Débrayage des recettes des finances, aujourd'hui et demain, dans toutes les régions. Pas de permanence ce samedi Mutisme inconcevable des gouvernements qui se sont succédé au pouvoir, il y a maintenant six ans. Et encore, cette position passive face à l'élan protestataire qui n'a épargné aucune région ou secteur continue à nourrir un sentiment de colère et de désobéissance. Une réaction qui paraît pour certains syndicalistes et droit-de-l'hommistes « ordinaire», voire un recours nécessaire. Que faire si ces frondeurs investissent l'espace public ? Comment tempérer leurs ardeurs? Quelles explications peut-on leur donner pour les convaincre à faire marche arrière ? Le gouvernement Chahed a-t-il de nouvelles promesses à leur proposer ? Mais, ces demandeurs d'emploi et du développement y ont-ils encore confiance ? L'on ne peut guère rassurer sur ce point. Car une nouvelle vague de protestations est en passe d'éclater un peu partout. Retour de manivelle ! Tout recommence par une grève générale, aujourd'hui et demain, dans les recettes des finances, à travers les régions du pays. En réponse à l'appel du comité administratif et sectoriel de la fédération générale de la planification et des finances relevant de l'Ugtt, tous les bureaux de collecte de taxes et impôts centraux et régionaux, ainsi que la direction générale de la comptabilité publique et du recouvrement, seront fermés, deux jours durant. Ce débrayage sera ponctué par un rassemblement des agents à la Place Mohamed-Ali, à Tunis. Leurs revendications, telles que scandées par les syndicalistes, se résument en l'application des conventions déjà signées avec le ministère des Finances. Elles portent sur le parachèvement du projet de loi n°24-2013 relatif à l'amendement de l'article 2 de la fonction publique, la révision de la prime des infractions fiscales, un statut du règlement intérieur et la mise en place de la mutuelle des agents. Et ce n'est pas tout. Samedi prochain, faut-il le noter, il pourrait ne pas y avoir de séances de permanence dans les recettes des finances. Le ministre dans le collimateur ! Et la déferlante contestataire ne s'arrête pas là. Les enseignants du primaire et du secondaire seront, de nouveau, dans la rue. L'interminable bras de fer avec leur patron, Néji Jalloul, ministre de l'Education, semble prendre une mauvaise tournure. Toujours sur le qui-vive, la corporation bicéphale veut coûte que coûte voir le ministre plier bagage et présenter sa démission. On reproche à ce dernier son arrogance et ses déclarations fracassantes à l'encontre du corps enseignant, tous cycles confondus. De son côté, le ministre ne laisse passer aucune occasion pour défendre sa cote et se mettre hors de toute accusation. Au point d'entendre M. Noureddine Taboubi, fraîchement élu secrétaire général de l'Ugtt, demander un successeur à la tête du ministère. Et pour cause. Réunie, dernièrement, l'instance administrative sectorielle de l'enseignement secondaire a décidé d'entrer en grève générale, le 22 de ce mois. Elle sera précédée, deux jours avant, d'un regain de mouvements jusqu'au 24 février. Puis, l'appel est relancé pour un rendez-vous, le 1er mars prochain, avec un grand rassemblement à Bab Bnet, devant le siège du ministère de l'Education. 60 mille ouvriers en grève Une semaine après, ce sera au tour du Syndicat général des instituteurs de débrayer les 8 et 9 mars, faisant suite à des sit-in ouverts et prolongés. Sur fond de la même revendication que celle avancée par leurs collègues du secondaire : limogeage du ministre. Si ce dernier campe encore sur ses positions, une telle mobilisation corporatiste réagira autrement peut-être. Sur la même lancée, le secteur de la santé publique sera, aussi, paralysé par une grève, a priori, annoncée pour le 23 février. Sauf que les négociations entre le ministère de tutelle et la Fédération générale des médecins de la santé publique, sous la bannière de la centrale syndicale, pourraient aboutir à un accord, à l'arraché, en vertu duquel une loi sur la responsabilité médicale verra le jour. Une loi à double vocation : garantir les droits du médecin et du patient. Ces revendications, rappelle-t-on, surgissent dans la foulée de l'affaire du nouveau-né de Sousse et l'arrestation du médecin anesthésiant de Gabès, deux événements ayant, ces dernières jours, défrayé la chronique et fait couler beaucoup d'encre. Ce syndrome contagieux des grèves affecte, au même titre, les ouvriers de chantiers dont le dossier traîne en longueur depuis 2011. Sans qu'ils ne voient rien venir à ce jour. L'on parle de quelque 60 mille employés rattachés aux services publics et des collectivités locales, mais qui souffrent encore d'un régime de travail assez précaire. Outre les sit-in récurrents aux quatre coins du pays, ils ont décidé d'observer, le 9 mars prochain, une grève nationale, demandant que leur situation soit définitivement régularisée. Autant dire les faire bénéficier d'une couverture sociale et sanitaire, conformément aux normes en vigueur. M. Sami Khlifi, porte-voix du collectif des coordinations régionales des ouvriers temporaires, a insisté sur la concrétisation de l'accord du 28 janvier 2016, suite auquel le gouvernement Essid, alors au pouvoir, s'était engagé à rompre avec toutes les formes d'emploi précaire. Dans la même journée du 9 mars, a-t-il ajouté, les grévistes se dirigeront vers La Kasbah, où un rassemblement aura ainsi lieu. Et là, on se pose la question suivante : comment le gouvernement Chahed va-t-il se comporter face à la recrudescence des grèves, à la gronde de la rue et à ces débrayages récurrents ?