Repenser la place de l'agriculture dans le modèle de développement Résoudre les problèmes auxquels fait face l'agriculture tunisienne nécessite une refonte totale de l'approche d'élaboration de la politique agricole, a affirmé, hier, le chef du gouvernement, Habib Essid. Donnant le coup d'envoi au Dialogue national sur l'agriculture et la pêche qui s'étalera sur six mois, Essid a indiqué que cette révision doit être réalisée dans le cadre d'une vision prospective à même de permettre la mise en place et la concrétisation de nouveaux solutions, choix et mécanismes précis. Le ministère de l'Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche et l'Union tunisienne de l'agriculture et de la pêche (Utap) ont entamé la tenue de séances de dialogue avec la participation des organisations professionnelles comme l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (Utica) et la Conect (Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie). L'objectif recherché est de préparer une série de recommandations visant à promouvoir le secteur agricole. Le chef du gouvernement a estimé que les objectifs et mécanismes de la politique agricole visée doivent être en adéquation avec les politiques des autres secteurs ainsi qu'avec celles du développement régional et adaptés à la conjoncture internationale. Faire face à la concurrence Les agriculteurs, les pêcheurs et les organisations de la société civile doivent être considérés comme étant des partenaires dans l'élaboration des stratégies agricoles et l'organisation des secteurs productifs sous forme de systèmes de production basés sur les exploitations agricoles et les unités de pêche, a encore indiqué Essid. Il a, par ailleurs, mis l'accent sur l'importance d'étudier les marchés local et mondial des produits agricoles et alimentaires, afin d'obtenir des informations précises sur les exigences des marchés et les perspectives de leur développement. L'objectif recherché, a-t-il encore ajouté, est de faire face à la concurrence et de tirer profit des opportunités de partenariat. Le chef du gouvernement a passé en revue les volets stratégiques sur lesquels se baserait le dialogue, notamment les dispositions relatives à l'exploitation des ressources naturelles et le développement de la production des semences et de plants. Il s'agit, en outre, d'assurer le contrôle, d'améliorer l'efficience des mécanismes d'investissement et de renforcer la gouvernance du secteur. Au programme de la journée d'information concernant le démarrage du dialogue national sur le secteur agricole et la pêche, figurent des interventions des principaux intervenants, la mise en place de commissions techniques et l'élaboration d'une approche de gestion du dialogue. Des réponses claires «En dépit de sa croissance pendant les dernières années, l'agriculture tunisienne doit réajuster son parcours de développement par la mise en place d'une nouvelle stratégie», a déclaré le ministre de l'Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche, Saâd Seddik. Seddik a affirmé que ce dialogue contribuera à donner des réponses claires concernant plusieurs points dont la place du secteur agricole dans la politique de l'Etat et ses orientations de développement, la clarificaion de l'avenir du secteur et la capacité du ministère de l'Agriculture à introduire des changements au niveau des stratégies de développement du secteur. Le ministre a proposé de débattre, au cours du Dialogue national, un ensemble de questions relatives à la dynamique du marché mondial des produits agricoles, à l'accroissement des besoins du marché intérieur, aux circuits de distribution, aux politiques de commercialisation ainsi qu'à la situation foncière, aux ressources naturelles et aux nouveaux modes de production agricole. Il a appelé la commission de pilotage qui présidera ce dialogue à la concertation avec les différents intervenants pour créer des équipes de travail et des commissions spécialisées au double plan central et régional. Seddik a également recommandé d'exploiter les statistiques disponibles, d'organiser des journées d'études sectorielles et de préparer une étude prospective du secteur de l'agriculture et de la pêche pour contribuer à la réussite de ce dialogue qui constituera un terrain solide à même d'aider à l'élaboration des politiques publiques dans le secteur agricole. «Encourager davantage l'investissement dans la production agricole, l'industrialisation et la valorisation des produits du pays est inévitable», a indiqué, de son côté, la présidente de l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (Utica), Wided Bouchamaoui. Situation des terres domaniales «Dans ces conditions économiques difficiles que connaît la Tunisie, j'estime que le secteur agricole est une part importante des solutions recherchées, tant en termes d'offres d'emplois que de réalisation de la valeur ajoutée pour l'économie du pays», a-t-elle ajouté. Lors de sa participation à la journée d'information relative au démarrage du Dialogue national sur le secteur de l'agriculture et de la pêche, Bouchamaoui a souligné l'impératif d'éviter l'importation de produits agricoles disponibles localement, soulignant les perspectives prometteuses d'exportation des produits agricoles tunisiens vers tous les pays du monde. Elle a relevé que l'action commune des agriculteurs et industriels pour réaliser la complémentarité entre le secteur agricole et les industries agroalimentaires est devenue un impératif. Bouchamaoui a souligné, dans ce contexte, l'importance de la mise en place d'une stratégie nationale pour instituer des filières agricoles complémentaires. La responsable de la centrale patronale a demandé d'accélérer la régularisation des situations de milliers d'hectares de terres domaniales abandonnées et d'identifier des solutions dans un cadre transparent et de bonne gouvernance pour que l'économie tunisienne en tire profit. Le président de l'Union tunisienne de l'agriculture et de la pêche (Utap), Abdelmajid Zar, a souligné, pour sa part, que l'organisation agricole est convaincue que le secteur a besoin d'un train de mesures et de réformes profondes, estimant que le dialogue lancé hier constitue «un nouveau repère pour traiter, d'une manière différente, avec les problèmes et les questions liées à l'agriculture». Le président de l'Utap a aussi fait remarquer que l'organisation est contre l'anticipation des résultats de ce dialogue qui va durer près de 6 mois et qu'elle plaide en faveur des concertations. Par ailleurs, un comité de pilotage du dialogue national sera formé, pour déterminer les méthodes de travail des commissions au niveau central et régional. Les concertations devraient aboutir à des recommandations pour la mise en place d'une nouvelle stratégie de promotion du secteur de l'agriculture en Tunisie.