Certains syndicats sécuritaires annoncent leur opposition aux mesures disciplinaires et aux sanctions pénales prises contre les policiers ayant outrepassé leurs pouvoirs Des policiers syndicalistes reprochent au Chef de l'Etat d'avoir soutenu l'acteur Lotfi Abdelli aux dépens de l'institution sécuritaire Mercredi 17 août, on attendait les réactions des partis politiques et autres composantes de la société civile à l'annonce par l'Isie des résultats définitifs du référendum du 25 juillet dernier sur la Constitution de la nouvelle République en attendant que la nouvelle Constitution entre en vigueur, une fois promulguée par le Président Kaïs Saïed et publiée au Journal officiel de la République tunisienne (Jort). Les Tunisiens les plus optimistes attendaient également que le Président de la République prenne l'initiative et annonce la mise en place d'une commission de réflexion, même à caractère consultatif, qui aura pour mission d'élaborer, sur la base d'une approche participative et ouverte au maximum de forces politiques et civiles nationales, la nouvelle loi électorale sur la base de laquelle se tiendront les élections législatives anticipées programmées pour le 17 décembre prochain. Et comme le pressentaient plusieurs observateurs, analystes et aussi les citoyens qui suivent encore les développements qui marquent quotidiennement la scène politique nationale, les Tunisiens se sont réveillés, dès le petit matin, sur un flot de déclarations aussi tendues les unes que les autres données par des syndicalistes parlant au nom de certaines structures sécuritaires annonçant clairement et nettement qu'elles s'opposent aux mesures disciplinaires et pénales que le ministère de l'Intérieur a décidé de prendre à l'encontre de certains syndicalistes sécuritaires qui ont outrepassé les pouvoirs que leur accordent leurs fonctions d'agents de l'ordre. Une police républicaine qui fixe elle-même son champ d'intervention et ses prérogatives Et ceux qui ont réagi positivement à la déclaration du ministère de l'Intérieur ayant valeur de rappel à l'ordre et de rétablissement des pouvoirs accordés par la loi aux uns et aux autres et qui se sont félicités de l'esprit ayant présidé à cette déclaration rafraîchissant la mémoire de ceux qui semblent l'oublier, esprit qui stipule qu'une «police républicaine doit être impérativement disciplinée et neutre», c'est-à-dire doit agir à l'abri des agendas politiques et partisans et obéir uniquement à la loi et non aux instructions ou aux pressions, encore moins aux promesses ou aux séductions, ceux qui développent encore ces idées doivent, dès mercredi 17 août, revoir leur copie et rectifier leurs approches à la lumière de la conception que se font certains syndicalistes sécuritaires de leurs fonctions-mission. Ils se sont, en effet, donné, hier, le mot pour se relayer dans les studios radio, dès le lever du soleil, pour expliquer aux Tunisiens qu'ils constituent désormais «une police dont l'allégeance est à Dieu et à la nation et à eux seuls, qu'ils ont une mission à assumer et que personne, y compris les hauts responsables du ministère, n'ont le droit de leur donner des leçons ou des instructions auxquelles ils doivent obéir impérativement», comme l'a expliqué longuement sur les ondes d'une radio privée un syndicaliste sécuritaire de la région de Gafsa. Et le même syndicaliste de s'adresser directement, dans la foulée de son intervention, au Président de la République pour lui reprocher sans détour «le fait qu'il n'a pas soutenu les sécuritaires dans leur conflit avec l'acteur Lotfi Abdelli qui a porté atteinte à l'institution sécuritaire, à ses agents et à ses hauts cadres sans qu'il y ait de poursuites à son encontre». Il adresse également son discours à son ministre Taoufik Charfeddine pour lui demander le plus simplement du monde : «Quelles sont les réalisations que vous avez accomplies depuis votre désignation à la tête du ministère?», et il répond lui-même à sa question en soulignant que le ministre n'a rien fait de concret depuis qu'il est à la tête du département. Un autre son de cloche est perceptible auprès du syndicat des forces de sécurité intérieure où l'on déplore que le ministère prenne des sanctions disciplinaires à l'encontre de certains «agents de sécurité et qu'on décide de les faire comparaître par-devant la justice avant qu'ils ne soient interrogés par les responsables sécuritaires en charge d'enquêter sur les dépassements qu'auraient commis certains policiers». Quant aux propos qu'auraient prononcés certains syndicalistes sécuritaires et que plusieurs réseaux sociaux ont relayés, «il s'agit, en réalité, d'une simple discussion entre syndicalistes et d'un échange de vues à propos de l'initiative présidentielle relative à l'unification des syndicats sécuritaires», indique le même syndicaliste. Maintenant que «les syndicats sécuritaires» (une expression qui désigne en réalité une minorité parmi l'ensemble du corps des agents de sécurité) ont annoncé qu'ils s'opposaient à ce que les pouvoirs qu'ils se sont octroyés au fil des ans depuis la révolution et l'avènement de l'idée syndicale au sein du corps sécuritaire, toutes spécialités confondues, l'on se demande comment le gouvernement va réagir pour contenir ces comportements irresponsables et inacceptables qui commencent à s'installer dans certains syndicats — et même régions — avant que la contagion ne gagne les autres régions encore épargnées par ce mouvement et avant aussi — ayons le courage de le dire — que ne se répande la volonté de certains visages de conduire le vent de la contestation et de s'autoproclamer en tant que partenaires incontournables dans le processus national de réforme de l'institution sécuritaire.