Pour l'icône du football tunisien, sans un état d'esprit et sans ambitions, on ne peut pas aller loin. C'est pourquoi nos footballeurs ne percent pas à l'étranger «Le professionnalisme est avant tout une mentalité, un état d'esprit et un savoir-vivre. Un joueur peut avoir un don de ciel en étant un prodige. Mais la technicité et les qualités individuelles ne suffisent pas pour percer dans le monde du football. Nos joueurs sont mal formés. De plus, le rythme du football tunisien n'a rien à voir avec le football européen. Ce sont deux mondes complètement différents. Pour passer d'un monde à l'autre, il faut être armé de patience, avoir du souffle et, surtout, avoir la tête sur les épaules. Mais nos joueurs ne pensent qu'à une seule chose, l'argent. Ils ne se construisent pas un projet sportif. Pour eux, évoluer en Europe se résume à des contrats aux sommes exorbitantes. Ils pensent tout de suite à des bails à 400 mille euros. Mais se maintenir techniquement et physiquement à la hauteur de ces grands contrats, c'est une autre paire de manches. Sur le plan carrière, nos footballeurs ne voient pas grand. Leurs objectifs sont limités. Ils pensent tout de suite à la belle voiture, à acheter un appartement et sortir s'amuser sans faire attention à leur hygiène de vie. Ils ne rêvent pas d'aller jouer à l'Atlético de Madrid, à titre d'exemple. Voilà une idée qui devrait frôler normalement l'esprit d'un joueur de la catégorie junior. Jouer en Premier League: cela s'appelle avoir une grande ambition. Le joueur qui ne travaille pas sérieusement ne progresse pas. Beaucoup de joueurs tunisiens avaient un talent fou et sont passés à côté. Pour atteindre le haut niveau, il faut, certes, avoir une bonne hygiène de vie, mais cela ne suffit pas. Il faut cravacher dur pour espérer dans un premier temps décrocher un contrat en Europe, et ensuite travailler encore plus dur pour se maintenir. Car le plus difficile ce n'est pas de débarquer en Europe, mais d'y rester le plus longtemps possible. Du temps où j'étais joueur, je suis resté 7 ans à l'étranger. J'avais quitté la Tunisie à l'âge de 19 ans. J'estime avoir réussi à 70%. Mais faut-il savoir qu'en Europe, la concurrence est rude. Et ce qui ne m'a pas aidé par moments, c'était la convocation en équipe nationale. Comme on joue la CAN au mois de janvier ou de février, s'absenter une quinzaine de jours, voire un peu plus, te fait perdre ta place dans ton club. Et il faut du temps pour décrocher de nouveau une place de titulaire. Au Standard de Liège, nous étions 11 étrangers. Les places étaient donc très chères. Quand on part en équipe nationale, on perd forcément sa place au club. Malgré tout ce que j'ai entrepris, je ne suis pas satisfait de mon passage en Europe. Je pense que j'étais capable de mieux faire. D'ailleurs, quand je suis revenu en Tunisie à l'âge de 27 ans, j'avais conservé tout ce que j'avais appris en Europe, ce qui m'avait permis de me maintenir neuf ans. J'ai arrêté le football à 36 ans. Car je m'entraînais dix fois plus que mes camarades. En 2002, on avait même pensé à moi en équipe nationale alors j'avais dans les 34 ans. Bref, la fragilité mentale est la cause principale qui ne permet pas aux footballeurs tunisiens de percer en Europe. Pour faire une grande carrière, il faut avoir les qualités suivantes : la force de caractère, de la personnalité, de la patience et beaucoup de persévérance. Il faut aussi avoir un projet sportif pour soi et ne pas penser qu'à l'argent».