Avec procès, un texte écrit par Sihem Akil, Jamel Madani signe sa première mise en scène. Le personnage principal de Procès est un avocat (Jamel Sassi) qui a quitté la Tunisie lors de l'ascension de Ben Ali au pouvoir en laissant sa femme enceinte .Il retourne en Tunisie après la révolution et apprend que son fils, qui a atteint l'âge de 23 ans, a été tué par une balle perdue lors de la révolution. L'avocat en question tentera de découvrir la vérité, mais en cours de route, il rencontre des avocats qui sont impliqués dans des magouilles financières. Des avocats qu'il défendra également, mais il découvre brusquement qu'il est en train de faire son propre procès et celui de tous les Tunisiens. «J'ai beaucoup apprécié le texte de Sihem Akil, dit Jamel Madani, j'ai senti qu'il traite de problématiques qui concernent la Tunisie dans un moment où on parle de réconciliation nationale, alors qu'il n'y a pas eu une reddition des comptes... Le texte pose ce problème avec beaucoup d'acuité. Car le vrai procès n'a pas eu lieu». Ainsi pendant le spectacle, on assiste à des procès «pour la forme», des procès «qui font semblant». La seule amorce d'un vrai procès a été dite dans une phrase par le personnage principal interprété par Jamel Sassi: «Nous sommes tous des traîtres, nous sommes tous des assassins». C'est aussi l'un des messages de la pièce : le vrai procès est celui des mentalités, de la pensée, de la loi, enfin, le procès de tout ce qui a fait de nous ce que nous sommes. Une pièce qui commence par des personnages qui ne parlent que pour s'insulter. En se jetant la pierre pour avoir quitté le pays et laissé les siens dans la mélasse. Une introduction assez forte et qui met le spectateur dans l'ambiance immédiate de l'après-révolution. Une révolution qui interroge le passé, mais qui développe une grande myopie envers l'avenir. Comment Jamel Madani a vécu sa première expérience de metteur en scène ? «Avec beaucoup de difficultés, avoue-t-il, puisque à la base, je suis un acteur qui a derrière lui plus de 35 pièces de théâtre, mais aussi une longue expérience dans la technique de la lumière, de la scénographie et du décor. Mais être confronté à cette expérience, n'est pas aussi facile qu'on le pense».