Au lieu d'enraciner les valeurs du labeur et du travail que le célèbre dicton «gagner son pain à la sueur de son front» résume si bien, les sociétés modernes encouragent aujourd'hui l'argent facile Presque toutes les chaînes radio et TV nous gratifient (et nous assomment) à longueur de journée de spots publicitaires incitant le public à «jouer» pour gagner de ...l'argent, des voitures, des prix divers! Et il y en a pour toutes les tranches d'âge. Pour les enfants, ils sont appelés à collectionner des figurines. Ils ne gagneront pas des millions, mais quelque chose d'autre, ce qui, soit dit en passant, soulagera le porte-monnaie de leurs parents de beaucoup d'argent. Sous la pression de leurs enfants, ils seront dans l'obligation d'acheter des dizaines de pots de yaourt, non pas pour la consommation familiale, mais pour compléter leurs collections. Ce n'est pas le moyen idéal pour apprendre aux enfants les notions d'économie et de réguler leur consommation. Mais comme il n'y a aucune barrière, aucun empêchement majeur, chacun fait ce qu'il veut pour ramasser de l'argent. Moment mal choisi «Je ne sais plus où ranger les pots de yaourt ouverts et non consommés, reconnaît une maman qui avoue que ses enfants y mettent tout leur argent de poche pour «jouer». Inutile de faire remarquer que par les temps qui courent, les ménages ont beaucoup d'autres chats à fouetter que d'aller acheter des pots de yaourt par dizaines. D'ailleurs, toute l'opération est en elle-même mal choisie, alors que le pays vit une situation économique extrêmement délicate, se doit de serrer ses dépenses, surtout en devises, avec une balance commerciale qui tangue dangereusement, il y a franchement mieux à faire. Ces figurines, le pelliculage des pots, toute la logistique mise en place pour gérer ce « jeu » se soldent par des sommes énormes. Tout cet argent est payé en devises alors que nous peinons pour acheter de quoi nous nourrir et pour rembourser nos dettes extérieures. La libéralisation des importations n'a rien à voir avec cette licence qui ouvre la voie à bien des dépassements. Les autorités compétentes, surtout ceux qui ont pris en main cette opération kamikaze pour tenter de sauver notre économie et redresser nos finances, sont en droit d'exiger plus de retenue, car bien des nations plus solides que nous ont su freiner cette soif de gagner de l'argent facile aux dépens des intérêts de la communauté. Bien sûr, on vous dira qu'il n'y a « aucune obligation d'acheter » ou «de jouer» mais allez faire comprendre cela à des enfants appâtés par le jeu et le gain et à des crédules qui pensent que le ciel finira par leur offrir la chance de toute une vie! De l'argent facile Les adultes ne sont pas en reste : eux aussi, on leur offre de l'argent facile. Des SMS et le tour est joué. L'heureuse ou l'heureux élu de la soirée n'a plus qu'à répondre à quelques questions (abrutissantes) pour gagner des ...millions. Que demande le peuple ? De l'argent à portée de main, que l'on peut rafler et duquel profitera toute la famille. Le ver est dans le fruit Il n'y a plus besoin de travailler. On peut gagner des millions en jouant et en passant sa journée face à une TV ou à l'écoute d'une station de radio. Comme éducation, il y a mieux pour exalter les valeurs de l'effort et du travail. Tout y passe une fois que l'on a découvert que le Tunisien est joueur dans l'âme. Les entreprises de distribution, de grandes consommations, le sport, se bousculent pour attirer dans leurs filets ceux qui n'ont visiblement rien à faire qu'à guetter ce genre d'opportunités. Où sont donc ces associations qui défendent les enfants et les familles ? Trouvent-elles normal que le vice du jeu et de la paresse est le bienvenu dans notre société qui croule déjà sous le joug de bien des problèmes qu'elle n'arrive pas à résoudre ? L'effet et les contrecoups de ces « jeux », qu'on le veuille ou non, se répercutent sur la vie familiale. Car s'il y en a un qui gagne, des milliers dépensent un argent fou, en pure perte, en courant derrière… un mirage. N'y a-t-il pas moyen de codifier et d'encadrer ces « jeux » pour protéger ceux qui en ont vraiment besoin ? Il faudrait agir car le ver est déjà dans le fruit.