Le grand Martin Scorsese signe à 74 ans un nouveau film remarquable, son 24e long métrage de fiction en un demi-siècle de carrière. « Silence» est sur nos écrans depuis mercredi dernier, un incroyable périple de deux jésuites dans le Japon du XVIIe siècle, qui mêle fresque historique, engagement spirituel, portraits intimes et questionnement moral Scorsese nous fait voyager dans le temps, précisément au XVIIe siècle. Deux prêtres jésuites se rendent au Japon pour retrouver leur mentor, le père Ferreira, disparu alors qu'il tentait de répandre les enseignements du catholicisme. Au terme d'un dangereux voyage, ils découvrent un pays où le christianisme est décrété illégal et ses fidèles persécutés. Ils devront mener dans la clandestinité cette quête périlleuse qui confrontera leur foi aux pires épreuves. Lors de sa sortie en salles en France, au début de ce mois de Fevrier, la critique fut mitigée entre une presse qui s'extase face aux prouesses du cinéaste et celle qui s'élève contre sa vision conservatrice, voire fanatique. Dans Télérama, on écrit : «"Silence" est l'apothéose d'un Scorsese hanté par la grâce, donnée à certains presque naturellement, mais que d'autres poursuivent à jamais et en vain». pour Première, c'est un chef-d'œuvre qui pose plus de questions qu'il n'impose une vision. Quant au journal Le Monde on y découvre une critique enthousiaste : «Avec le bruissement d'une bande sonore complexe (...) ces images dessinent un monde dans lequel les angoisses des hommes, leur agitation, apparaissent éphémères, dignes d'attention et de compassion, mais presque imperceptibles au regard de ce cosmos que Martin Scorsese a su faire tenir dans les limites d'un écran». A Libération, on est moins indulgent, «En adaptant Silence de Shusaku Endo, Martin Scorsese part de faits historiques complexes (la persécution des chrétiens dans le Japon du XVIIe siècle) pour les réduire à des questions primaires qui le travaillent depuis toujours : la nécessité de s'affronter à l'autre pour exister et croire, avec comme principal dilemme le choix entre la violence et la trahison. Alors que dans la Dernière Tentation du Christ, Jésus n'était que doute et tentation (ce qui valut à Scorsese une virulente condamnation de l'Eglise), les prêtres de Silence sont des blocs de certitude. Dans Silence, la foi se définit avant tout comme la capacité à résister coûte que coûte à ce qui la nie, jusqu'à accepter que d'autres soient massacrés plutôt que de s'abaisser à abjurer. Scorsese se montre peu distant vis-à-vis de cette posture que l'on qualifierait aujourd'hui de fanatique : la modération n'est pas son problème». Silence est visible à l'Agora, le spectacle est garanti et le public peut se faire sa propre idée.