Alors que se profile la rentrée universitaire, les étudiants tunisiens originaires de régions éloignées se trouvent confrontés à un marathon devenu presque habituel : trouver un logement qui soit à la fois proche de leur lieu d'études et à un prix abordable. Si certains ont «la chance» de pouvoir bénéficier d'un foyer étatique, les autres sont contraints de gratter le fond des poches de leurs parents pour pouvoir payer des logements privés parfois ou, souvent, au-delà de leurs moyens. L'hébergement devient donc le souci majeur de nombreux étudiants ayant un budget qui ne supporte plus la montée des tarifs proposés par les foyers privés. Nul ne peut nier que les conditions d'hébergement dans certains foyers universitaires ne sont pas aussi confortables que l'on puisse l'imaginer. En effet, si le loyer mensuel payé par ces étudiants prend en considération toutes les dépenses d'exploitation y compris l'électricité, l'eau et le chauffage, certains locataires se plaignent des conditions défavorables dans les foyers privés, à savoir l'exiguïté des chambres, les coupures fréquentes d'électricité, les pannes du chauffe-eau et les tarifs qui sont parfois exorbitants. «Non seulement les loyers à payer sont élevés, explique Amira, étudiante en droit, mais il y a aussi le manque de confort dans ces foyers qui est une réalité. Personnellement, je ne suis pas à l'aise dans les cités universitaires et je ne peux pas étudier correctement, parce que les chambres sont trop petites et les autres étudiantes trop bruyantes. L'encombrement est un véritable problème qui ne fait que s'aggraver». Le manque de choix Vu le nombre croissant des étudiants au cours de ces dernières années, l'Etat a cherché à encourager la construction de résidences privées, en proposant des encouragements à l'investissement ou en concédant les terrains à bas prix. «La quantité s'est développée aux dépens de la qualité. Construire de nouveaux foyers semble loin de résoudre le problème du logement des étudiants», indique une jeune étudiante en deuxième année langues vivantes. Elle ajoute que sa propre expérience et celles des autres montrent que les étudiants doivent faire face à des loyers élevés et à des services souvent mauvais, voire inexistants. «La vie dans un foyer universitaire est déjà en soi une expérience difficile, mais parfois on n'a pas le choix. Le propriétaire ne tient pas parfois ses promesses en termes d'entretien et de garantie de conditions de vie pratiques, en particulier en agissant sur les prix et en les augmentant au début de chaque année universitaire», explique-t-elle. Elle ajoute que cette année encore, elle va habiter dans un foyer et appréhende déjà les coupures, plutôt fréquentes, d'électricité. «C'est le cauchemar de plusieurs étudiants résidents dans cet établissement. Il faut cependant s'y habituer, car en cas de plainte, les propriétaires nous accuseront, sans surprise, de “gaspillage” et de “dégradations”,»souligne-t-elle. Ces «accusations» sont-elles totalement infondées ? N'est-il pas vrai que les étudiants ont leur part de responsabilité dans cette relation tourmentée ? De bons côtés Tout compte fait, le logement étudiant, qualifié par certains de «casse-tête», peut se transformer en véritable atout pour d'autres. Farah, étudiante en architecture, a passé trois ans dans un foyer. Trois ans dont elle garde d'agréables souvenirs. «Vivre dans un foyer était mon propre choix. Je ne voulais surtout pas quitter le cocon familial pour louer un studio. J'étais persuadée que, malgré les difficultés, je parviendrais à reconstituer une ambiance familiale dans le foyer et c'était le cas», nous confie-t-elle. Situé à quelques kilomètres du centre-ville et dans un quartier bien desservi par les moyens de transport public, le foyer privé dans lequel elle habitait était, selon elle, «un lieu de convivialité où chacun retrouvait ses repères. Un endroit qui offre un cadre idéal pour réussir ses études et son entrée dans la vie active». Après avoir vécu loin de chez elle, après avoir côtoyé des personnes très différentes, après s'être habituée à un rythme de vie assez spécial, notre interlocutrice pense, avec un certain recul, avoir tiré pas mal de leçons de cette expérience. «Je pense sincèrement que je suis devenue quelqu'un de plus tolérant et de plus sociable», nous confie-t-elle avec un brin de nostalgie. Trop de liberté ? Obligée d'emménager près de l'école dans laquelle elle poursuivait ses études, Farah avoue que la chaleur et la solidarité qui existent entre les locatrices du foyer vont certainement lui manquer. Pourtant, tout n'était pas rose pour la jeune fille. «Il faut le dire, les filles du foyer ont parfois mauvaise réputation, à cause des clichés qui existent autour d'elles. Cela ne veut pas dire que ce n'est pas vrai. Il existe plusieurs problèmes et les comportements intolérables ne manquent pas. Il y a eu plusieurs crêpages de chignons dans le foyer où je résidais et j'ai observé pas mal d'écarts. Je pense qu'un contrôle plus sérieux devrait être effectué », relève -t-elle. La liberté excessive dont bénéficient certaines étudiantes habitant dans ces établissements peut être à l'origine de problèmes. Du jour au lendemain, elles se retrouvent libres, délivrées du contrôle parental, loin de chez elles et croient donc que tout est permis. Certains trouvent cela normal. «Personnellement, ça me choque, d'autant plus que les familles mettent le prix fort pour que leurs enfants puissent étudier»,confie-t-elle. Les foyers universitaires privés demeurent l'unique recours pour plusieurs étudiants désireux de poursuivre leurs études supérieures. Certains apprécient, d'autres pas. Quoi qu'il en soit, c'est souvent un passage obligé. Alors mieux vaut tenir le coup, ne pas se faire arnaquer et respecter les gens et les règles , pour moins de tracas.