Dans la galerie Roubtzoff, le beau a illuminé les murs. Des toiles de maîtres emportent le regard loin dans une belle ballade orientaliste émanant des pinceaux des meilleurs peintres du XIXe siècle étrangers et tunisiens Chaque pinceau brave le temps et pérennise des paysages, des portraits et une nature morte toujours vivante grâce à des touches fluides et non moins réalistes. Impressionnisme, portraits, esquisses... Figuratif, les peintres se succèdent, certes, mais ne se ressemblent pas. A chacun son sceau, mais tous se rejoignent sur un seul thème : l'orientalisme. Ainsi, ils ont une prédilection pour les couleurs chaudes tout en privilégiant le rouge, le vert foncé, le jaune et le brun sauf quelques exceptions où les couleurs flashy brillent de tout leur éclat en accord avec la peinture moderne. Si le figuratif domine à travers divers portraits précis aux touches saillantes et aux courbes nettes et fluides, l'abstrait est aussi de la fête. Oui, ces peintures célèbrent l'orientalisme à l'unisson et rendent hommage à l'orient à travers diverses scènes traditionnelles venues de très loin et perpétuées par un imaginaire riche et florissant. La majorité de ces peintres ont puisé leurs inspirations dans leurs différents voyages, notamment au Maroc et en Algérie. Il ne s'agit pas là d'un mouvement ni d'une école particulière, mais de coups de peinture spontanés venant des profondeurs de ces maîtres qui ont enfanté des toiles exceptionnelles, de vrais tableaux de collection. C'est le must de la peinture, ces peintres boivent l'Orient jusqu'à la lie en ne faisant fi d'aucun détail. Tout est bon à exprimer généreusement dans des mouvements élégants. D'ailleurs, on salue la galerie pour ce travail de recherche qui a permis de dépoussiérer des œuvres d'antan, accomplies avec une grande et belle dextérité. La gestuelle est magique, enfantée dans du bonheur contagieux. Le regard est envoûté et se laisse aller, heureux, dans cette belle aventure haute en couleur. A l'entrée, Hédi Khayachi nous accueille avec une belle fresque. Un portrait d'un consul de France en costume officiel. Cette belle fresque, émanant du pinceau d'un grand peintre, porte les marques du temps. Difficile de restaurer ces tableaux, témoins d'un temps révolu. Khayachi est célèbre pour avoir pérennisé des portraits de princes au XIXe siècle. Dans cette exposition, la peinture à l'huile est maîtresse des lieux avec quelques esquisses au crayon, emblème du peintre Roubtzoff, qui met en avant les œuvres de cette sommité née en 1884 et ayant vécu à Tunis pendant plus de trente ans. Des scènes, des portraits de femmes ou des bras tatoués tissant des tapis. Quelques vieilles céramiques relevées par des couleurs chatoyantes et un tableau mettant en mouvement des paysages. Flirtant avec l'impressionnisme. Gaston Belmon, quant à lui, prof de dessin à Tunis, a trempé son pinceau dans le Sud tunisien. Ce peintre a une prédilection pour les paysages mouvementés sertis de couleurs chaudes et apaisantes, prairies, arbres, toutes les nuances du vert se confondent pour se saisir du beau. Pierre Boucher (né à Tunis en 1894) rend hommage à la femme tunisienne et met en valeur sa beauté. A travers un élan très voluptueux et accrocheur, il peint la sensualité. Couleurs vives presque flashy. Il pérennise une danseuse du café de Paris, imposante et aguicheuse. Lucien Mainssieux, né en 1885, est inspiré par ses divers voyages en Orient, en Algérie et au Maroc. Il offre de beaux portraits et lâche son pinceau se balader dans l'impressionnisme. André Fernaud Roux, né en 1854, impose son coup de peinture mis en valeur par de belles couleurs vives et une dominance du jaune. Un vase de mimosas, de marguerites, nature morte, mais toujours vivante. Ammar Farhat, né à Béja en 1911, nous offre la mosquée de Djerba dans toute sa splendeur. C'est un amoureux des couleurs qu'il superpose tout en jouant sur l'antagonisme. Un essai d'abstrait fluide et en mouvement donne un coup d'éclat à son pinceau. Alexandre Castel, quant à lui, nous offre une femme au mortier. Couleurs chaudes, brunes, il a un pinceau actif et précis. Il pérennise chaque détail donnant naissance à une toile figurative très parlante. Vient le tour de William Alphonse Lambrecht qui nous entraîne dans les dédales des souks de l'étoffe. On croit entendre les brouhahas de la Médina. Sa touche est vivace et fluide. Son pinceau fait bouger les scènes. Georges-Jean La mare est orientaliste jusqu'au bout des ongles. Il capte la nature en reproduisant ses plus infimes mouvements. Natacha Markoff (1911-2008) nous offre une série de tableaux. Du figuratif jusqu'au réalisme. Une femme aux habits traditionnels, assise avec son enfant, nous balance dans un passé toujours en vigueur. Elle ne peint pas, elle caresse les courbes avec son pinceau. Elle s'égare même dans un vieux port aux reflets lumineux. Aly Ben Salem met en exergue la beauté sensuelle de la femme, soit en utilisant de la mosaïque ou de la peinture à l'huile. Sa peinture enrobe le corps et la forme à travers une sensualité presque palpable. Il puise son inspiration dans un imaginaire riche. Le tracé précis et minutieux, il borde ses personnages de blanc relevé par des couleurs vivaces. Il a une prédilection pour l'art de la mosaïque qui met en exergue son travail d'orfèvre. Albert Marquet, ami de Matisse, conserve sa période fauve. Il est adepte de la libération des couleurs. De ses œuvres se dégagent toutes les nuances de la lumière. Une lumière éclatante et envoûtante. C. Horace plonge son pinceau dans l'aquarelle et la gouache pour faire vivre des scènes de foules. Elles sont fluides et en mouvement. Georges-Jean La Mare excelle en représentant souks, marchés et ruelles. Il s'égare aussi pour pérenniser la beauté de dame nature... Tous ces peintres férus d'orientalisme ont peint au gré de leurs divers voyages. De pays en pays, ils ont pérennisé des traditions, se sont égarés dans les vieilles villes où ils ont rendu hommage à la beauté féminine. Belle exposition à ne pas rater.