C'est en effet, ce qui ressort d'une étude qu'a entrepris l'Etat depuis l'année 2008, selon laquelle la céréale tunisienne était appelée à être privatisée pour suivre le chemin des monopoles et des biens étatiques qui ont été privatisés depuis 1986 jusqu'à aujourd'hui. Dans cette logique, le gouvernement préparait cette initiative pour laisser libre cours à la loi de l'offre et de la demande et pour décider des prix des céréales consommées en Tunisie et qui allait, dans la foulée confier, ce secteur névralgique aux puissants groupes privés. Le « grenier de Rome » était donc sous la menace de la privatisation, autrefois vue comme une réponse aux maux qui rongent les monopoles d'Etat et les entreprises étatiques généralement. Dans ce sens, le gouvernement a sorti le grand matériel pour faire croire qu'il fallait bien, contre ras et marées, privatiser l'importation et la commercialisation du blé, orge, maïs etc… en confiant notamment, comme à l'accoutumée, l'étude à un bureau d'étude international appelé à confectionner des scénarios plausibles et complets de ladite libéralisation sous moyen et long terme pour donner légitimité et crédibilité audit projet et en mettant tout le poids de l'Etat dans le projet. Tout les arguments y passaient : récolte selon les saisons, urbanisation, déclassement de terres agricoles, déficit de la caisse de compensation, mais plus étonnant que tout, l'argument de la flambée des prix des céréales, comme si les prix des céréales en Tunisie et par conséquent de ses dérivés comme la farine et le pain, allaient diminuer une fois le secteur privatisé! Le gouvernement n'a pas omis de mettre les petits plats dans les grands et de désigner, comme toujours, une courroie de transmission qui est l'Office national des céréales qui a déterminé et présenté les tenants et les aboutissants de ce projet pensé en catimini par les futurs protagonistes du prochain marché céréalier libéré. D'après les connaisseurs qui ont été mis en vedette pour cette affaire, la spéculation sur les produits céréaliers n'avait aucune chance de passer car l'Etat allait toujours, nous dit on, garder l'œil vigilent sur d'éventuels opérations de spéculation et de hausse des prix afin de les contrecarrer, car la caisse de compensation allait toujours jouer son rôle modérateur pour ne pas permettre aux prix de flamber. L'Etat aurait aussi prévu, selon les mêmes sources, d'instaurer un prix plafond pour les produits selon la catégorie du produit et intervenir pour réguler à chaque fois qu'un abus allait être constaté de la part des opérateurs privés de ce marché. Vu que l'alimentation en Tunisie repose essentiellement sur les produits céréaliers, c'est à dire des millions de gens qui dépendent de ces produits, on se demande comment l'Etat tunisien aurait-il pu songer à lever la main sur ce marché et à le laisser à la merci des investisseurs et financiers rapaces, nationaux et internationaux. La caisse de compensation aurait-elle eu un tel déficit atteignant des sommets pour abandonner les citoyens au triste sort d'être livré à ces requins qui ne pensent qu'à réaliser plus, encore plus et toujours plus de bénéfices au détriment du citoyen ordinaire qui n'est plus capable de suivre le rythme et d'assumer les augmentations qu'on lui impose chaque jour. Il est très important de déterminer, surtout à cette époque, à quoi allait servir la privatisation du marché céréalier, décision d'autant plus étonnante est improbable qu'elle rompt définitivement avec notre histoire de l'après indépendance et notre politique sociale humaniste. Ce projet de loi aussi, par son caractère singulier mettait en cause voire déboutait, si elle venait à être appliquée, le principe du prestige de l'Etat, principe prééminent et ultra important pour la pérennité d'un système politique quel qu'il soit, et si cher au Président Bourguiba, qui n'aurait jamais, de son vivant, songé à privatiser les domaines privilégiés de l'Etat et à tout va. Mais il est fort probable que ce projet qui commençait à se frayer un chemin servait les intérêts personnels de quelques uns, égoïstes et opportunistes qu'ils sont, au détriment du peuple qui allait payer au prix fort son pain, ses pâtes, etc… pour faire enrichir plus, les plus riches. Il va sans dire que ce projet a des chances infimes de réussir s'il était appliqué. D'après cette contre thèse, l'agriculture tunisienne, ira droit dans le mur avant de couler, sans le concours de l'Etat. Affaire à suivre !