L'activité a perdu plus de 90% de sa production lors des trois dernières décennies Confronté à des défis structurels majeurs, le secteur du tapis et du tissage artisanal n'a pu contribuer pleinement à la création des richesses et de l'emploi, à l'instar de ce qui se passe dans d'autres pays, comme l'Iran, l'Inde et la Turquie, où l'activité artisanale est fortement valorisée et génère des revenus aussi conséquents que l'industrie et les services. Les chiffres révélés lors de la conférence nationale tenue hier sous les auspices du ministère du Tourisme et de l'Artisanat sont alarmants. L'activité a perdu plus de 90% de sa production lors des trois dernières décennies. Les employés du secteur ont massivement migré vers les activités industrielles et des services, dont les revenus sont nettement supérieurs, un salaire de 350 dinars, contre des revenus avoisinant les 100 dinars pour les artisanes du secteur. Et l'absence de cadre adéquat pour la formation des compétences et pour la commercialisation des produits empêche la mobilisation d'investissements conséquents dans l'innovation et la promotion du secteur. Les opérateurs dans ce domaine déplorent une marginalisation abusive qui risque de détruire le secteur du tapis à jamais, comme cela a été le cas pour plusieurs métiers de l'artisanat. Pire, au niveau du marché, l'entrée en circulation du tapis industriel, bien qu'interdite, complique les choses en acheminant la demande vers des produits nettement plus compétitifs au niveau des prix. D'après certains points de vue, le libre-échange en est pour quelque chose dans la situation précaire dont souffre le secteur. « Le désengagement de l'Etat de l'appareil de production en 1996 sans instruments adéquats d'accompagnement d'un début de tissu d'entreprises privées vulnérables a eu des conséquences néfastes sur le secteur », lit-on dans l'une des études communiquées à l'occasion de cette conférence nationale. Le principal objectif de l'organisation d'une telle conférence était de trouver des solutions durables permettant, d'abord, de sauver le secteur de son actuelle dégringolade. Des ateliers thématiques ont regroupé plus de 360 participants entre producteurs, fournisseurs de matières premières, commerçants et distributeurs ont débattu des moyens susceptibles d'assurer une relance rapide du secteur. Et par là même lui permettre de jouer pleinement son rôle dans le développement économique, par la création d'emplois et de la valeur. « Cette relance ne peut être assurée qu'à travers des unités pilotes capables de tirer ces activités vers le haut par un encadrement adéquat, une formation qualifiante et une production innovante répondant aux goûts des marchés, elles serviront de modèle et locomotive attirant les initiatives privées à investir dans le secteur». C'est ce qu'on a recommandé, entre autres, en marge des ateliers thématiques tenus hier à cette occasion. En outre, un programme a été identifié pour la création d'une soixantaine d'unités étalées sur trois ans à partir de 2017 pour une capacité de 3500 emplois et reparties sur 13 gouvernorats prioritaires et à tradition artisanale. Dans ce même ordre d'idées, il a été convenu de former deux mille filles, moyennant une somme de deux millions de dinars, financement mobilisé en partenariat avec le ministère de la Femme, de l'Enfance et de la Famille. Cela étant, les acteurs du secteur s'attendent à une réaction positive du gouvernement et à un signal fort, en rupture avec la marginalisation subie par le passé.