Les équipiers de Aidouni ressurgissent au moment où ils sont diminués et sous pression. Malgré des absences, malgré une chaleur suffocante, ils ont verrouillé les issues devant une sélection malienne naïve et trop sûre d'elle. Jalel Kadri réussit encore une fois un stratagème défensif. Comme face au Nigeria, il a reproduit un plan de jeu défensif (et pas «défensiviste») bien organisé qui a empêché les Maliens, hormis quelques situations, de trouver l'occasion de marquer. C'est qu'après 30', on a bien vu que le Mali de Koné a puisé toute son énergie et ses qualités individuelles dans des tirs et dans des incursions profitant de la fragilité de Maâloul et Drager. Sinon, pas de quoi s'inquiéter : le bloc défensif d'ensemble a bien fonctionné. Et on a vu des joueurs comme Msakni et Sliti faire des courses de 20 mètres pour récupérer le ballon. Cela dit, l'équipe de Tunisie a réussi grâce à un peu de chance sur le but précieux de la victoire (même si le pressing de Msakni a quand même gêné Sissako), mais surtout grâce à son instinct de survie. Le Mondial est une question de vie ou de mort pour notre équipe de Tunisie, pour l'instance fédérale et son président, et de plus quand on perd trois défenseurs axiaux et que ça n'a pas d'effet sur la solidité défensive, ça prouve bien cette capacité à résister et à faire contre mauvaise fortune bon cœur. Pendant des semaines, on a trop exagéré ce Mali, véritable bête noire des nôtres. C'est une équipe ordinaire, qui a de bons milieux relanceurs assez créateurs, mais qui ne font rien face à des équipes organisées. Et c'est Jalel Kadri qui l'a bien saisi des temps où il était adjoint de Kebaïer. Il a établi son dispositif autour d'un quatuor défensif assez solide (la révélation Ghandri était un coup de maître !), et d'un trio récupérateur-relayeur qui a sué pour empêcher Haydara et ses équipiers de s'installer dans notre zone. Le mérite aussi de l'équipe de Tunisie revient à Chaâlali, Aidouni (qui confirme d'un match à l'autre que c'est le poumon du milieu) et Ben Romdhane qui ont récupéré beaucoup de balles, tout en réussissant la transition offensive. Pour le Mali, c'était très dur de transpercer ce bloc uni, cette toile autour d'un Bechir Ben Saïed qui nous a fait des frayeurs sur ses sorties aériennes. En même temps, et comme notre équipe aime défendre et jouer par à-coups l'attaque, elle a saisi ou a provoqué peut-être une erreur qui nous a ramené un but précieux. C'est pratiquement un pied mis à Doha, c'est la moitié du chemin qui a été faite. De plus, notre façon de jouer, l'âme avec laquelle les équipiers de Jaziri ont évolué, et toujours la justesse dans les gestes et la solidité défensive malgré les absences de taille, rassurent avant un match retour où tous les ingrédients de réussite sont là. Kadri et quatre jours décisifs Entre l'aller et le retour, juste quatre jours où on n'a pas le temps de changer. La seule interrogation concerne Skhiri qui peut partir au match retour. Son apport reste considérable, mais là encore un dilemme se présente : un Skhiri diminué et pas à 100% de ses moyens ou un Chaâlali en roue libre et qui a tous ses moyens ? Ce ne sera pas le seul dilemme pour Kadri. Il va raisonner comme s'il doit gagner son billet à Doha de Radès, et comme si le match aller n'existait pas. Autant donc préserver ce onze qui a justement eu un ascendant sur le Mali, mais en même temps, ce sera un match où nous sommes obligés, de par le terrain et le prestige, de gérer la possession et de nous porter vers l'adversaire. C'est dans ce registre que l'on réussit le moins. Face à nous, un Mali qui n'aura plus rien à perdre et qui jouera pour gagner. Attention, Kadri sait bien que rien n'a été fait, c'est juste un premier pas de fait. Le deuxième reste à faire mardi dans un Radès assez plein (mais qui a eu cette frustrante idée de 35.000 billets pour un stade qui peut abriter 65.000?). Plus de pression, oui, plus de stress sur les épaules aussi, et c'est là que Jalel Kadri va confirmer ses talents. S'il passe cet écueil avec succès, il gagnera tant en crédibilité et en popularité. Mais reste la question fondamentale : est-ce que notre sélection, telle qu'elle se comporte, a les standards d'aller faire quelque chose au Mondial ? La qualification est si vitale sur le plan financier (des revenus qui peuvent atteindre les 40 millions de dinars), et sur le plan sportif, mais en même temps, sont-ce des joueurs et un potentiel qui peuvent chercher ce fameux second tour au Mondial ? On n'en est pas encore là, il faudra composter ce billet d'abord à Radès.