Les erreurs des arbitres qu'on ne cesse d'incriminer coûtent infiniment moins de points aux équipes que les abus et les débordements de leurs dirigeants. Une saison en chasse une autre. Pour le football tunisien, c'est cependant dans le sens contraire aux bonne habitudes, à l'éthique, aux valeurs et au fair-play sportifs que la tendance se confirme. Le fanatisme est en train de pourrir notre football. Il pourrait tout détruire parce qu'on n'a jamais pensé à le détruire dans l'œuf. Des scènes intolérables sur les terrains, dans les gradins et des fois pas nécessairement dans la sphère du jeu. A chaque fin de saison, on a pris l'habitude de se demander ce que seront nos prochains lendemains de football sans pour autant réaliser que le sport numéro un et ses compétitions à enjeux grandissimes ne peuvent plus, ne doivent plus être laissés au pouvoir de quelques personnes qui font à leur manière la pluie et le beau temps. La crédibilité et l'honneur du football tunisien n'ont plus la même signification, encore moins les mêmes valeurs. Par sa nature d'instrument de fête, la société du football est pourtant appelée à offrir à ceux qui viennent vers elle le moyen de loisir le plus soulageant et surtout à ne pas être le reflet de ce que l'on vit partout et chaque jour dans nos activités sociales et professionnelles. Quelle instance, quelle autorité sont aujourd'hui capables de prévenir et de combattre la violence, les dérives et les dépassements sous toutes leurs formes? A-t-on vraiment les responsables et les dirigeants qui font vraiment honneur à la mission dont ils sont investis? Tout ce que l'on peut dire est que nous avons des hommes parachutés, qui n'ont pas le profil, que le football, tel qu'il est conçu et vécu aujourd'hui, a poussé au-devant de la scène certaines personnes qui n'auraient jamais dû être là où elles sont actuellement. Même chose pour certains joueurs qui, en dépit de leur vécu et de leur carrière, n'ont jamais compris que leur présence sur le terrain et que le match en lui-même ne sont que la conséquence de toute une série d'attitude et d'adoption de valeurs. C'est dire combien le football avec ses nouveaux acteurs et ses instigateurs est aujourd'hui capable d'inspirer les idées et les actes les plus déplacés, les plus dénaturés. Une durée de légitimité déterminée S'en remettre au bon sens ou à la vision de ces hommes pour parler du football est contraire à la logique et aux références sportives. Se croyant grands et au-dessus de tout, ils ignorent les règles élémentaires de conduite dans la cour des grands. Ils ont tendance à oublier que quelle que soit leur influence, quel que soit leur pouvoir, ils ont une durée de légitimité déterminée. Ils n'ont rien oublié également de leurs prérogatives et de leurs privilèges, sûrs de leur bon droit. Ils sont devenus indifférents à tous les rappels à l'ordre, à toutes les sanctions. On mesure de plus en plus l'ampleur de leurs procédures et les instances concernées sont toujours impuissantes devant leur égarement. Un autre monde sportif est en train de naître. Celui qui accrédite l'image de dirigeants défaillants, incontrôlables, quelque part aussi ingouvernables. Qui abaissent la vocation de mandataire par des actes dont le football ne se relèvera certainement pas de sitôt. Sur les terrains, dans les plateaux de télévision, dans leurs discours et leurs prises de position, la majorité d'entre eux se distingue par un trait commun : ils ne disent pas ce qu'ils font et ne font pas ce qu'ils disent. Il y a dans leur inconscient collectif comme la légitimité de tout se permettre. Il serait tellement mieux s'ils acceptaient de ne pas se cacher derrière les faux arguments et s'ils se décidaient à éclairer l'opinion plutôt qu'à éteindre la lumière. Il est aujourd'hui indispensable de tirer les enseignements d'une saison à oublier et marquée par toutes les dérives qu'on n'aurait jamais pensé. Tenir une comptabilité sur ce sujet relève d'un exercice de haute voltige. Des dépassements de tout genre, un président de club déguisé sous le masque de Batman! des matches faussés, des forfaits, des radiations à vie. On en a vu de toutes les couleurs. Les erreurs des arbitres qu'on ne cesse d'incriminer coûtent infiniment moins de points aux équipes que les abus et les débordements de leurs dirigeants. On aura toujours le droit d'aspirer à un football qui ne soit pas inspiré des polémiques. Pour autant il est nécessaire de mettre en œuvre correctement la spécificité sportive. Les instances statuaires doivent trancher et assumer leur rôle. Qu'elles soient saisies de tous les sujets, qu'elles ne cèdent pas à la politique des deux poids deux mesures. A défaut, la situation actuelle nous inspire beaucoup d'inquiétude sur la façon dont le football est dirigé. Aujourd'hui, c'est toute l'institution qui est en danger.