Résultats du bac : les filles décrochent les meilleurs taux de réussite    À partir du 1er juillet : des amendes jusqu'à 50 000 D pour les factures papier    3,7 millions de tonnes par an : la production maraîchère tient malgré la baisse des surfaces    Décision finale attendue en Iran sur une fermeture du détroit d'Ormuz    Marathon de la construction et de l'édification : une course qui fait courir… les moqueries    Exportation de 34,152 mille tonnes de produits agricoles biologiques au cours des 5 premiers mois de 2025    Bac 2025 : Sfax en tête des taux de réussite à l'échelle nationale    Tunis : Des radars automatiques seront installés aux points noirs    La Banque mondiale alerte sur la chute historique des IDE vers les pays en développement    Tirs de missiles iraniens sur l'entité sioniste : Des dizaines de blessés et d'importants dégâts    Contrebande : Plus de 900 mille dinars de produits saisis dans le sud tunisien    La Chine devrait faire preuve de résilience face aux chocs du commerce mondial    Décès d'Ahmed Habbassi, premier ambassadeur de Tunisie en Palestine    Coupe du monde des clubs – L'EST s'impose face à Los Angeles FC : La copie parfaite !    Espérance – Chelsea : Un duel décisif en préparation à Détroit    À Istanbul, Nafti condamne l'agression contre l'Iran et appelle à une mobilisation islamique unie    Dar Husseïn: Histoire politique et architecturale    Les Etats-Unis bombardent trois sites nucléaires iraniens    Lancement d'une plateforme numérique dédiée au suivi de l'avancement de la réalisation des projets publics    Sonia Dahmani, sa codétenue harceleuse transférée… mais pas avant le vol de ses affaires    Foot – Coupe du monde des clubs (3e J-Gr:D)- ES Tunis : Belaïli absent contre Chelsea    Les lauréats du baccalauréat 2025 à l'échelle nationale    L'homme de culture Mohamed Hichem Bougamra s'est éteint à l'âge de 84 ans    Ce qu'on écrase, ce qui tient debout    Alerte rouge sur les côtes de Monastir : des poissons morts détectés !    Baccalauréat 2025 : un taux de réussite global de 37,08%    La Tunisie signe un accord de 6,5 millions d'euros avec l'Italie pour la formation professionnelle    La poétesse tunisienne Hanen Marouani au Marché de la Poésie 2025    Le ministre du Tourisme : La formation dans les métiers du tourisme attire de plus en plus de jeunes    « J'aimerais voir l'obscurité » : la nuit confisquée de Khayam Turki    Accès gratuit aux musées militaires ce dimanche    La Ministre des Finances : « Nous veillons à ce que le projet de loi de finances 2026 soit en harmonie avec le plan de développement 2026-2030 »    Décès d'un jeune Tunisien en Suède : le ministère des Affaires étrangères suit l'enquête de près    69e anniversaire de la création de l'armée nationale : Une occasion pour rapprocher l'institution militaire du citoyen    Face au chaos du monde : quel rôle pour les intellectuels ?    Festival arabe de la radio et de la télévision 2025 du 23 au 25 juin, entre Tunis et Hammamet    Ons Jabeur battue au tournoi de Berlin en single, demeure l'espoir d'une finale en double    WTA Berlin Quart de finale : Ons Jabeur s'incline face à Markéta Vondroušová    Caravane Soumoud de retour à Tunis : accueil triomphal et appels à soutenir la résistance palestinienne    CUPRA célèbre le lancement du Terramar en Tunisie : un SUV au caractère bien trempé, désormais disponible en deux versions    Joséphine Frantzen : rapprocher la Tunisie et les Pays-Bas, un engagement de chaque instant    Amen Bank, solidité et performance financières, réussit la certification MSI 20000    Kaïs Saïed, Ons Jabeur, Ennahdha et Hizb Ettahrir…Les 5 infos de la journée    Skylight Garage Studio : le concours qui met en valeur les talents émergents de l'industrie audiovisuelle    Festival Au Pays des Enfants à Tunis : une 2e édition exceptionnelle du 26 au 29 juin 2025 (programme)    Découvrez l'heure et les chaînes de diffusion du quart de finale en double d'Ons Jabeur    Le Palais de Justice de Tunis: Aux origines d'un monument et d'une institution    Tunisie : Fin officielle de la sous-traitance dans le secteur public et dissolution d'Itissalia Services    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Aux soignants, la patrie non-reconnaissante !
Publié dans Business News le 23 - 04 - 2020

En ces temps de crise sanitaire majeure, beaucoup de Tunisiens ont soudainement découvert le caractère vital d'un système de santé performant. La pandémie a dévoilé l'état de délabrement de nos hôpitaux, le manque de moyens et les conditions impensables dans lesquelles exercent nos soignants. En première ligne face au Covid-19, le minimum que pouvait faire l'Etat, était de tout mettre en place pour leur faciliter la tâche. Sauf qu'on est très loin du compte.

« L'armée blanche », « nos soldats en blouse », « notre rempart contre le fléau », sont tout autant de qualificatifs que nos gouvernants nous ressortent avec force emphase au détour de chaque discours.
Mais derrière les discours que reste-t-il ? Les soignants tunisiens qui font face à la plus importante crise sanitaire depuis plus d'un siècle sont concrètement démunis. Ceux qui mettent leur vie et celles de leurs familles en danger parce qu'ils ont choisi cette profession et le service public se verront récompensés pour les heures de travail harassant, les gardes interminables, en voyant leur salaire ponctionné. C'est ainsi qu'a décidé l'Etat tunisien. Sous d'autres cieux, notamment en France, le gouvernement a annoncé une prime exceptionnelle pour tous les personnels hospitaliers et une revalorisation des indemnités de garde. La Tunisie n'est pas la France certes. D'ailleurs, les soignants ne demandent pas plus que des conditions acceptables et des équipements leur permettant de se protéger et de pouvoir prodiguer des soins décemment. Mais, notre « armée blanche » ne s'attendait pas à ce qu'on lui prélève le jour de salaire décidé par Elyes Fakhfakh et qui concerne l'ensemble de la fonction publique pour contribuer à l'effort national. Une situation ubuesque. Le personnel hospitalier ne contribuerait pas assez dans cet effort ? Les condamnations n'ont pas tardé à fuser.

Le président de l'Organisation des jeunes médecins tunisiens, Jed Henchiri est monté au créneau, en dénonçant un prélèvement touchant les internes et résidents de 60 et 180 dt. « Depuis le début de la pandémie, nous avons mis à la disposition du ministère de la Santé une liste de médecins volontaires. Des confrères ont même fait des collectes de dons pour acheter des équipements de protection pour les hôpitaux en première ligne. C'est notre devoir ! Mais nous avons été surpris par ce prélèvement, d'autant que nous n'avons pas été consultés. Et puis, nous sommes en premières lignes. Il faut savoir que les internes et résidents ne bénéficient pas d'une prime de contamination. C'était l'une de nos revendications depuis des années, mais en ces temps de crise, nous n'avons rien réclamé et nous avons continué à travailler. Un interne ou un résident touche en moyenne 1200dt pas plus ! ».
Jed Henchiri exprime ici le désarroi de la majorité des jeunes médecins qui effectuent des gardes « Covid » pendant 24h durant sept jours. Il évoque aussi le problème du logement des médecins qui se retrouvent acculés à louer des appartements près de leur lieu de travail. Certains, ne pouvant plus rentrer chez eux de crainte de contaminer les membres de leur famille, il faudra donc imaginer les dépenses supplémentaires. M. Henchiri fustige les manquements du ministère de la Santé et il n'est pas le seul. Les photos de soignants attendant, après la fin de leur tour de garde, avec leurs valises que le département leur trouve un logement ont fortement scandalisé la profession.
C'est le cas du personnel soignant de l'hôpital Abderrahman Mami exclusivement dédié aux patients Covid+. Ils devaient entamer le confinement de 14 jours post-service, mais le ministère n'a pas prévu de lieu d'hébergement. Selon docteure Lamia Kallel, il a fallu que la municipalité de l'Ariana intervienne et que les propriétaires d'un hôtel fassent un geste citoyen en acceptant de les héberger.
D'un autre côté, le président de l'Organisation des jeunes médecins exprime la crainte de voir tous les dons versés pour aider les hôpitaux tunisiens se transformer en compensations pour les entreprises. Il persiste et signe en affirmant que c'est le personnel hospitalier, du médecin au technicien, ainsi que la société civile qui sont en train d'œuvrer pour assurer les moyens de protection et la nourriture. « Nous n'avons rien vu de la part du département ! ». Mais ceci est une autre histoire et les mois à venir le prouveront.

En plus des charges supplémentaires pour louer des maisons, ce sont les déplacements du personnel ne disposant pas de voiture individuelle qui en rajoute une couche. En l'absence de transport public, puisque tout le pays est pratiquement à l'arrêt, les soignants payent de leur poche des taxis pour se rendre aux hôpitaux. Le témoignage du docteur, Mohamed Douagi, chef de service de réanimation néonatale à l'hôpital militaire illustre ce problème. Virulent et très critique à l'encontre du chef du gouvernement, Mohamed Douagi relate les mésaventures d'une infirmière en temps de Covid-19. « Aujourd'hui (le 21 avril), une infirmière est venue vers moi pour s'excuser d'être arrivée en retard. Elle a justifié cela par le fait qu'elle a déjà dépensé beaucoup d'argent dans des aller-retour en taxi, qu'elle n'a plus les moyens et qu'elle a dû attendre de trouver un bus au bout de 2 heures. La surveillante est intervenue pour me décrire l'état piteux de l'infirmière à l'arrivée dans le service en raison de la fatigue et du trajet dans un bus bondé suivi d'un long trajet à pied ».
Le médecin a fustigé la décision du prélèvement d'un jour de travail qui a touché le personnel hospitalier, en se lançant dans cette diatribe : « Je tiens à vous présenter mes remerciements Mr le chef du gouvernement et à votre ministre d'Etat le justicier Abbou pour le respect que vous avez pour le corps soignant, qui non seulement continue à travailler et sauver des malades et qui au lieu de mériter un geste financier de compensation se voit voler la paye d'une journée de travail.
Je voudrais aussi vous remercier de penser aux jeunes résidents internes et résidents et de leur voler une journée de travail à...180 dinars (même moi au plus haut grade et près de la retraite ne gagne pas ça par jour ) alors que leur salaire mensuel va de 800 à 1200 dinars par mois et qu'une garde en net est de 16dt et 32dt pour 18 h de calvaire sans récupération respectivement pour l'interne et le résident ».
Exprimant le ras-le bol de tout un pan de la profession, Dr Douagi a conclu en ces termes : « Merci messieurs les gouvernants, nous n'espèrons plus rien de vous. Si nous continuons, c'est parce que nous avons prêté le serment d'Hypocrate et non le serment d'hypocrite récité au ministère de la Santé. C'est aussi parce que nous avons choisi un métier humanitaire ».

La Tunisie a plus que jamais besoin de ses soignants, reconnus à l'échelle internationale pour leurs compétences. En retour, l'Etat n'a trouvé de mieux pour récompenser leurs efforts que d'appliquer sans discernement aucun une retenue sur salaire. Sous d'autres cieux, on consacre une minute par jour pour applaudir leur courage et les remercier. D'ailleurs, c'est vers ces autres cieux que des milliers de nos médecins, dont la formation a été financée par le contribuable tunisien, partent.

Tous nos articles sur la pandémie de Covid-19


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.