La richesse de «Chaml» réside dans cette diversité d'approches, d'orientations et d'appartenances de ses membres, dont l'écriture se fait liberté, loin de toute catégorisation. Et le collectif est à cette image. Dans un café culturel à Lafayette, une poignée de jeunes femmes se sont rassemblées pour lire des poèmes féministes. C'était le 8 mars, à l'occasion de la Journée internationale des droits des femmes. Leur histoire est celle du collectif «Chaml», né il y a quelques années sur le réseau social Facebook, à partir de débats et discussions autour de la littérature féministe et de la condition de la femme. Leurs histoires, qu'elles écrivent et publient sur le blog «collectifchaml.wordpress.com», certaines avec leurs noms, d'autres sous un pseudo, désirent changer le regard de la société sur les femmes, déconstruire le mythe de «La femme tunisienne». Et il n'y a pas mieux que les mots pour y parvenir. «Notre conviction et notre action sont essentiellement basées sur l'écriture. C'est notre réponse au monde», affirme Amal Hdhili, qui a rejoint le collectif il y a un an. Elle l'a découvert sur Facebook à travers les textes d'autres filles du «Chaml», comme Amal Claudel, cofondatrice, qui a publié son premier recueil, Cœur sur une pointe d'aiguille, en novembre dernier. Pour elle, le fait de publier uniquement sur Internet n'est pas un choix, mais une obligation, vu son grand impact et la grande accessibilité qu'il offre. «Je préfère le papier et j'espère que le livre retrouvera bientôt son public», ajoute-t-elle. Amal Hdhili a lu un poème de l'Iranienne Forough Farrokhzad. Devant les portraits des poétesses, les membres de «Chaml» ont également lu du Suad Al-Sabah (Koweït), du Josée Yvon (Canada), du Gloria Anzaldúa (Chicana), du June Jordan (USA), du Diane Di Prima (USA), du Nazik Al-Mala'ika (Irak) et du Maria Mercè Marçal (Espagne). L'ambiance animée du café est devenue silence et écoute. Les mots de ces femmes lues par des femmes, pour des femmes dans la journée consacrée à leurs droits, ont leurs poids, sont un concentré d'expériences féminines de différentes époques et origines, des vers qui résument un océan de sens. Yosra Sghaier, cofondatrice de «Chaml», a fait le choix des poèmes lus mardi dernier. «A travers ces poèmes, je voulais présenter au public différentes références culturelles, l'expérience de femmes qui nous ont précédé et rappeler que la poésie féministe existe!», nous explique-t-elle. Un choix qui se défend, même si les présents s'attendaient à voir lire des textes de «Chaml», comme, Kaouther Hamri qui nous affirme suivre et admirer ce collectif, mais qui ne cache pas sa déception, même si elle a apprécié les lectures proposées. «J'aime ce qu'elles écrivent, surtout les histoires vraies, teintées de beaucoup d'audace, mais là, c'est comme si elles se cachaient», ajoute-t-elle. «Nous ne préférons pas faire de lectures publiques des écrits du collectif pour le moment, afin de conserver son ouverture à toutes les filles et leurs expressions, autrement il faudra passer par une sélection», nous explique encore Yosra. Elle voit la richesse de «Chaml» dans cette diversité des approches, des orientations et des appartenances de ses membres, dont l'écriture se fait liberté, loin de toute catégorisation. Et le collectif est à cette image, loin de fonctionner comme une association ou une organisation classique. Le tout est couronné par la diffusion sur Internet, support le plus proche de leur cible, décrit cette passionnée de littérature. «Nous n'avons pas encore les moyens de publier un bulletin ou un magazine, mais ça viendra peut-être plus tard», répond-elle. En attendant, continuez d'écrire mesdames, je vous en prie!