous les secteurs de ce pays : nous agonisons mais nos jeunes se meurent.
*Sana Fathallah GHENIMA : Femme d'affaires, militante, membre du comité d'organisation du congrès de Nidaa Tounes