Le tout récent promu de «Arab Idol» a drainé foule, dimanche soir, à «Carthage». Dont des milliers de jeunes admiratrices qui ne tenaient pas en place. Ambiance «rotanienne». Le plus gros des chants, aussi. Un peu dommage : le vrai Mohamed Assaf est loin, très loin, au-dessus... Pas trop ébruité, le passage du jeune prodige palestinien Mohamed Assaf au festival de «Carthage». Curieusement, les médias étaient avares en «annonces. Les collègues tunisiens «tiquaient» de leur côté. D'aucuns trouvaient «excessive, cette consécration précoce». D'autres, franchement hostiles, déniaient «toute qualité à l'artiste ?!?». Evidemment, tout cela ne tient pas. Premier démenti : la popularité croissante de Assaf dans le monde arabe (25 millions de vues sur le web, record absolu). Second : ce théâtre romain, quasiment pris d'assaut dimanche, pour une poignée de spots d'à peine une semaine, reconnaissons, c'était largement rendu. Mais le vrai démenti, les détracteurs, les sceptiques et autres dubitatifs le savent bien (le savaient depuis le début) c'est le talent, clairement, hors du commun d'un chanteur d'exception. On ne veut ni narguer, ni attiser les «envies», mais en termes de chant, au strict plan vocal, que ce fut par la mesure, à travers le don «organique» ou la perception sensible, il était incontestable dès les premières prestations de «Arab Idol» que l'on était en présence d'un personnage tranchant déjà avec le lot. Des anciens ou des nouveaux. On schématisera, peut-être, mais on insistera sur un seul point : l'aptitude (foncière!) de Mohamed Assaf à restituer tous les registres du chant arabe. Tous y passèrent durant les longues semaines du concours : le vieux Tarab, le quassid, le monologue, la chababia, la taqtouqua légère ou aménagée, la mijana, les quoudoud, le khaliji, et les mawels, tous nos mawels interprétés dans leurs plus infimes nuances. Des reprises? De simples reprises? En aucun cas. Là était l'exception. Là était la différence. La voix de Mohamed Assaf, lors de cet «Arab Idol» 2013, recréait pratiquement tout ce qu'elle reprenait, l'embellissait, le rehaussait. Pas seulement le profil personnel (physique halimien, militantisme palestinien), pas seulement la popularité arabe, le retentissement international, le talent, la force, la beauté, les couleurs et la limpidité d'une voix forçaient la reconnaissance, annonçaient, proche, toute proche, la fulgurante ascension. Ni faveur critique, ni consécration précoce : c'était le Mohamed Assaf, le «missile», tel qu'à nous révélé par l'«Arab Idol» 2013. Et c'était l'artiste, à part entière, reçu par la prestigieuse scène de «Carthage» ce dimanche 26 juillet. Le récital, maintenant : a-t-il tout confirmé ? Malheureusement non. Et c'est presque «la mort dans l'âme» qu'on le dit. On ne se cache, toujours, pas d'être des appréciateurs de Mohamed Assaf, mais on doit l'avouer : on est plutôt tombé de haut. Et d'abord en découvrant la catégorie de public qui a investi aussi bien l'espace «chaises» que les gradins. Des «rotaniennes» qui n'arrêtaient pas de gesticuler et de hurler, chose rageante, jusque pendant les «mawels» les plus raffinés et les plus imposants du chanteur. Quelle dégringolade, et quelle déception !Une idée morose nous a traversé l'esprit :on avait un faux public pour un chanteur vrai de vrai ! Mais le plus grave, à nos yeux, était que ce même chanteur s'est, lui-même, comme «rotanisé». Pratiquement toutes les chansons de son nouvel album sont rythmées à la «libanaise». Paroles et musiques globalement «modélisées». Pis, Assaf sollicitait la claque, tendait le micro, se répandait en éloges doucereux à l'adresse du public tunisien. Gaspillant ainsi toutes les ressources d'un immense talent. Dommage, d'autant plus que les rares moments où Assaf a pu (ou bien voulu) glisser ce qu'il savait faire de mieux, furent simplement émouvants, nous laissant ô combien de regrets. On a évoqué les «mawels», les «jabalis» et les «chamis», surtout, étaient de purs joyaux. A comparer, par le timbre cristallin, la fluidité du «cours», l'aisance des tonalités, les cadences prolongées, à Wadie Essafi, Mohamed Ghazi, ou encore à Nassri Chamseddine à son heure de gloire. Mais régals de courte, très courte, durée. Pour le reste, ce n'étaient que sons de percussions et visions d'«hystérie» sur les gradins. Mohamed Assaf peut continuer sur cette «voie du succès», libre à lui, et aux agents et mentors qui dirigent ses débuts. Mais s'il le fait, il doit savoir qu'il risque d'y laisser et son talent... et son crédit.