On s'attendait à un amphithéâtre archiplein pour le concert de Tiken Jah Fakoly. Or, en ce mardi 16 août, la ferveur estivale et festivale aussi a perdu un cran. Baisse de régime du public ? En tout cas, les fervents adeptes de la musique reggae ne pouvaient pas manquer ce grand rendez-vous avec Fakoly. Avec ses tresses à la Bob Marley et son pagne africain, il fait irruption sur la scène sous les hourras d'un public composé notamment de jeunes. Au rythme saccadé du reggae, les gradins reprennent les chansons qui dénoncent l'Afrique «esclavagisée», colonisée, dévalisée par les Occidentaux. Des textes aux accents politiques qui rappellent que l'Afrique va mal. Sans démagogie apparente, Fakoly, connu pour son engagement avec les altermondialistes et les contempteurs françafrique, est le défenseur acharné d'une mondialisation équitable. Rêve d'une humanité, d'une justice sociale, tel est le message que veut passer le chanteur qui se veut le porte-parole des sans voix. Tiken Jah Fakoly a commencé à se faire connaître comme reggamen dans les années 80. Son père lui donne le surnom de Tiken, qui signifie petit garçon, et Fakoly fait en référence à un ancêtre, chef de guerre au XIIe siècle, lieutenant de l'empereur mandingue Soundiata Keita. Quant à «Jah», c'est le dieu des rastas jamaïcains. Ses chansons sont écrites comme des chroniques sur la situation déplorable, notamment de son pays, la Côte d'Ivoire, mais elles s'étendent sur toute l'Afrique. «Mangercratie», publié en 1997 en français, dénonce les hommes politiques «affameurs du peuple». 500 mille exemplaires seront diffusés en Afrique de l'Ouest. Avec «Caméléon», portrait sarcastique du général Robert Guei qui s'accroche au pouvoir après son coup d'Etat de 1999, il connaîtra des ennuis. «Le pays va mal», enregistré en Jamaiqu,e révèle l'état d'un pays en difficulté. En 2003, il enregistre «Question de peau» en duo avec Bernard Lavilliers couronnée la même année d'une Victoire de la musique. «Quitte le pouvoir» est un autre coup de gueule contre les dirigeants africains corrompus. Digne héritier du mouvement rasta, il hisse haut le reggae, ce dérivé du blues, que le chanteur jamaïcain Bob Marley a imposé comme la musique des opprimés du monde. A Carthage, Fakoly a réussi un formidable concert de musique engagée qui a laissé le public sans voix. Un grand moment inoubliable.