Visiblement, rien ne va plus entre le ministère de l'Intérieur et les syndicats sécuritaires. La tension était déjà palpable entre le ministre de l'Intérieur, Taoufik Charfeddine, et certains syndicalistes depuis son retour à la tête du département. La goutte d'eau qui a fait déborder le vase : les événements liés à la sécurisation des festivals et les déclarations inappropriées des responsables des syndicats. Actuellement, c'est la rupture totale entre les deux parties, alors que le ministère pousse vers une restructuration radicale des syndicats. Récemment, le ministre de l'Intérieur Taoufik Charfeddine a pris la décision d'arrêter les cotisations et les prélèvements sur les salaires au profit des syndicats policiers. La décision qui a été justifiée par une mauvaise gestion de ces fonds en attendant une nouvelle organisation des syndicats, marque un nouveau pas vers la confrontation entre le département et ces syndicats. Pour le département, il est devenu obligatoire de promulguer un nouveau texte qui régule cette question, d'autant plus que les syndicats, outre l'œuvre syndicale, ont pris une nouvelle tournure, de nature politique même. Il faut rappeler qu'il y a un mois, une grande polémique a éclaté suite à l'annonce faite par les syndicats sécuritaires portant sur le boycott de certains spectacles culturels. Des syndicalistes se sont même permis de défier l'Etat en déclarant que dorénavant, ils seront les seuls à décider de la sécurisation des événements. En effet, le porte-parole du syndicat national des forces de sécurité intérieure, Chokri Hamada, avait affirmé que «dorénavant, les forces de l'ordre refuseront de sécuriser les spectacles qui contiennent des atteintes aux mœurs». Suite à ces dérapages, le ministère de l'Intérieur a annoncé que des mesures légales ont été engagées contre certains syndicalistes sécuritaires sur fond des derniers événements relatifs à la sécurisation des festivals. Le département a annoncé que ces mesures ont été prises pour éviter d'entraver le bon fonctionnement de l'appareil sécuritaire. Essayant de recadrer ses syndicats, le ministère a rappelé qu'il était seul habilité à sécuriser les festivals et que les forces de l'ordre travailleront et assureront leur mission sous le contrôle des cadres sécuritaires. Saïed veut unifier les syndicats Au fait, la situation des syndicats sécuritaires ne plaît surtout pas au Président de la République Kaïs Saïed. Ce dernier avait appelé à leur unification, critiquant ce qu'il a qualifié de «fragmentation», faisant savoir qu'une telle union garantira les droits des personnels de sécurité. En effet, comme il l'avait déjà proposé par le passé, Kaïs Saïed a prôné la création d'une structure syndicale unifiée, l'Union générale des forces de sûreté intérieure. Ce syndicat devra être basé sur des élections et se limiter aux aspects sociaux, selon lui. Toutefois, le secrétariat général des forces de sécurité intérieure a réagi hier à cette annonce, s'opposant à un tel appel. Pour lui, la pluralité syndicale dans le corps sécuritaire a plusieurs avantages, tandis qu'un corps syndical unifié pourrait constituer une «branche armée parallèle». Les syndicats se sont adressés récemment au Président de la République affirmant qu'ils s'attendaient à ce que «les membres des forces de sécurité intérieure bénéficient d'une sollicitude exceptionnelle, en termes de conditions de travail et de leur rôle impartial face à l'exacerbation du conflit politique». Dérapages sur les réseaux sociaux Au fait, le syndicalisme policier tunisien a vu le jour après la révolution de 2011. Les policiers se défendaient alors contre des attaques de vengeance et voulaient se protéger d'une nouvelle instrumentalisation politique de l'appareil sécuritaire. Aujourd'hui, il y a beaucoup de syndicats policiers en Tunisie, mais le premier et le plus important est le Syndicat national des forces de sécurité intérieure. Il est bien sûr très compliqué d'avoir des chiffres officiels concernant le nombre d'adhérents, mais tout ce que l'on sait, c'est que plusieurs milliers adhèrent à ces syndicats. L'activité de ces syndicats sur les réseaux sociaux fait également l'objet de plusieurs critiques. Accédant aux affaires criminelles, ces syndicats se précipitent pour les relayer sur les réseaux sociaux dans une course au buzz. Cette activité marque souvent une atteinte aux droits des accusés mais aussi au droit d'accès à une information vérifiée et fondée.